L’investissement des entreprises est en berne. Pas de mystère, c’est l’économie !

Auteurs : Aqib Aslam, Daniel Leigh et Seok Gil Park

Le 7 avril 2015

Le débat sur les raisons pour lesquelles les entreprises n’investissent pas davantage dans des machines, de l’outillage et des usines est loin d’être clos. Dans les pays avancés, l’investissement des entreprises –– principale composante de l’investissement privé –– a reculé beaucoup plus depuis la crise financière mondiale qu’après les récessions passées. Qui plus est, des signes inquiétants indiquent que ce recul sape la croissance économique à long terme.

Il est fondamental de poser un bon diagnostic avant d’élaborer des politiques qui encourageront les entreprises à investir davantage. Si la faiblesse de l’investissement n’était qu’un symptôme de la morosité du climat économique, les entreprises réagissant à l’essoufflement des ventes, les appels à un développement de l’activité économique globale pourraient se justifier. En revanche, si ce sont des obstacles particuliers qui en sont principalement responsables, par exemple, selon certains, l’incertitude entourant les politiques économiques ou les lacunes du secteur financier, il faut alors commencer par lever ces obstacles pour faire repartir l’investissement.

L’activité économique atone : un facteur fondamental

Notre analyse, au Chapitre 4 de l’édition d’avril 2015 des Perspectives de l’économie mondiale, tend à montrer que l’activité économique atone est le premier facteur qui freine l’investissement des entreprises. Alors que cette atonie a été plus marquée après cette crise qu’après les récessions antérieures, la contraction de la production a été elle aussi beaucoup plus prononcée. L’évolution conjointe de l’investissement des entreprises et de la production n’a donc rien de surprenant (graphique 1).

À l’aide d’une approche statistique novatrice, qui s’intéresse à la causalité inverse entre l’investissement et la production, nous pouvons confirmer que l’investissement des entreprises s’est peu éloigné de ce que l’on pouvait attendre compte tenu de la faiblesse de l’activité économique (graphique 2). Autrement dit, les entreprises ont réagi à l’essoufflement de leurs ventes — tant actuelles que prévues — en coupant dans leurs dépenses d’équipement. De fait, lorsque l’on demande aux responsables des entreprises quelle est la principale difficulté à laquelle ils font face, ils répondent généralement que c’est essentiellement l’absence de demande de la part de leurs clients.

Au-delà de ce schéma général, on observe quelques poches dans lesquelles la faiblesse de l’investissement demeure intrigante, en particulier dans les pays de la zone euro qui ont vu s’envoler le coût des emprunts durant la crise de la dette souveraine de 2010-2011. Dans ces pays, l’effet des contraintes financières et de l’incertitude entourant les politiques économiques s’est ajouté à celui de la faiblesse de la production, et a lui aussi freiné l’investissement des entreprises.

Relancer l’investissement privé

Nous concluons qu’une action gouvernementale d’envergure visant à stimuler la production est nécessaire pour augmenter durablement l’investissement privé. Des politiques budgétaires et monétaires peuvent inciter les entreprises à investir, même si elles ont peu de chances de ramener l’investissement au niveau exact qu’il avait avant la crise. De nouveaux investissements puics dans les infrastructures pourraient aussi doper la demande à court terme et accroître l’offre à moyen terme, et ainsi attirer l’investissement privé dans les pays où les conditions sont favorables. Enfin, des réformes structurelles, visant notamment à relever le taux d’activité de la population, pourraient également améliorer les perspectives de production et encourager ainsi l’investissement privé.

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Aqib Aslam
est économiste à la Division études économiques internationales au Département des études du Fonds monétaire international, après avoir travaillé au Département Europe et au Département des finances publiques. Avant de rejoindre le FMI en 2010, il a travaillé à Goldman Sachs International, à la Banque d’Angleterre et au Service économique du gouvernement britannique. Il a préparé un doctorat à l’Université de Cambridge. Il s’intéresse à la macroéconomie appliquée et à l’économétrie.


Daniel Leigh
est Chef de division adjoint au Département des études du Fonds monétaire international. Il s’intéresse à la macroéconomie internationale, et plus particulièrement à la politique budgétaire et monétaire. Il est titulaire d’un doctorat en économie de Johns Hopkins University et d’un master en économie de la London School of Economics.



Seok Gil Park
est économiste au Département des études du Fonds monétaire international, après avoir travaillé au Département des finances publiques et au Département Afrique. Avant de rejoindre le FMI, il a travaillé à la Banque centrale de Corée. Il est titulaire d’un doctorat en économie d’Indiana University, et s’intéresse aux activités des banques centrales, notamment aux liens entre la politique monétaire et la politique budgétaire.



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