Le Conseil d’administration du FMI conclut les consultations de 2024 au titre de l’article IV avec Haïti

le 10 décembre 2024

Washington. Le conseil d’administration du Fonds monétaire international (FMI) a achevé les consultations au titre de l’article IV[1] avec Haïti.

Haïti est confronté à une crise multidimensionnelle sans précédent, englobant des enjeux humanitaires, économiques, sociaux et sécuritaires. L’assiette fiscale du pays est faible, tandis que le secteur informel, important, dépend fortement de transferts de fonds volatiles. Depuis la dernière consultation au titre de l’article IV (2019), Haïti a subi une série de chocs : la pandémie, un séisme dévastateur en 2021, des épidémies de choléra, ainsi que les répercussions économiques de la guerre en Ukraine, qui ont conduit à une crise alimentaire puis à une famine. De plus, la forte dégradation des conditions de sécurité ces dernières années a amplifié ces problèmes, entrainant une augmentation importante du nombre de personnes déplacées à l’intérieur du pays ainsi qu’à l’extérieur d’Haïti, le tout contribuant à une chute significative de la croissance potentielle.

Les perspectives macroéconomiques d’Haïti sont peu favorables, et entourées d’une grande incertitude. Le choc du côté de l’offre, à moins d’une amélioration des perspectives sécuritaires, devrait continuer à peser fortement sur la croissance et alimenter l’inflation. Les recettes budgétaires seront essentielles pour reconstruire les infrastructures de base après des années de troubles sociaux et pour répondre aux forts besoins de développement, mais elles ne se relèvent que lentement. Les transferts de fonds devraient continuer à financer la consommation, mais cette situation reflète principalement un exode du capital humain, ce qui risque d’entraver encore davantage une reprise durable. Selon les projections, la croissance pour 2025 sera à peine positive et ne se stabilisera qu’à 1,5% à moyen terme dans l’attente d’améliorations futures sur le plan de la sécurité.

Évaluation du conseil d’administration[2]

Les administrateurs souscrivent à l’orientation générale de l’évaluation effectuée par les services du FMI. Ils reconnaissent la gravité de la crise multidimensionnelle à laquelle le pays est confronté du fait des chocs sécuritaire, économique et humanitaire liés à la transition politique en cours. Cette crise a eu de fortes répercussions sur les conditions de vie de la population haïtienne déjà précaires. Les perspectives restent incertaines : la sécurité continue de se détériorer et la croissance devrait rester faible. Les administrateurs constatent également que malgré les obstacles, les autorités sont parvenues ces dernières années à mettre en œuvre des réformes visant à renforcer la résilience économique et à restaurer la stabilité macroéconomique.

Ils notent la nécessité de normaliser la situation sécuritaire pour améliorer les perspectives économiques, et soulignent le rôle essentiel de l’appui de la communauté internationale à cet égard, ainsi que pour soutenir les efforts de réforme et aider à reconstruire les infrastructures essentielles. Ils appellent également les autorités à poursuivre leur collaboration priorisée avec le Fonds, notamment en ce qui concerne le développement des capacités, guidé par la Stratégie en faveur des pays fragiles ou touchés par un conflit. Par ailleurs, ils se félicitent de l'intérêt exprimé par les autorités pour un nouveau programme de référence, qui contribuerait utilement à l’ancrage des politiques publiques.

Ils saluent l’adoption à temps du budget et les efforts déployés pour accroître les recettes budgétaires. Ils soulignent qu'il sera essentiel de poursuivre la mise en œuvre du programme de mobilisation des recettes pour répondre aux immenses besoins de développement d’Haïti, notamment par l’application du nouveau code des impôts, qui permettra d’élargir l'assiette fiscale. Ils invitent les autorités à renforcer les mesures déjà prises pour améliorer la qualité, l’efficience et la transparence des dépenses publiques, et ils les appellent à poursuivre l’examen attentif et le prompt audit des ressources fournies dans le cadre du Guichet « chocs alimentaires » du FMI. Ils soulignent également la nécessité de poursuivre les efforts de préservation de la viabilité de la dette, notamment en évitant les prêts non concessionnels. Il sera par ailleurs essentiel de renforcer les filets de sécurité afin de protéger les personnes les plus vulnérables, d’atténuer les conséquences de la pauvreté et de poursuivre les efforts en faveur de la promotion de l’égalité des genres.

Les administrateurs saluent l’engagement des autorités à garder à zéro le financement monétaire du déficit budgétaire, et ils les appellent à poursuivre leurs efforts de protection de la stabilité des prix et de renforcement du cadre de politique monétaire. Ils les exhortent à achever et publier l’audit 2023 de la banque centrale afin de démontrer leur engagement en faveur de la transparence et de limiter les interventions sur les marchés des changes au lissage de la volatilité excessive du taux de change. Ils prennent note des vulnérabilités croissantes du secteur bancaire, qui proviennent en particulier des prêts non productifs, et ils appellent les autorités à resserrer leur surveillance et à continuer à améliorer les cadres de réglementation et de supervision. Il sera important aussi de continuer à renforcer le dispositif de lutte contre le blanchiment de capitaux et le financement du terrorisme.

Les administrateurs tiennent à souligner qu’il sera essentiel, pour stimuler la croissance potentielle, de progresser dans la mise en œuvre du programme de réformes structurelles et des mesures de gouvernance. Ils saluent les efforts déployés par les autorités pour renforcer les cadres de gouvernance et de lutte contre la corruption et pour stimuler la transition numérique. Ils les encouragent à publier l’évaluation diagnostique de la gouvernance et le plan d’action connexe dès qu'ils seront achevés. Ils ajoutent qu’il sera essentiel de bâtir une résilience aux catastrophes naturelles et de favoriser l’inclusion financière. Enfin, ils encouragent vivement les autorités à améliorer la qualité des données aux fins de la surveillance, tout en continuant d’accorder la priorité à la qualité et à l’actualité des données relatives aux actifs monétaires et aux actifs de réserve.

 

Haïti : Indicateurs Économiques et Financiers, EF2021– 27

(Exercice financier se terminant le 30 Septembre)

 

EF2021

EF2022

EF2023

EF2024

EF2025

EF2026

EF2027

 

 

 

 

 

Proj.

Proj.

Proj.

Proj.

 

 

(Variation par rapport à l'année précédente ; sauf indication contraire)

Revenu National et Prix

 

 

 

 

 

 

 

 

PIB à prix constants

-1.8

-1.7

-1.9

-4

1

1.5

1.5

 

Déflateur du PIB

19.3

29.8

31.5

29.1

23.2

17.6

10.4

 

Prix à la consommation (moyenne de la période)

15.9

27.6

44.1

25.9

19.8

15.4

10.6

 

Prix à la consommation (fin de période)

13.1

38.7

31.8

27.9

18.7

12.2

9.3

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

Secteur Extérieur

 

 

 

 

 

 

 

 

Exportations (biens, évalués en dollars américains, f.à.b.)

27.7

13.5

-25.5

-20

10

14.4

13.6

 

Importations (marchandises, évaluées en dollars américains, f.à.b.)

19.8

7.8

-1

-9

11

6

5.5

 

Transferts (évalués en dollars américains)

22.5

-7.3

0.1

11

5

5

5.5

 

Taux de change effectif réel (fdp ; + appréciation) 1/

-5

13.8

10.9

33

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

Monnaie et Crédit (évalué en gourdes)

 

 

 

 

 

 

 

 

Crédit au secteur privé

15.2

17.4

-6.2

-5.3

21.1

14.7

12

 

Base monétaire

21.5

23.1

3.1

10

13.5

11.5

10

 

Monnaie au sens large

38.2

21.1

4.6

4.1

15.5

11.5

11

 

 

(En pourcentage du PIB ; sauf indication contraire)

Gouvernement Central

             

 

Solde global (dons inclus)

-2.3

-1.8

0.9

7.2

-0.1

-1.4

-1.5

 

Recettes intérieures

5.9

5.3

6.4

4.9

5

5.3

5.7

 

Dons

1

1.3

0.9

6.8

1.2

0.7

0.3

 

Dépenses

9.3

8.3

6.4

4.5

6.2

7.4

7.4

 

Dépenses courantes

7.4

6.8

4.9

3.4

4.2

4.2

4.3

 

Dépenses en capital

1.9

1.6

1.5

1.1

2.1

3.2

3.1

 

Solde global du secteur public non financier 2/

-2.2

-1.7

0

6.6

-0.1

-1.4

-1.5

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

Épargne et Investissement

 

 

 

 

 

 

 

 

Investissement brut

18

15.9

13.9

6.1

7.8

10.7

14.2

 

Dont : investissement public

1.9

1.6

1.5

1.1

2.1

3.2

3.1

 

Épargne nationale brute

18.5

13.5

10.4

5.5

7.2

9.8

13

 

Solde du compte courant extérieur (dons inclus)

0.4

-2.3

-3.5

-0.5

-0.6

-0.9

-1.2

 

Exportations nettes de carburant

-3.1

-4.5

-3.6

-2.4

-2.3

-2.3

-2.3

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

Dette Publique

 

 

 

 

 

 

 

 

Dette publique extérieure (moyen et long terme, fdp)

12.9

12.3

12.9

1.5

1.4

2.7

4.1

 

Dette totale du secteur public (fin de période)

28.9

29.5

28.5

13.9

11.4

10.9

11.4

 

Service de la dette publique extérieure 3/

9.4

8.1

11.8

13.5

3.3

4.7

4.6

 

 

             

 

Pour Mémoire

(En millions de dollars, sauf indication contraire)

 

 

 

 

 

 

 

 

 

Réserves internationales nettes 4/

456

119

391

960

1,159

1,341

1,501

 

Réserves internationales brutes

2,534

2,067

2,346

2,496

2,621

2,771

2,921

 

En mois d'importations de l'année suivante

5.6

4.7

5.3

5.6

5.6

5.6

5.6

 

PIB nominal (millions de gourdes)

1,699,208

2,168,223

2,798,324

3,468,166

4,315,508

5,151,163

5,772,370

 

Sources : Ministère de l'Économie et des Finances ; Banque de la République d'Haïti ; Banque Mondiale ; estimations et projections des services du FMI.

1/ Le taux de change effectif réel pour l’exercice 2024 reflète les données d’Août 2024.

2/ Y compris les transferts à la société publique d'électricité (EDH) et les obligations de paiement non réglées.

3/ En pourcentage des exportations de biens et services non-facteurs.  Comprend l’allègement de la dette.

4/ Exclut les dépôts en devises des banques, le compte séquestre du Venezuela, les engagements du FMI (sauf Food Shock Window) et les swaps.

 

 

[1] Conformément aux dispositions de l’article IV de ses Statuts, le FMI procède, habituellement chaque année, à des consultations bilatérales avec ses pays membres. Une mission des services du FMI se rend dans le pays, recueille des données économiques et financières, et s’entretient avec les responsables nationaux de l’évolution et des politiques économiques du pays. De retour au siège, les membres de la mission rédigent un rapport qui sert de cadre aux délibérations du conseil d’administration.

[2] À l’issue des délibérations, la Directrice générale, en qualité de Présidente du conseil d’administration, résume les vues des administrateurs, et ce résumé est communiqué aux autorités du pays. Les qualificatifs utilisés dans le résumé sont expliqués ici : https://www.imf.org/external/french/np/sec/misc/qualifiersf.htm.

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