Quels choix financiers pour l’Afrique face au changement climatique ?
le 1 juillet 2021
Je remercie chaleureusement la Banque de France, la Ferdi et l’AFD d’avoir organisé cette conférence et de m’avoir donné la possibilité de parler de l’efficacité des instruments financiers parmi les outils pour les politiques climatiques en Afrique subsaharienne.
Nous sommes tous d’accord sur le fait que le renforcement de la résilience au changement climatique revêt une importance primordiale dans la région.
Ce renforcement nécessite notamment des investissements dans des infrastructures résilientes au changement climatique — en particulier dans l’agriculture — qui réduiront les conséquences des chocs climatiques et jetteront les bases d’une croissance économique durable.
Mais la résilience climatique requiert aussi des dépenses sociales. Les investissements dans les soins de santé et l’éducation se traduisent par une population plus résiliente et plus productive, tandis que des filets de sécurité sociale renforcés aideront à réduire au minimum les conséquences néfastes des chocs climatiques et créeront des amortisseurs capables de compenser les pertes de revenus consécutives aux catastrophes dues au climat.
Néanmoins, tout cela coûte de l’argent, et étant donné leurs niveaux d’endettement élevés, surtout après la pandémie, de nombreux pays de la région n’ont pas l’espace budgétaire nécessaire. Il est possible de dégager une marge de manœuvre en modifiant la composition des dépenses — une diminution progressive des subventions à l’énergie, par exemple, pourrait libérer des ressources substantielles tout en soutenant une économie plus verte. Et bien sûr, l’introduction de taxes carbone ou l’augmentation des taxes sur les carburants peut accroître les recettes tout en contribuant aux efforts d’atténuation. En même temps, il sera important d’utiliser une partie des ressources générées pour protéger les segments vulnérables de la population.
Il ne fait donc aucun doute que la mobilisation de financements publics extérieurs et de ressources du secteur privé sera une priorité essentielle pour de nombreux pays d’Afrique subsaharienne. Permettez-moi de présenter quelques instruments ou canaux qui me semblent particulièrement importants.
Premièrement, les fonds pour le climat peuvent fournir des dons substantiels tant pour les projets d’adaptation que pour les projets d’atténuation tout en catalysant l’innovation climatique et la participation du secteur privé. Récemment, par l’intermédiaire du PNUD, le Fonds vert pour le climat (FVC) a aidé à moderniser les systèmes d’information sur le climat et d’alerte précoce du Malawi. Combinée aux progrès de l’accès au réseau mobile, cette opération a aidé les agriculteurs et les pêcheurs du Malawi à renforcer leur résilience au climat.
De même, au Ghana, au Kenya, au Nigéria et en Ouganda, le FVC a soutenu un fonds qui aide les PME à fournir des services financiers innovants aux agriculteurs — comme des services de micro-assurance et de paiement par téléphone mobile. La participation de référence prise par le FVC a aidé à éliminer les risques du fonds et a ensuite attiré des investisseurs privés.
Bien entendu, les normes élevées en matière de gouvernance, de marchés publics et de gestion financière imposées par ce type de fonds pour le climat sont nécessaires pour les pays de la région. Sur ce point, le FMI et les autres partenaires du développement peuvent aider en facilitant le renforcement des capacités et en informant sur les progrès accomplis par les pays d’Afrique subsaharienne dans ces domaines essentiels.
Deuxièmement, permettez-moi de mentionner les crédits carbone ou les crédits pour l’environnement, qui pourraient être une autre source de financement possible, en fonction de l’évolution des marchés internationaux pour ces crédits. Ils accroîtraient aussi les incitations à promouvoir la protection de l’environnement.
Les obligations vertes sont un troisième instrument financier critique que je souhaite mettre en lumière. Elles sont habituellement affectées à des projets associant un rendement relativement élevé et un risque faible, comme l’énergie verte. Au Kenya, l’accès à l’électricité est passé de 40 % à 70 % en cinq ans, principalement grâce à de petites centrales de production d’électricité hors réseau alimentées à l’énergie solaire. Un modèle de crédit-bail (pay-as-you-go) à faible coût associé à un système de paiement par téléphone mobile a facilité l’expansion du système, surtout en zone rurale, et 10 fois plus d’emplois ont été créés que dans les compagnies d’électricité traditionnelles.
Pour les pays dont la prime de risque est élevée, comme de nombreux pays d’Afrique subsaharienne, le succès des obligations vertes reposera sur une meilleure gestion de la dette.
De meilleures informations sont aussi une condition préalable importante : les pays doivent instaurer des normes en matière de publication des informations environnementales et de finance verte, et celles-ci doivent être harmonisées à l’échelle internationale.
Enfin, j’ajouterai qu’avec la sophistication croissante des marchés financiers d’Afrique subsaharienne et la diminution des primes de risque, d’autres options de financement pourraient apparaître, qui devraient aider les administrations, les entreprises et aussi les ménages à réaliser les investissements dont ils ont besoin : les particuliers pourront construire des logements plus résilients et disposant d’équipements d’assainissement, auront accès à une eau potable sûre et gagneront en autonomie par l’éducation et les soins de santé.
Les produits d’assurance sont particulièrement intéressants, car ils pourraient être extrêmement utiles pour renforcer la résilience, bien qu’ils soient assez peu répandus en Afrique subsaharienne aujourd’hui. Une des clés ici est d’assouplir des réglementations trop restrictives, comme celles qui font obstacle aux investissements dans les projets d’infrastructure.
En somme, nous pensons, au FMI, que les instruments financiers et les canaux comme ceux que je viens d’évoquer peuvent jouer un rôle absolument critique en aidant l’Afrique subsaharienne à devenir plus résiliente au changement climatique. C’est pourquoi je me réjouis de voir un événement comme celui-ci, consacré à ce sujet important.
Je m’arrête ici et vous remercie pour votre attention.
Département de la communication du FMI
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