Groupe intergouvernemental des vingt-quatre pour les questions monétaires internationales et le développement

le 18 octobre 2019

1. Notre réunion, présidée par Julio Velarde, gouverneur de la Banque centrale du Pérou, s’est tenue à Washington. Les fonctions de premier et deuxième vice-présidents ont été assurées respectivement par Ken Ofori-Atta, ministre des Finances du Ghana, et Jafar Mojarrad, administrateur pour l’Iran au Fonds monétaire international (FMI).

Triompher des obstacles sur le chemin de la croissance mondiale et de la stabilité

2. La croissance mondiale est atone et l’accélération attendue en 2020 est exposée à des risques élevés. L’aggravation constante des tensions commerciales et leurs répercussions potentielles sur les marchés financiers contribuent à assombrir ces perspectives. Des actions concertées et une coopération multilatérale dans les domaines clés sont indispensables pour enrayer le ralentissement économique et assurer une croissance inclusive.

3. Il est important pour le développement d’apporter son soutien à un système commercial mondial fondé sur des règles. Nous appelons les dirigeants à trouver la voie d’un dialogue constructif afin d’apaiser sans délai les tensions commerciales et de régler les problèmes relatifs à la gouvernance commerciale mondiale. La perte de confiance dans le système commercial et le recours à la puissance de négociation pourraient accroître l’incertitude et nuire aux perspectives de croissance des pays en développement. Il est indispensable que les pays prennent les mesures nécessaires pour promouvoir un système commercial moderne, fondé sur des règles, ouvert, non discriminatoire et équitable, avec l’Organisation mondiale du commerce en son centre, un système au sein duquel l’accès au commerce des biens et des services profite à tous les pays et où les procédures existantes de règlement de litiges continuent de fonctionner, mais avec une plus grande efficacité.

4. Nous appelons de nouveau à veiller à ce que le FMI demeure une institution solide, reposant sur un système de quotes-parts et disposant de ressources adéquates, en position centrale dans le dispositif mondial de sécurité financière. Compte tenu de la montée des risques et des facteurs de vulnérabilité qui s’accumulent dans l’économie mondiale, nous appelons, au minimum, à un maintien de la capacité de prêt actuelle du FMI. Nous regrettons profondément l’appui insuffisant apporté à une augmentation des quotes-parts dans le cadre de la 15e révision générale des quotes-parts et soulignons qu’il est urgent de s’entendre sur des mesures, dont les nouveaux accords d’emprunt, qui maintiennent le niveau actuel des ressources du FMI. Nous estimons toutefois que le recours continu à des ressources empruntées ne peut se substituer de façon permanente à une augmentation des quotes-parts. Nous déplorons l’absence de progrès en vue du réalignement des quotes-parts, dont l’objectif était de mieux rendre compte du poids grandissant des pays émergents et pays en développement dynamiques dans l’économie mondiale, et d’accroître la part de ces pays en tant que groupe, tout en protégeant la part des pays les plus pauvres. Tous ces éléments sont essentiels pour la légitimité et l’efficacité du FMI. Il faut impérativement atteindre les objectifs de la 15e révision générale des quotes-parts dans le contexte de la 16e révision. Nous plaidons en faveur de l’achèvement des réformes de 2010 relatives à la représentation au sein du conseil d’administration et demandons l’attribution d’un troisième siège à l’Afrique subsaharienne pour accroître la représentation et la participation de la région, sans que cela ne porte préjudice aux sièges d’autres pays émergents ou pays en développement.

5. Nous engageons le FMI à étudier différents moyens d’augmenter les liquidités mondiales, y compris le recours plus actif aux droits de tirages spéciaux (DTS) comme avoirs de réserve. Nous demandons au FMI de continuer à adapter ses mécanismes de prêt afin de répondre aux besoins variés des pays membres en envisageant un éventail plus large de dispositifs d’urgence, dont la possibilité d’un instrument d’échange de liquidités à court terme. Nous nous félicitons du relèvement des limites d’accès des pays à faible revenu au titre du fonds fiduciaire pour la réduction de la pauvreté et pour la croissance. Il est nécessaire d’opérer des ajustements en temps opportun pour remédier à l’érosion de ces limites en proportion du PIB et répondre aux besoins de financement extérieur. Nous saluons les récents efforts visant à mieux adapter la collaboration avec les pays fragiles ou touchés par un conflit et nous espérons d’autres avancées dans ce domaine. Une augmentation de l’enveloppe globale des ressources de ce fonds fiduciaire permettrait au FMI d’accorder une aide adéquate aux pays à faible revenu.

6. Nous demandons au FMI d’évaluer de manière impartiale et équilibrée, dans le cadre de sa surveillance, les dosages macroéconomiques de chaque pays, y compris en matière monétaire, budgétaire, macroprudentielle et structurelle. À cet égard, nous notons que le FMI s’efforce d’élaborer un cadre d’action intégré afin de mieux évaluer les effets et les interactions de ces diverses mesures et d’en tenir compte dans les conseils qu’il fournit, en particulier s’agissant de la gestion de la volatilité des flux de capitaux. Nous engageons le FMI à intégrer davantage les analyses macroéconomiques et financières à la surveillance bilatérale pour déterminer et corriger rapidement les facteurs de vulnérabilité macroéconomique.

7. Alors que les pays en développement ont contribué dans une bien moindre mesure que les pays développés aux changements climatiques, les phénomènes météorologiques exceptionnels qui en résultent touchent de manière disproportionnée les pays à faible revenu et les pays de petite taille. Il est indispensable, pour réagir aux effets néfastes des changements climatiques, que la communauté internationale s’engage dans une transition sans précédent vers un monde sobre en carbone, en respectant le principe de responsabilité commune mais différenciée. Nous demandons à tous les pays de mettre en œuvre leurs contributions déterminées au niveau national dans le cadre de l’Accord de Paris de 2015. Il est essentiel que les pays développés respectent leur engagement de débloquer chaque année 100 milliards de dollars supplémentaires d’ici 2020 et qu’ils augmentent encore leurs contributions par la suite pour aider les pays en développement à s’adapter aux changements climatiques. Nous appelons le FMI, le Groupe de la Banque mondiale et les autres banques multilatérales de développement à accroître leur appui au travail d’atténuation et d’adaptation mené par les pays en développement. Pour mettre en œuvre nos contributions déterminées au niveau national, nous reconnaissons qu’un soutien renforcé s’impose au moyen de financements, de transferts de technologies et d’activités de développement des capacités répondant aux besoins.

8. Malgré les éléments démontrant les avantages économiques et sociaux associés aux migrations, celles-ci continuent de poser des difficultés car les écarts de revenu, les mutations démographiques, les changements climatiques et les circonstances géopolitiques entraîneront probablement des flux migratoires plus importants au cours des années à venir. Il est nécessaire de coopérer pour relever le défi des migrations et régler les crises actuelles liées à l’afflux de réfugiés, qui touchent de manière disproportionnée certains pays en développement. Nous prions instamment le FMI et le Groupe de la Banque mondiale d’intensifier leur travail d’analyse afin de mieux comprendre les incidences dans les pays de départ et d’accueil — sur le plan macroéconomique et sur celui du développement — des flux de migrants et de réfugiés, et de fournir des conseils sur la conception de stratégies de coopération et de politiques nationales.

Obtenir des financements pour la croissance et le développement

9. Notre priorité absolue est de transformer nos économies pour relever le niveau de vie de tous, réduire les inégalités et contribuer à la réalisation des objectifs de développement durable (ODD). Dans de nombreux pays en développement, le déficit d’emplois et les écarts de revenu se creusent, engendrant des risques sociaux et politiques importants. Il incombe à chaque pays d’instaurer des mesures destinées à accroître la productivité et les investissements de qualité et à créer de nouvelles possibilités économiques. Nous soulignons qu’il importe que les stratégies de développement s’appuient sur des institutions solides et une bonne gouvernance afin d’assurer l’accès à des emplois de qualité, de stimuler l’entrepreneuriat et de favoriser la viabilité des finances publiques. Nous demandons au Groupe de la Banque mondiale, dans le cadre de sa collaboration avec d’autres banques multilatérales de développement, d’intensifier et de renforcer l’efficacité de son appui aux stratégies nationales menées et définies par les pays en vue de créer des emplois et de transformer leur économie. Nous demandons également à ces institutions de soutenir plus résolument les solutions régionales telles que l’accord sur la zone de libre-échange continentale africaine qui a été ratifié dernièrement.

10. Il est indispensable d’accroître les recettes intérieures pour réaliser les ODD dans les temps. Pourtant, dans de nombreux pays à faible revenu, dont des pays fragiles ou touchés par un conflit, les ressources intérieures ne suffiront pas à financer le surcroît de dépenses à engager pour atteindre les ODD. Il est donc crucial que les pays avancés tiennent leur engagement d’augmenter le montant des ressources concessionnelles, qui sont en baisse depuis 2013 pour les pays les moins développés. Nous préconisons une solide reconstitution des ressources de l’IDA (IDA-19) pour favoriser une transformation économique qui créera des emplois dans les pays à faible revenu.

11. Il est essentiel de coopérer à l’échelle internationale dans le domaine fiscal pour définir des règles qui sont équitables pour tous et évitent des pratiques et une concurrence fiscales aux effets délétères. Le point de vue des pays en développement et des analyses approfondies de l’impact des propositions de réforme fiscale sur leurs recettes doivent être les axes majeurs de la réforme de ces règles. Nous appuyons les efforts déployés sans relâche par le Groupe de travail du G-24 pour promouvoir le dialogue entre pairs et la coopération Sud-Sud sur les enjeux fiscaux et renforcer notre action internationale de sensibilisation là où elle est nécessaire. En traitant les problèmes liés à la fiscalité de l’économie numérique au sein du cadre inclusif de l’OCDE sur l’érosion de la base d’imposition et le transfert de bénéfices, nous espérons parvenir à une solution multilatérale qui profite équitablement aux pays en développement. Il doit être reconnu qu’avec la transformation numérique, des entreprises peuvent avoir une forte présence économique dans nos pays même sans y être présentes physiquement. L’objectif doit consister à établir des règles justes et simples qui allouent les bénéfices en prenant en compte la contribution des marchés et des consommateurs à la constitution de ces bénéfices et soient applicables concrètement dans les pays en développement. L’accent doit être mis sur la prévention des litiges dès la phase d’élaboration de ce mécanisme.

12. L’amélioration de la gouvernance, la lutte contre la corruption et la promotion de la transparence sont essentielles pour stimuler la productivité et la croissance. Nous saluons les travaux du FMI et du Groupe de la Banque mondiale sur la surveillance des flux financiers illicites et nous les engageons à intensifier leur coopération avec les pays d’origine et de destination, ainsi qu’à redoubler d’efforts en vue de concevoir des solutions multilatérales au problème de ces flux sous leurs diverses formes. Nous restons déterminés à renforcer le dispositif de lutte contre le blanchiment des capitaux et le financement du terrorisme afin de préserver l’intégrité de la structure financière mondiale. Nous appelons de nos vœux une coopération internationale en vue de mettre en place une plate-forme internationale, sur le modèle de l’initiative pour le recouvrement des avoirs volés, qui aurait pour but de recouvrer et de restituer les avoirs volés, ainsi que de rapatrier les malfaiteurs fugitifs. Nous appelons aussi le FMI et le Groupe de la Banque mondiale à continuer d’aider les pays à remédier à la réduction des relations de correspondants bancaires et à ses conséquences négatives.

13. Nous réitérons notre engagement à nous attaquer aux facteurs de vulnérabilité liés à la dette et à trouver le juste équilibre entre les objectifs d’endettement et ceux de croissance. Nous saluons l’approche pluridimensionnelle élaborée conjointement par le FMI et le Groupe de la Banque mondiale pour améliorer la transparence et l’information concernant la dette, et nous attendons avec intérêt l’adoption d’une politique concrète de financement du développement durable et d’une politique de plafonds d’endettement. Nous appelons à appuyer davantage la gestion des finances publiques et de la dette, ainsi que le développement des marchés de capitaux nationaux. Nous demandons instamment au FMI et au Groupe de la Banque mondiale de travailler avec les parties prenantes pour promouvoir des pratiques tenables et transparentes en matière d’emprunt et de prêt, y compris, le cas échéant, la restructuration en temps utile des dettes souveraines en tenant compte des marchés. Nous soulignons la responsabilité conjointe des pays débiteurs et créditeurs dans la promotion de la viabilité de la dette.

14. Depuis quelques années, les pays en développement sollicitent davantage le FMI et le Groupe de la Banque mondiale pour le développement de leurs capacités. Les centres régionaux du FMI pour le développement des capacités ont permis de développer considérablement l’apprentissage entre pairs et de répondre avec réactivité aux demandes des pays. Il est donc important de garantir la viabilité financière de ces centres. Nous encourageons le Groupe de la Banque mondiale à évaluer l’efficacité avec laquelle ses instruments de développement des capacités aident les pays en développement à surmonter les problèmes d’exécution.

15. Nous appelons à mettre en œuvre sans délai le programme d’augmentation et de réforme du capital du Groupe de la Banque mondiale, pour que celui-ci coopère de manière efficace avec tous ses pays clients et montre la voie dans l’application du programme relatif aux biens publics mondiaux. La prochaine revue de l’actionnariat du Groupe, qui aura lieu en 2020, doit atteindre les objectifs des principes d’actionnariat qui ont été convenus.

16. Nous réaffirmons l’importance de la diversité et de l’équilibre entre femmes et hommes au sein du personnel à tous les niveaux du FMI et du Groupe de la Banque mondiale, y compris la diversité des établissements d’enseignement et des formations. Nous demandons au FMI et au Groupe de la Banque mondiale qu’ils agissent résolument pour mettre fin à la sous-représentation criante de certains pays en développement et de certaines régions dans les recrutements et les progressions de carrière, y compris aux postes d’encadrement. Les initiatives de modernisation du FMI doivent veiller à ce que celui-ci continue d’attirer et de retenir un personnel divers et hautement qualifié.

17. Nous adressons nos félicitations à Mme Kristalina Georgieva à l’occasion de sa désignation au poste de directrice générale du FMI. Nous tenons également à remercier Mme Christine Lagarde pour son mandat remarquable à la tête du FMI.


LISTE DES PARTICIPANTS [1]

Les ministres du Groupe intergouvernemental des Vingt-Quatre pour les questions monétaires internationales et le développement ont tenu leur cent deuxième réunion à Washington le 17 octobre 2019, sous la présidence de M. Julio Velarde, gouverneur de la Banque centrale du Pérou, assisté de M. Kenneth Ofori Atta, ministre des finances du Ghana, premier vice-président, et de M. Jafar Mojarrad, administrateur pour l’Iran au Fonds monétaire international, second vice-président.

La réunion des ministres a été précédée le 16 octobre 2019 de la cent-quatorzième réunion des suppléants du Groupe des Vingt-Quatre, sous la présidence de M. Armando Morales, conseiller principal de l’administrateur du FMI pour le Pérou.

Groupe africain: Mohamed Loukal, Algérie; Deogratias Mutombo Mwana Nyembo, République démocratique du Congo; Chalouho Coulibaly, Côte d’Ivoire; Sahar Nasr, Égypte; Ahmed Shide, Éthiopie; Roger Owono Mba, Gabon; Maxwell Opoku-Afari, Ghana; Patrick Njoroge, Kenya; Mohamed Taamouti, Maroc; Zainab Ahmed, Nigeria; Mfundo Hlatshwayo, Afrique du Sud.

Groupe asiatique: Aparna Subramani, Inde; Reza Nadali, République islamique d’Iran; Alain Bifani, Liban; Reza Baqir, Pakistan; Carlos G. Dominguez, Philippines; Samaratunga R.H.S., Sri Lanka; Lev Palei, Syrie.

Groupe latino-américain: Laura Jaitman, Argentine; Erivaldo Gomes, Brésil; Jose Antonio Ocampo, Colombie; Verónica Artola Jarrín, Équateur; Sergio Recinos, Guatemala; Marc‑Kenley Mogene, Haïti; Alfonso Guerra, Mexique; Renzo Rossini, Pérou; Alvin Hilaire, Trinité-et-Tobago.

Observateurs: Vera Daves de Sousa, Angola; Abdulrahman Al Hamidy, Fonds monétaire arabe; Wensong Guo, Chine; Riyad Mansour, G‑77; Dalyono Dalyono, Indonésie; Deborah Greenfield, OIT; Mohamed Jouini, Banque islamique de développement; Fuad Albassam, OFID; Joerg Spitzy, OPEC; Yousef Al Bassam, Arabie saoudite; Ahmed Al Qamzi, Émirats arabes unis; Mukhisa Kituyi, CNUCED; Navid Hanif, UNDESA; Ines Bustillo, CEPALC.

Invités: Kristalina Georgieva, directrice générale du Fonds monétaire international

David Malpass, président de la Banque mondiale

Secrétariat du G-24: Marilou Uy, Aldo Caliari, Angela Hanna, Lana Bleik, Deborah Ofori

Secrétariat du FMI pour le G-24: Daniela Alcantara, Aric Maiden



[1] Personnes assises à la table de discussion.

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