Liban : Conclusions de la mission de consultation de 2019 au titre de l’article IV
le 10 juillet 2019
Les autorités ont consenti à la publication des présentes conclusions. Les opinions exprimées dans ces conclusions sont celles des services du FMI et ne sont pas nécessairement celles du Conseil d'administration. Sur la base des observations préliminaires de cette mission, les services du FMI établiront un rapport qui, sous réserve de l'approbation de la direction, sera soumis à l'examen et à la décision du Conseil d'administration du FMI.
Le nouveau gouvernement a l’opportunité de mettre en œuvre des réformes fondamentales pour rééquilibrer l'économie du Liban. Sa position de départ est difficile, avec notamment un double déficit important, une dette publique élevée et une faible croissance. Il a déjà adopté un projet crucial de réforme du secteur de l'électricité et travaille maintenant sur un budget qui réduira le déficit budgétaire. Ces premières initiatives très louables s'inscrivent dans une longue trajectoire vers la viabilité et la croissance qui devra passer par d’importants ajustements budgétaires supplémentaires et des réformes structurelles radicales afin d'améliorer la gouvernance et le climat des affaires au Liban.
La présente déclaration souligne les principales observations et recommandations de la mission qui s’est rendue au Liban du 19 juin au 2 juillet 2019 pour mener les consultations au titre de l'article IV, sur la base d’entretiens avec de nombreuses parties prenantes. Une analyse plus complète figurera dans le prochain rapport des services du FMI. La mission remercie les autorités libanaises et les autres contreparties de leur hospitalité et de leurs entretiens détaillés et constructifs.
Principaux messages
Pour renforcer l'économie libanaise, les autorités doivent agir dans trois domaines :
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Un plan budgétaire à moyen terme crédible visant à dégager un excédent primaire élevé et durable qui permettrait de réduire de façon continue le ratio dette publique/PIB.
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Des réformes structurelles fondamentales pour stimuler la croissance et la compétitivité extérieure, en commençant par une amélioration de la gouvernance et la mise en œuvre du plan de réforme du secteur de l'électricité et des recommandations formulées dans la Vision économique du Liban.
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Des mesures destinées à accroître la résilience du secteur financier en renforçant le bilan de la Banque du Liban et en continuant à augmenter les volants de fonds propres des banques.
I. Contexte
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Il s’agit d’un moment important pour le Liban. Le pays a longtemps souffert de déficits budgétaires élevés qui ont fait grimper la dette publique à plus de 150 % du PIB. Le déficit des transactions courantes dépasse les 25 % du PIB et la croissance reste faible depuis le début de la crise syrienne. La Banque du Liban (BdL) a habilement maintenu la stabilité financière dans des circonstances difficiles pendant plusieurs années, mais les difficultés auxquelles elle est confrontée à cet égard ont augmenté. Il est indispensable que le Liban entame un considérable processus d'ajustement budgétaire et de réformes structurelles pour contenir la dette publique et relancer la croissance. Cet ajustement et ces réformes sont le seul moyen de sortir le Liban de sa situation actuelle.
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Le gouvernement a maintenant l’opportunité de mettre en œuvre des réformes et d'inverser la tendance. Il a approuvé un nouveau plan, maintenant entériné par le parlement, pour réformer le secteur de l'électricité et diminuer l'incidence de son coût sur le budget. Il a également soumis au parlement un projet de budget visant à réduire le déficit budgétaire global en 2019. La réforme du secteur de l'électricité et le budget sont les premières étapes d'un long processus de rééquilibrage de l'économie, qui nécessitera des ajustements budgétaires supplémentaires et des réformes structurelles radicales.
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Les réformes encourageraient les bailleurs de fonds à débourser les 11 milliards de dollars de financements concessionnels promis que les autorités ont obtenus pour leur Programme d’investissement en infrastructures (Capital Investment Plan, CIP) à la conférence CEDRE en avril 2018. Le CIP vise à améliorer l'infrastructure du Liban tout en offrant des possibilités d'emploi aux communautés d'accueil et aux réfugiés syriens. L'augmentation correspondante de la croissance à court terme peut compenser le ralentissement résultant de l'ajustement budgétaire prévu, surtout si les autorités améliorent le cadre de gestion des investissements publics au début du CIP.
II. Un Environnement économique difficile
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L'activité économique a encore ralenti en 2018 . Une confiance faible, un niveau élevé d’incertitude, une politique monétaire restrictive et une forte correction dans le secteur immobilier ont réduit la croissance à 0,3 % l'année dernière, selon les estimations des services du FMI. L'inflation moyenne a dépassé 6 % en 2018, en partie à cause du prix élevé des carburants importés, mais elle a diminué au second semestre de l'année et en 2019.
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Le déficit budgétaire s'est élevé à 11 % en 2018, contre 8,6 % en 2017. Le solde primaire est tombé à -1,4 % du PIB à cause d'une augmentation plus coûteuse que prévue de la grille salariale à la fin de 2017 et de nouvelles embauches. Les recettes fiscales furent également inférieures aux prévisions. Étant donné le niveau élevé de la dette publique (151 % du PIB en 2018), les paiements d'intérêts dépassent maintenant les 9 % du PIB.
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Le déséquilibre des comptes extérieurs s’est encore aggravé. Le déficit des transactions courantes a dépassé les 25 % du PIB en 2018, sous l'influence combinée d'une faible croissance des exportations, de l'augmentation des importations de carburants et de la diminution des envois de fonds nets. Le taux de change effectif réel a continué d'augmenter et reste fortement surévalué, selon les estimations des services du FMI.
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L'apport de dépôts bancaires s'est pratiquement tari et les réserves de change de la Banque du Liban ont diminué . La croissance des dépôts bancaires en 2018 a été la plus faible depuis 2005 et les réserves de la BdL ont diminué d'environ 6 milliards de dollars depuis le début de l’année 2018 malgré la poursuite des opérations financières de la BdL, en partie à cause du paiement du principal et des coupons d'euro-obligations pendant la même période. Les prêts bancaires au secteur privé ont diminué, les prêts improductifs ont augmenté et la dollarisation des dépôts bancaires a atteint plus de 70 %.
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Étant donné ces difficultés, les agences de notation de crédit ont encore une fois abaissé la note du Liban cette année. L'évolution des résultats budgétaires, des dépôts et des rendements souverains a conduit Moody's à abaisser la note souveraine à Caa1, et Standard and Poor's et Fitch à faire passer la perspective du pays à « négative » (note B-).
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Les perspectives économiques dépendent de l'avancement des réformes et de l'évolution de la situation à l'extérieur du Liban. Une mise en œuvre déterminée de l'ajustement budgétaire en 2019-20 et des réformes structurelles prévues peuvent conduire à un regain de confiance, donner un répit à l'économie et encourager les bailleurs de fonds à débourser les financements concessionnels pour le CIP qui ont été promis à la conférence CEDRE. Cependant, certains risques et facteurs de vulnérabilité demeurent. L'incapacité du gouvernement à réaliser ses objectifs et à faire avancer les réformes ou la rupture du consensus politique et social pourrait miner la confiance. D'autre part, il existe des risques à la hausse qui, s'ils se concrétisent, pourraient aider le gouvernement dans son effort d'ajustement. Le règlement du conflit syrien et la normalisation des relations profiteraient au Liban en l'associant à la reconstruction de la Syrie. En outre, la découverte potentielle d'un gisement de gaz naturel dans les eaux territoriales du Liban, où l'exploration devrait commencer d'ici la fin de l'année, stimulerait la croissance et améliorerait le solde extérieur du pays.
III. Priorités
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Il est impératif de mettre en œuvre un processus de réforme robuste et cohérent pour préserver la confiance. Le rééquilibrage de l'économie dans le régime actuel d'un taux de change fixe exige la mise en œuvre déterminée d'un ajustement budgétaire considérable et crédible, ainsi que de réformes structurelles ambitieuses. Seule une nette amélioration du climat des affaires et de la gouvernance peut stimuler l'investissement, la croissance et les exportations.
A. Un rééquilibrage budgétaire rapide et soutenu
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Le budget de 2019 vise un ajustement considérable. Le budget soumis au parlement prévoit un déficit de 7,6 % du PIB, dans le but d'inverser les dérapages de l'année dernière et de retrouver la trajectoire prévue lors de la conférence CEDRE. Il s'appuie sur un grand nombre de mesures portant sur les recettes et les dépenses, parmi lesquelles les plus importantes ne sont que pour trois années, dont : i) l'augmentation de la taxe sur les revenus d'intérêts de 7 à 10 % ; ii) une taxe de 2 % sur les produits importés ; iii) un gel des embauches et des départs à la retraite anticipés dans le secteur public. Parmi les autres mesures figurent une taxe sur les plaques d'immatriculation des taxis et les plaques d'immatriculation à trois ou quatre chiffres, et une augmentation des frais de la Sûreté générale (permis de travail, visas, etc.).
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Selon les estimations préliminaires des services du FMI, les mesures prises dans le cadre du budget réduiront le déficit budgétaire en base caisse à 9,75 % du PIB environ . Bien que le budget n'ait pas encore été approuvé et que la composition de ce budget reste incertaine, sur la base des informations actuelles, le déficit prévu sera probablement largement supérieur à l'objectif fixé par les autorités. Il subsiste également des incertitudes quant à l'encours des mandats en suspens et à leur apurement, ce qui aura un effet sur le déficit en base caisse de 2019. La prévision de déficit bénéficie néanmoins d'économies temporaires sur les paiements d'intérêts en raison du retard dans l’émission d'euro-obligations.
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Conjuguées aux économies découlant des réformes du secteur de l'électricité, les mesures proposées dans le budget devraient réduire le déficit primaire en 2020-22, mais la dette continuera d'augmenter. L'effet annualisé des mesures pour lesquelles les services du FMI disposent d'informations détaillées est estimé à 2,3 % du PIB, ce qui contribuera à rendre le solde primaire légèrement positif en 2020. À moyen terme, les économies considérables qui sont attendues du plan de réforme du secteur de l'électricité, s’il est mis en œuvre comme prévu, remplaceront les pertes de recettes résultant de l'expiration des mesures temporaires du budget de 2019 et se traduiront par un léger déficit primaire. Cependant, en l'absence de mesures supplémentaires, le déficit primaire demeurera au-dessus du niveau permettant de stabiliser la dette, et le ratio dette publique/PIB, déjà insoutenable, continuera d'augmenter.
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Il est donc particulièrement important, pour la viabilité de la dette, qu'un nouveau plan budgétaire à moyen terme repose sur des mesures crédibles et permanentes qui dégageront un excédent primaire important à moyen terme. Les services du FMI prévoient qu'un excédent primaire d'environ 4,5 % du PIB serait nécessaire pour réduire sensiblement le ratio dette/PIB à moyen et long terme. La conception et l'adoption au plus tôt de mesures à l'appui d'un tel plan pourraient renforcer durablement la confiance. Selon les intentions actuelles des autorités, environ 0,5 % du PIB des mesures de 2019 portant sur les recettes sera permanent, et le plan actuel des autorités en matière d'électricité pourrait engendrer des économies supplémentaires de 2 points de pourcentage du PIB à moyen terme. Les autorités devront également définir et mettre en œuvre d'autres mesures budgétaires permanentes pour atteindre l'excédent primaire nécessaire.
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En matière de recettes, il conviendrait de relever la taxe sur la valeur ajoutée (TVA) et les droits d’accise sur les carburants, et d’accroître le civisme fiscal . L'augmentation temporaire de l'impôt sur le revenu d'intérêts prévue dans le budget de 2019 pourrait également devenir permanente. Pour continuer d'accroître les recettes de manière fiable et rapide, il faudra prendre des mesures fondées sur l'infrastructure actuelle de perception des impôts, notamment la TVA et les droits d’accise sur les carburants. L'élargissement de l'assiette de la TVA par la suppression des exonérations sur certains biens tels que les bateaux de plaisance immatriculés à l'étranger, le diesel utilisé pour la production d'électricité et les véhicules routiers, pourrait également augmenter sensiblement les recettes. Les autorités devraient aussi améliorer l'administration fiscale, ce qui pourrait engendrer d'importantes recettes supplémentaires, notamment de la part des contribuables actuellement en situation de fraude fiscale. Cependant, une meilleure perception de l'impôt passe par des mesures concrètes. Exiger des entreprises qu'elles n'utilisent que des états financiers certifiés par le Ministère des finances (dans le cadre du processus de déclaration au fisc) pour obtenir des prêts auprès des banques, est une solution envisageable. Une amélioration efficace de la perception des taxes existantes pourrait réduire la nécessité d'augmenter les taux d'imposition.
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L'élimination des subventions à l'électricité constitue l'économie potentielle la plus conséquente. Le plan du gouvernement pour le secteur de l'électricité vise à remplacer les combustibles actuels par le gaz naturel afin de réduire les coûts de production des centrales existantes, d'accroître la capacité de production d'EdL pour mieux répondre à la demande et, par la suite, d'augmenter les tarifs pour éliminer les subventions à l'électricité. Les autorités doivent veiller à ce que le plan prévoie une augmentation de tarifs suffisante pour combler le déficit d'EdL à moyen terme, sur la base d'hypothèses solides et réalistes concernant la réduction des pertes techniques et non techniques. Il est indispensable de commencer à augmenter les tarifs dès que possible afin d'engendrer des économies budgétaires, en visant potentiellement les plus gros consommateurs en premier lieu.
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Les autorités devraient également réaliser une revue des dépenses publiques pour repérer d'autres économies potentielles. Cette démarche peut s’appuyer sur les efforts qu'elles déploient actuellement pour étudier les possibilités de réforme de la masse salariale et des retraites. Les dépenses totales en investissement et en éducation sont faibles et pourraient devoir augmenter à moyen terme pour stimuler la croissance. Pourtant, les dépenses en salaires et avantages dans le secteur public, y compris dans le secteur de l’éducation, sont souvent inefficientes et présentent des possibilités d'économies.
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Le rééquilibrage budgétaire devrait être complété par une augmentation des aides aux foyers modestes et vulnérables. Le dispositif de protection sociale actuel du Liban est limité. Afin d'amortir l'impact de l'ajustement budgétaire nécessaire, les autorités devraient prévoir l'équivalent de 0,5 point de pourcentage supplémentaire du PIB dans les dépenses affectées au dispositif de protection sociale. La majeure partie de ces dépenses pourrait être transférée par le biais d’une version élargie du programme national de ciblage de la pauvreté (National Poverty Targeting Program, NPTP), déjà en vigueur.
B. Des réformes structurelles pour augmenter la croissance et les exportations
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Il est indispensable de mettre en œuvre des réformes structurelles fondamentales pour stimuler la croissance et améliorer la compétitivité extérieure . Le Liban a connu des années de croissance faible et de déficits des transactions courantes élevés, qui témoignent tous deux d'une forte érosion de la compétitivité extérieure et des effets négatifs de l'évolution régionale. Le coût des affaires au Liban doit diminuer pour que le pays puisse augmenter son potentiel de croissance. De la même manière, compte tenu du régime de taux de change fixe, de profondes réformes structurelles visant à accroître les exportations seront essentielles pour l’ajustement extérieur. Deux domaines à réformer en priorité sont la distribution d'électricité, pour laquelle les autorités ont déjà approuvé un plan, et l'amélioration de la gouvernance. En outre, la vision CEDRE du gouvernement contient des idées précises sur les réformes à mettre en œuvre. Toutes ces initiatives sont nécessaires pour éliminer les déséquilibres extérieurs, même si certains événements positifs interviennent à long terme, notamment le développement des champs gaziers et la résolution du conflit syrien.
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Les autorités devraient approuver et mettre en œuvre la législation des principales réformes stimulant la croissance, tel que défini dans leur vision CEDRE. Il faut notamment accélérer la mise en œuvre des lois de réforme déjà approuvées, telles que le code du commerce et la loi sur l'intermédiation judiciaire, ainsi que l'approbation d'une nouvelle loi douanière, d'un règlement sur la fermeture des entreprises, d'une loi sur les faillites, d'une loi sur les praticiens en insolvabilité et d'une loi sur les prêts garantis. Les autorités devraient également lever les obstacles réglementaires au développement des zones industrielles qui pourraient bénéficier d'une éventuelle reconstruction syrienne.
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En outre, les recommandations de l'assistance technique à l'Évaluation de la gestion des investissements publics devraient être mises en œuvre avant l'exécution de la majeure partie du CIP. Il est essentiel que les améliorations les plus importantes du cadre de gestion des investissements publics du pays soient en place avant l'exécution de la plupart des projets du CIP, afin de maximiser les effets positifs des investissements prévus sur la croissance. Les réformes principales comprennent l'intégration dans le budget des dépenses du Conseil pour le développement et la reconstruction (CDR) et l'adoption d'une loi sur les marchés publics.
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Il faut mettre en œuvre sans retard l'exécution du plan du secteur de l'électricité. Si EdL distribuait son énergie 24 heures sur 24, sept jours sur sept, cela éliminerait l'un des plus grands obstacles au climat des affaires dans le pays.
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Il faut prendre immédiatement des mesures concrètes pour réduire la corruption. Les autorités ont adopté des lois sur la transparence de l'information publique et la lutte contre la corruption, notamment la loi sur l'accès à l'information, la loi sur la protection des dénonciateurs, la loi portant création d'une commission nationale anticorruption et la loi sur la transparence du secteur pétrolier et gazier. Cette législation devrait être mise en œuvre rapidement et efficacement, notamment par la nomination d'une commission indépendante de lutte contre la corruption dotée de pouvoirs et de ressources suffisants, et complétée par l'adoption de la législation en instance sur l'enrichissement illicite et la déclaration des avoirs. Parmi les autres priorités figurent l'adoption d'une stratégie anticorruption et l'ouverture d'enquêtes et de poursuites pour obtenir un certain nombre de condamnations et de confiscations pour cause de corruption, proportionnellement aux risques. Ce dernier point sera également important pour la prochaine évaluation de la lutte contre le blanchiment des capitaux et le financement du terrorisme par le GAFI Moyen-Orient (voir ci-dessous).
C. Politique monétaire et stabilité financière
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La BdL a été la pierre angulaire de la stabilité financière et la protectrice du taux de change fixe , mais au prix de l'intensification des liens entre les banques et le secteur public et de l'alourdissement du bilan de la BdL. Au cours des dernières années, les opérations financières de la BdL ont produit des rendements marginaux élevés en livres libanaises sur les nouveaux dépôts bancaires en dollars américains à la BdL. Ces rendements ont stimulé les avoirs en dollars de la BdL sans affecter les taux des dépôts existants et de la dette publique. Ils ont également permis aux banques d'offrir des taux d'intérêt élevés à leurs propres déposants, pour attirer de nouveaux financements ou conserver les financements existants tout en préservant leur rentabilité. En conséquence, les titres d'État et les dépôts à la BdL représentent désormais 14 % et 55 % des actifs bancaires respectivement, soit une exposition totale de 68,5 % des actifs au secteur public (plus de huit fois les fonds propres de catégorie 1).
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La BdL a été forcée d'adopter une politique monétaire restrictive pour compenser une politique budgétaire laxiste qui a contribué à une diminution des prêts productifs à l'économie. Les opérations de la BdL ont permis aux banques d'offrir des taux de rémunération des dépôts élevés afin de conserver et d'attirer des fonds qui ont longtemps financé le double déficit du Liban. Cependant, elles ont également engendré des taux d'intérêt débiteurs élevés, le taux de référence du dollar passant de 6,8 % en novembre 2017 à 9,7 % en juin 2019. Ces taux ont à leur tour exacerbé la diminution des prêts au secteur privé et l'augmentation des prêts improductifs résultant d'un environnement économique difficile. Cette évolution souligne l'urgence d'un ajustement budgétaire qui permettra d'abaisser les taux d'intérêt.
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La BdL devrait abandonner progressivement ses opérations quasi budgétaires et renforcer son bilan. Elle devrait se retirer des achats d'obligations d'État et laisser le marché déterminer les rendements de la dette publique. L'achat de dette publique à un faible taux d'intérêt, tel qu’il a été proposé, endommagerait le bilan de la BdL et entacherait sa crédibilité. Il ne devrait pas y avoir, non plus, de pression sur les banques privées pour qu'elles achètent la dette à un faible taux d'intérêt. La BdL devrait progressivement cesser ses opérations financières dès que l'ajustement budgétaire et la baisse des rendements exigée par les investisseurs le lui permettront.
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Il faut continuer d'augmenter les volants de fonds propres des banques et renforcer l'assurance-dépôts. L'alignement complet sur Bâle III des pondérations de risque appliquées aux avoirs des banques en instruments de la BdL constitue un bon mécanisme pour relever les exigences effectives de fonds propres. Conformément aux conseils du Programme d'évaluation du secteur financier (PESF) de 2016, les autorités devraient également augmenter les niveaux de couverture de l'assurance-dépôts et préconiser la préférence des déposants assurés en vertu des règles de hiérarchie des créanciers applicables à la résolution et à la liquidation des banques en faillite.
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Il est nécessaire de continuer à bien mettre en œuvre les mesures de lutte contre le blanchiment des capitaux et le financement du terrorisme afin de réduire les risques intrinsèques à cet égard et d'obtenir une évaluation positive de la part du GAFI Moyen-Orient. Les autorités ont renforcé le cadre de lutte contre le blanchiment des capitaux et le financement du terrorisme. Pour préparer l'évaluation à venir, les autorités doivent également se concentrer sur l'efficacité de ce cadre, conformément à la méthodologie d'évaluation du GAFI révisée en 2012. L'incapacité à atténuer efficacement les risques relatifs au blanchiment des capitaux et au financement du terrorisme ou une évaluation négative pourraient affecter les investissements et l'accès continu des banques à leurs correspondants bancaires. À cette fin, les autorités sont encouragées à communiquer les résultats de leurs évaluations des risques aux entités concernées des secteurs privé et public. En outre, la bonne mise en œuvre du dispositif existant exige de continuer à prendre des mesures d'atténuation et d’apporter des améliorations, notamment en ce qui concerne i) le contrôle fondé sur le risque de la lutte contre le blanchiment des capitaux et le financement du terrorisme; ii) l'application de mesures préventives ; iii) l'application de mesures relatives à la transparence des entités juridiques ; iv) des sanctions financières ciblées ; v) l'accès aux informations financières pour les organismes d'application de la loi et les autorités judiciaires ; vi) un nombre accru de poursuites et de condamnations pour blanchiment d'argent, selon les risques auxquels le Liban est exposé. Nous soutenons le projet de la BdL de supprimer complètement les comptes numérotés (également appelés comptes secrets).
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Les autorités devraient examiner les moyens de parer aux difficultés financières des institutions d'importance systémique. La Commission de contrôle bancaire du Liban a fait des progrès dans la planification de la reprise. Elle devrait maintenant procéder à la détermination des fonctions critiques exécutées par les institutions d'importance systémique qui doivent être préservées, et élaborer des plans de résolution propres à chaque banque.
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