Vers une mondialisation mieux maîtrisée, Discours par Sérgio Pereira Leite, Sous-directeur du Bureau européen du FMI
le 7 octobre 2002
Vers une mondialisation mieux maîtriséeDiscours par Sérgio Pereira Leite
Sous-directeur du Bureau européen
du Fonds monétaire international
Séminaire sur «l'Europe et la mondialisation»
Ligue européenne de coopération économique
Paris, France, 7 octobre 2002
Nous estimons, au Fonds monétaire international (FMI), que la mondialisation est l'occasion d'accroître la prospérité mondiale et d'éradiquer la pauvreté. Mais nous sommes conscients aussi qu'elle n'est pas, par elle-même, bénéfique à tous. Quelles que soient les vertus du marché, sa «main invisible» ne résoudra pas à elle seule ce dilemme. Les responsables économiques doivent donc être prêts à gérer la mondialisation.
Aujourd'hui, je voudrais soulever deux questions : que fait le FMI pour relever les défis de la mondialisation et que peut faire l'Europe pour aider la communauté internationale, et l'Afrique en particulier, à mieux maîtriser la mondialisation.
Que fait le FMI pour relever les défis de la mondialisation?
L'action du FMI se concentre sur le mandat qui lui a été confié. C'est à dire, mettre en place un environnement macroéconomique sain. L'expérience montre que la stabilité macroéconomique est non seulement favorable aux pauvres, mais elle aide aussi nos pays à tirer parti des possibilités engendrées par la mondialisation. Les objectifs souvent associés à l'action du FMI — maîtrise de l'inflation, gestion prudente de la dette, faible déficit des balances des paiements — contribuent tous à rendre nos pays plus résistants aux chocs extérieurs souvent liés à la mondialisation. Le FMI s'emploie activement à aider les pays moins développés à mettre en oeuvre leurs propres stratégies de croissance et de lutte contre la pauvreté. Ces stratégies font du recul de la pauvreté et de l'accélération de la croissance des objectifs explicites des programmes macroéconomiques. Elles insistent sur la transparence des décisions économiques, la participation des populations concernées, l'amélioration du suivi des mesures prises et le renforcement des responsabilités qui s'y attachent. Et elles reconnaissent qu'il faut prévoir des dispositifs de protection sociale pour aider les plus vulnérables à faire face au contrecoup des réformes, et à favoriser les programmes d'éducation ou de formation qui permettront à chacun de tirer parti de la mondialisation au lieu d'en être la victime.
Deuxièmement, le FMI ne ménage pas ses efforts pour prévenir les crises financières, répondre avec promptitude et efficacité à celles qui se déclenchent, et les résoudre de façon aussi juste que possible, en partageant équitablement leurs coûts entre les parties prenantes. Nous nous appliquons à corriger les carences des secteurs financiers des pays membres dans le cadre de nos programmes d'évaluation du secteur financier (PESF). Le FMI réfléchit aussi aux modalités d'un mécanisme de restructuration de la dette souveraine et à l'adoption de clauses contractuelles d'action collective qui permettraient d'assurer, là aussi, une résolution rapide et équitable de crises de balance des paiements. Nous préconisons, par ailleurs, une plus grande transparence et un meilleur contrôle du secteur financier et des entreprises afin de combattre le blanchiment d'argent et la fraude financière. Enfin, notre travail sur la création de normes et de codes internationalement reconnus vise à étendre à tous le bénéfice des meilleurs usages en vigueur à travers le monde.
Troisièmement, le FMI redouble ses efforts pour accroître les capacités institutionnelles de ses pays membres à bas-revenu. C'est dans cette optique que nous avons récemment ouvert deux centres régionaux d'assistance technique pour les pays du Pacifique et des Caraïbes, et prévu de créer cinq autres centres en Afrique — dont les deux premiers seront situés en Tanzanie et en Côte d'Ivoire.
L'Afrique, l'Europe et le programme de Doha pour le développement
À cause de ses liens historiques et commerciaux avec l'Afrique, l'Europe a la responsabilité de s'assurer que l'Afrique bénéficie, elle aussi, de la mondialisation. Les Européens ont déjà démontrés leur volonté de maintenir et même d'améliorer les accords commerciaux préférentiels conclus avec les pays les moins avancés. L'initiative «Tout sauf les armes» — entrée en vigueur en mars 2001 — marque un pas important dans ce sens en garantissant à la plupart des produits africains un accès au marché européen en franchise de droits et de contingents. Mais les obstacles subsistent. Des produits agricoles essentiels, tels que les bananes, le riz ou le sucre, font l'objet d'arrangements transitoires. L'expérience montre que les pays africains ne sont pas en mesure d'utiliser pleinement les schémas de préférence offerts par l'Europe. Cela pourrait s'expliquer par les règles d'origine et les sauvegardes prévues. Ces règles doivent être réexaminées de façon à nous assurer qu'elles ont un rôle légitime et qu'elles ne sont pas utilisées uniquement pour éviter la concurrence.
Le programme de Doha pour le développement offre à l'Afrique des chances qu'elle doit saisir, mais qui s'accompagnent de défis à relever. L'appui de l'Europe sera déterminant pour le succès des pays africains. Beaucoup de secteurs qui présentent un intérêt particulier pour l'Afrique — l'agriculture, les textiles et vêtements ou le sucre seront aussi des sujets de controverse. L'Europe devra résister à la tentation d'invoquer des préoccupations d'environnement et de santé ou des normes sociales pour fermer son marché aux produits africains. En d'autres termes, il est de sa responsabilité d'assurer que les négociations commerciales en cours débouchent sur une prospérité accrue pour les plus démunis, particulièrement en Afrique.
L'Europe doit aussi aider l'Afrique à renforcer ses capacités commerciales. Un effort d'assistance technique et de formation s'impose, en particulier, pour que les exportateurs africains soient mieux à même de respecter les normes administratives ou réglementaires dans le cadre des schémas de préférences. Elle doit envisager une réduction sensible des subventions à l'exportation et à la production accordées à l'agriculture européenne pour permettre une rationalisation de la production agricole mondiale. A long terme, ces efforts bénéficieront l'Afrique, mais aussi l'Europe.
Enfin, bien que les pays européens aient apporté une contribution généreuse au développement à travers leurs programmes d'assistance, il faut faire davantage et l'efficacité de ces aides doit être sans cesse évaluée. Trop souvent, en effet, l'échec d'un programme s'explique par le manque de clarté des objectifs poursuivis, l'allocation inadéquate des crédits ou la mauvaise exécution des projets. Ces initiatives gagneraient à être recentrées sur la lutte contre la pauvreté et sur la prise en charge des programmes par les intéressés.
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Les effets bénéfiques de la mondialisation découlent en partie du fait qu'elle tend à redéployer les ressources des emplois peu productifs vers d'autres qui le sont davantage. En théorie, ça semble bien. Mais en pratique, ce processus peut être très pénible. Néanmoins, la communauté internationale ne doit pas tolérer que des régions entières restent en marge de l'économie mondiale. Cette situation est non seulement immorale, mais contraire à nos intérêts à tous. L'ancien président Bill Clinton l'a fort bien dit quand il nous a rappelés que «tout, de la force de notre économie à la sécurité de nos villes ou à la santé de nos populations, dépend non seulement des évènements qui se produisent sur notre territoire, mais aussi de ce qui se passe à l'autre bout du monde.»1 Cette réflexion doit encourager l'Europe à montrer la vision nécessaire pour ouvrir la voie à une mondialisation mieux maîtrisée.
1 Foreign Policy, novembre/décembre 2000, page 19.
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