Le Conseil d’administration du FMI achève les consultations de 2016 au titre de l’article IV avec Djibouti

le 6 avril 2017

Le 22 février 2017, le Conseil d’administration du Fonds monétaire international (FMI) a achevé les consultations au titre de l’article IV [1] avec Djibouti.

Djibouti développe ses infrastructures de transports et de services publics pour tirer parti de son emplacement stratégique de plaque-tournante maritime et d’accueil de bases militaires. Petit État situé dans la corne aride de l’Afrique, voisin de l’ Éthiopie enclavée, Djibouti dépend essentiellement de son port en eaux profondes. La stratégie de développement des autorités, intitulée Vision Djibouti 2035, a pour but de transformer Djibouti en un pays à revenu intermédiaire et en un pôle logistique et commercial pour l’ensemble de l’Afrique de l’Est.

Pour atteindre leurs objectifs de développement, les autorités ont lancé un vaste programme d’investissements financé par l’emprunt extérieur, qui a fait passer la dette extérieure publique de 50 à 85 % du PIB en deux ans. Cette dette est pour l’essentiel constituée d’emprunts contractés par des entreprises publiques et garantis par l’État. Djibouti reste exposé à un risque élevé de surendettement, tous les indicateurs de viabilité de la dette dépassant leurs seuils pendant une période prolongée.

La croissance, estimée avoir atteint 6,5 % en 2016, a été portée par les importants projets du secteur public, en particulier la ligne ferroviaire vers l’Éthiopie, la construction de plusieurs nouveaux ports, et un aqueduc en provenance de l’Éthiopie. L’inflation a augmenté pour se situer à 3 % en moyenne en 2016, sous l’effet essentiellement de la hausse des prix des produits alimentaires et des services.

Malgré une croissance remarquable, la pauvreté et le chômage demeurent élevés et généralisés. Près de 41 % de la population vit dans la pauvreté, 23 % dans l’extrême pauvreté, et le taux de chômage atteint 39 %. Jusqu’à présent, les grands projets d’investissement ont eu un impact limité sur l’emploi, dans la mesure où ils font appel à une main-d’œuvre hautement qualifiée, souvent étrangère.

Le budget de l’administration centrale — qui selon la définition des autorités, n’inclut pas les deux grands projets d’investissement de l’aqueduc et de la ligne ferroviaire entrepris par des entreprises publiques — visait un léger déficit de 0,4 % du PIB en 2016. Si l’on inclut les deux projets, le déficit budgétaire global est estimé à 16 % du PIB, en baisse par rapport aux 22 % du PIB en 2015. Le déficit du solde des transactions courantes est resté important, à 29 % du PIB, et a été financé essentiellement par l’emprunt et l’investissement direct étranger. La couverture de la caisse d’émission est suffisante, avec un ratio réserves-monnaie de base estimé à 109 % en 2016, tandis que les réserves officielles internationales ont atteint l’équivalent de 3,4 mois d’importations.

La performance du secteur bancaire est restée faible et l’inclusion financière limitée malgré des mesures prises récemment. Le secteur financier se caractérise par un taux élevé de prêts improductifs, une forte concentration du crédit, et une faible rentabilité, et il demeure vulnérable aux chocs défavorables.

Évaluation du Conseil d’administration [2]

Les administrateurs notent que l’ambitieuse augmentation des investissements en infrastructures, principalement financée par l’endettement, contribue à rendre les perspectives globalement favorables pour Djibouti, mais qu’elle accentue les vulnérabilités sur le plan budgétaire et sur celui de la dette. Les administrateurs encouragent les autorités à avancer résolument dans la mise en œuvre des réformes cruciales destinées à transformer les investissements en une croissance forte, inclusive et génératrice d’emploi, et à replacer la dette sur une trajectoire viable. Les grandes priorités concernent le renforcement de la politique et de la gestion de la dette, la réforme fiscale et les réformes structurelles destinées à améliorer l’efficience et la gouvernance des entreprises publiques et à renforcer le climat des affaires.

Les administrateurs soulignent combien il est important d’élaborer une stratégie concertée afin d’établir la viabilité de la dette, compte tenu du risque élevé de surendettement que présente Djibouti. Ils encouragent les autorités à adopter une loi sur la dette publique et à fixer un ancrage explicite en matière d’endettement, comme par exemple le ratio dette/PIB, en définissant par ailleurs une trajectoire d’endettement pour assurer sa viabilité. Les administrateurs soulignent qu’il est nécessaire de modérer le rythme d’emprunt de l’État et d’éviter les prêts à des conditions non concessionnelles, y compris en ce qui concerne les entreprises publiques. Ils encouragent les autorités à réduire au minimum leur participation financière directe à des formules de PPP et à éviter les garanties explicites et les engagements budgétaires conditionnels implicites. Les administrateurs appellent de leurs vœux un renforcement de la capacité de gestion de la dette, de la coordination des institutions habilitées à contracter des emprunts, et de la capacité d’évaluation des risques budgétaires liés aux PPP, ainsi que le respect en temps opportun des obligations de service de la dette.

Les administrateurs invitent les autorités à approfondir les réformes fiscales pour mobiliser des recettes et réduire le large éventail d’exonérations et de régimes spéciaux. Ils les engagent à entreprendre une revue exhaustive des dépenses fiscales, des exonérations et des régimes spéciaux en vue de les réduire. Cela permettrait d’élargir l’assiette fiscale et d’accroître les recettes publiques tout en dégageant une marge de manœuvre pour assurer le service de la dette et financer les dépenses sociales prioritaires.

Les administrateurs engagent les autorités à accélérer la mise en œuvre des réformes structurelles pour accompagner une croissance généralisée, inclusive et impulsée par le secteur privé. Les réformes des entreprises publiques devraient viser leur plus grande efficience, le renforcement de leur gouvernance, l’amélioration de leur capacité à gérer des projets d’investissement et l’ouverture des monopoles publics à la concurrence. Les administrateurs appellent également de leurs vœux des réformes pour améliorer le climat des affaires, renforcer la concurrence, gérer la dimension distributive de la croissance et accompagner le développement du secteur privé. Les administrateurs encouragent également les investissements dans le capital humain et l’éducation.

Les administrateurs encouragent les autorités à continuer de centrer les politiques monétaire et financière sur la stabilité bancaire et extérieure ainsi que sur l’inclusion financière. Ils invitent la Banque centrale de Djibouti à renforcer la supervision bancaire basée sur les risques, à réduire la concentration du crédit, à mieux mettre en application les ratios prudentiels, à adopter un niveau minimum de réserves et des mécanismes de résolution bancaire, et à renforcer le dispositif de LBC/FT.

Les administrateurs constatent que le régime de caisse d’émission sert les intérêts de Djibouti, notamment en insufflant un sentiment de confiance et en donnant plus de prévisibilité aux transactions internationales, et qu’il devrait être maintenu sans en modifier la parité. Ils notent que le taux de change pourrait être quelque peu surévalué en termes effectifs réels, mais que l’ampleur de cette surévaluation est sujette à des incertitudes considérables. Ils invitent les autorités à renforcer la compétitivité à la faveur de réformes structurelles.

Djibouti: Principaux Indicateurs Économiques et Financiers, 2014–18

Est.

Proj.

2014

2015

2016

2017

2018

Comptes nationaux

(Variation annuelle en pourcentage)

PIB réel

6.0

6.5

6.5

7.0

7.0

Prix à la consommation (fin de période)

2.8

1.9

3.0

3.0

3.0

Administration centrale

(En pourcentage du PIB)

Recettes et dons

30.9

37.2

32.5

30.8

29.9

Dépenses

40.5

58.9

48.3

32.4

30.6

Solde global (base engagement)

-9.6

-21.7

-15.8

-1.5

-0.6

Variations des arriérés

-0.5

-0.6

-0.5

-0.5

-0.4

Solde global (base caisse)

-10.1

-22.2

-16.3

-2.0

-1.1

Pour mémoire: solde global hors grands projets

-4.0

-0.9

-0.4

0.3

-1.1

Secteur monétaire

(Variation annuelle en pourcentage de la monnaie au sens large)

Monnaie au sens large

6.5

19.0

8.0

8.7

8.3

Couverture de la caisse d'émission (en %)

110

107

109

109

109

Secteur extérieur

(En millions de dollars américains)

Solde du compte des transactions courantes

-399

-549

-542

-436

-444

(En % du PIB)

-25.1

-31.8

-28.6

-20.9

-19.3

Dette extérieure contractée et garantie par l'Etat

792

1,197

1,606

1,814

2,008

(En % du PIB)

49.9

69.3

84.8

86.9

87.3

Réserves officielles brutes

381

355

373

419

435

(en mois d'importation de biens et services de l'année suivante)

3.4

3.1

3.4

3.7

3.6

Taux de change (FD/dollar, fin de période)

177.7

177.7

177.7

Taux de change effectif réel (moyenne annuelle, 2005 = 100)

96.4

102.7

103.8

(variation en %, dépréciation -)

0.5

6.6

1.1

Sources: Autorités de Djibouti; estimations et projections des services du FMI.





[1] Conformément aux dispositions de l'article IV de ses Statuts, le FMI procède, habituellement chaque année, à des consultations bilatérales avec ses membres. Une mission des services du FMI se rend dans le pays, recueille des données économiques et financières, et s'entretient avec les responsables nationaux de l'évolution et des politiques économiques du pays. De retour au siège, les membres de la mission rédigent un rapport qui sert de cadre aux délibérations du Conseil d'administration.

[2] À l’issue des délibérations, la Directrice générale, en qualité de Présidente du Conseil d’administration, résume les opinions des administrateurs, et le résumé est communiqué aux autorités du pays. On trouvera une explication des termes convenus utilisés communément dans le résumé des délibérations du Conseil d’administration à l’adresse : http ://www.imf.org/external/french/np/sec/misc/qualifiersf.htm.

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