(Photo: LoveTheWind/iStock by Getty Images) (Photo: LoveTheWind/iStock by Getty Images)

Les différences qui existent sur le plan de l’accès aux vaccins et de la capacité à prendre des mesures de soutien creusent l’écart entre les pays avancés et de nombreux pays émergents et pays en développement. Face à des déficits élevés et à des niveaux d’endettement records, les pays qui ont un accès restreint aux financements doivent maintenir un équilibre budgétaire délicat entre l’adoption de mesures adéquates de soutien et la préservation de la stabilité financière.

Faute de mesures résolues pour faire face à cet écart croissant, la COVID-19 continuera de faire des victimes et de détruire des emplois, et de peser longtemps sur l’investissement, la productivité et la croissance dans les pays les plus vulnérables. La pandémie continuera de perturber la vie des populations les plus vulnérables, et les pays enregistreront une hausse de la pauvreté extrême et de la malnutrition, tout espoir d’atteindre les objectifs de développement durable étant ainsi anéantis.

Pour réduire cette fracture due à la pandémie, il est nécessaire d’agir tous ensemble pour accroître l’accès aux vaccins, obtenir les financements indispensables et accélérer la transition vers un monde plus vert, numérique et plus inclusif.

Obtenir des financements

En raison de la pandémie, les dettes et les déficits, pourtant déjà élevés, ont augmenté de manière spectaculaire. En 2021, les déficits budgétaires globaux ont atteint en moyenne 9,9 % du PIB dans les pays avancés, 7,1 % dans les pays émergents et 5,2 % dans les pays en développement à faible revenu. La dette publique mondiale devrait s’approcher de 99 % du PIB d’ici la fin de 2021.

Dans ce contexte, l’aide apportée par le FMI a été cruciale pour sauver des vies et des moyens de subsistance. Face à la crise, le FMI a accordé de nouveaux financements à hauteur de 117 milliards de dollars et des allégements du service de la dette à 85 pays. Cela inclut une aide financière à 53 pays à faible revenu et un allégement du service de la dette sous forme de dons à 29 des pays membres les plus pauvres et les plus vulnérables. Nous estimons qu’en 2020, l’aide apportée par le FMI a permis aux pays émergents et aux pays en développement de dépenser un surcroît de leur PIB d’environ 0,5 % et de près de 1,0 %, respectivement. Le FMI a apporté son aide principalement là où elle était la plus indispensable.

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Les conditions favorables sur les marchés financiers mondiaux ont permis aux pays qui présentent un faible risque de crédit d’augmenter leurs dépenses publiques de manière considérable et durable face à la pandémie. Cependant, dans les pays ayant un accès plus restreint au financement extérieur, les dépenses primaires devraient être encore plus faibles que prévu avant la pandémie.

 

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Un moment décisif

Il est urgent d’agir au niveau multilatéral pour combler les écarts d’accès aux vaccins et mettre fin à la pandémie. La récente proposition des services du FMI à cet égard, approuvée par l’Organisation mondiale de la santé, la Banque mondiale et l’Organisation mondiale du commerce, établit pour objectif de vacciner au moins 40 % de la population dans chaque pays d’ici la fin de 2021 et au moins 60 % d’ici le milieu de 2022, ainsi que d’assurer un approvisionnement adéquat en outils de diagnostic et en traitements. Des progrès ont été accomplis sur plusieurs fronts, mais une impulsion plus forte est nécessaire. Le groupe de travail sur les vaccins contre la COVID-19 a aussi mis en place un tableau de bord afin de recenser clairement et de s’attaquer d’urgence aux écarts d’accès aux outils de lutte contre la COVID-19.

Les pays devront aussi voir comment ils peuvent mobiliser des ressources chez eux et améliorer la qualité de leurs dépenses. La COVID-19 a aggravé la tension qui existe entre des besoins de développement considérables et des ressources publiques rares. Pour obtenir les recettes indispensables, les pouvoirs publics devront renforcer leur système fiscal. C’est d’autant plus difficile que la concurrence fiscale, les questions relatives à l’allocation de l’assiette de l’impôt et des techniques agressives de planification fiscale mettent sous pression l’imposition des revenus.

Mais il est possible d’accroître les recettes, et cela devra se faire d’une manière qui encourage la croissance et favorise l’inclusion. Les pouvoirs publics doivent chercher à améliorer l’efficience, à simplifier les codes des impôts, à réduire la fraude fiscale et à accroître la progressivité de l’impôt. Il sera essentiel aussi de renforcer la capacité de perception de l’impôt et d’exploiter le rôle du secteur privé. Tant que la pandémie persiste, la politique budgétaire doit rester flexible et s’adapter à une situation en constante évolution.

Les actions collectives peuvent contribuer à réduire les fractures. Le plan de relance européen « Next Generation », dont 50 % sont constitués de dons, constitue une source de financement importante pour les pays membres de l’Union européenne qui disposent d’un espace budgétaire restreint. L’accès au soutien au titre de ce plan et des coûts d’emprunt faibles expliquent pourquoi l’on ne s’attend pas à une divergence entre les pays avancés et les pays émergents au sein de l’union européenne.

La communauté internationale devra donc jouer un rôle essentiel pour obtenir des financements en faveur des pays les plus vulnérables. L’allocation générale de DTS par le FMI à hauteur de 650 milliards de dollars fournira aux pays des liquidités supplémentaires et les aidera à faire face à de difficiles arbitrages. Le redéploiement de DTS des pays riches vers les pays en développement renforcera encore ce soutien. Le FMI explore avec ses pays membres l’établissement d’un nouveau mécanisme, le fonds de résilience et de viabilité, qui aurait pour objectif d’aider les pays émergents et les pays en développement à relever le défi du changement climatique et à mettre en place des économies résilientes. Cependant, cette aide seule ne suffira pas et d’autres sources de soutien des donateurs seront nécessaires aussi.

L’accord historique conclu par plus de 130 pays sur l’imposition des sociétés constitue un signe encourageant. Cet accord prévoit un taux minimum de 15 % pour l’impôt des sociétés. Il mettra fin au nivellement par le bas sur le plan de l’impôt des sociétés à l’échelle internationale. Il est crucial d’en établir les détails afin qu’il permette de dégager des ressources pour des investissements cruciaux dans la santé, l’éducation, les infrastructures et les dépenses sociales dans les pays en développement.

Ce signal prometteur offre une occasion d’agir. L’urgence des défis à l’échelle mondiale — la COVID-19, le changement climatique et le développement exclusif — exige une action à l’échelle mondiale. C’est un moment décisif de l’histoire. 2021 doit être l’année où nous rassemblons tous nos forces.

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Vitor Gaspar, ressortissant portugais, est directeur du département des finances publiques du FMI. Avant de rejoindre le FMI, il a occupé différents postes de haut niveau à la Banque du Portugal, en dernier lieu celui de conseiller spécial. De 2011 à 2013, il a été ministre des Finances du Portugal, avec rang de ministre d'État. Il a dirigé le Bureau des conseillers de politique européenne de la Commission européenne entre 2007 et 2010, et a été directeur général des Études à la Banque centrale européenne de 1998 à 2004. M. Gaspar est titulaire d’un doctorat et d’un diplôme postdoctoral en économie de l’université nouvelle de Lisbonne. Il a également étudié à l’université catholique portugaise.

Gita Gopinath est la conseillère économique et directrice du département des études du Fonds monétaire international (FMI). Elle est en congé pour service public du département d’économie de l’université Harvard, où elle exerce les fonctions de professeure d’études internationales et d’économie, titulaire de la chaire John Zwaanstra.

Les travaux de Mme Gopinath, qui portent essentiellement sur la finance internationale et la macroéconomie, ont été publiés dans bon nombre de revues économiques phares. Elle est l’auteure de nombreux articles sur les taux de change, le commerce et l’investissement, les crises financières internationales, la politique monétaire, la dette et les crises des pays émergents.

Elle est actuellement corédactrice du Handbook of International Economics, après avoir été corédactrice de l’American Economic Review et rédactrice en chef du Review of Economic Studies. Elle a également été codirectrice du programme Finance internationale et macroéconomie du National Bureau of Economic Research (NBER), universitaire invitée à la Banque fédérale de réserve de Boston et membre du groupe consultatif de la Banque fédérale de réserve de New York. De 2016 à 2018, elle était la conseillère économique du ministre en chef de l’État indien du Kerala. Elle a par ailleurs siégé au sein du groupe des personnalités éminentes étudiant les questions relatives au G-20, pour le compte du ministère indien des Finances.

Mme Gopinath est membre élue de l’Académie américaine des arts et des sciences et de la Société d’économétrie, et lauréate du prix Distinguished Alumnus de l’université de Washington. En 2019, le magazine Foreign Policy l’a désignée parmi les principaux penseurs mondiaux (Top Global Thinkers) ; en 2014, elle a été placée sur la liste des 25 économistes les plus influents de moins de 45 ans par le FMI ; et en 2011, elle a été nommée jeune dirigeante mondiale (Young Global Leader) par le Forum économique mondial. Le gouvernement indien lui a décerné le Pravasi Bharatiya Samman, plus grande distinction attribuée aux Indiens de la diaspora. Avant d’enseigner à l’Université Harvard à partir de 2005, elle était maître de conférences en sciences économiques à la Booth School of Business de l’Université de Chicago.

Mme Gopinath est née en Inde. Elle est citoyenne américaine et citoyenne indienne de la diaspora. Elle a obtenu son doctorat en économie à l’Université de Princeton en 2001, après avoir obtenu une licence au Lady Shri Ram College et des diplômes de maîtrise à la Delhi School of Economics et à l’université de Washington.