Bulletin du FMI : 2015 : « année de l’action et de la volonté politique » — Lagarde
le 15 janvier 2015
- La reprise mondiale fait face à des vents contraires puissants en dépit de la baisse des prix du pétrole et de l’accélération de la croissance américaine
- La croissance mondiale est trop faible, trop fragile, trop déséquilibrée et exposée à des risques considérables
- Une action résolue sur le front des réformes structurelles permettrait d’accélérer la croissance actuelle et à moyen terme
L’année 2015 doit être l’« année de l’action » où les dirigeants redoublent d’efforts pour s’attaquer aux faiblesses économiques profondément ancrées et font preuve d’une plus grande volonté politique en ce qui concerne l’investissement dans les infrastructures, les accords commerciaux et le changement climatique, déclare Christine Lagarde, Directrice générale du FMI.
ÉCONOMIE MONDIALE EN 2015
Lors d’une allocution prononcée à Washington au Conseil des relations étrangères, Mme Lagarde a déclaré que l’économie mondiale fait face à des vents contraires puissants en dépit de facteurs positifs tels que la baisse des prix du pétrole et l’accélération de la croissance américaine.
« Plus de six ans après le début de la Grande Récession, trop de personnes ne sentent pas encore la reprise. C’est pourquoi il faut opérer résolument des réformes structurelles qui permettront de rehausser la croissance actuelle et potentielle à moyen terme », a noté Mme Lagarde, en ajoutant qu’une bonne collaboration et une solide capacité de donner des impulsions seront nécessaires.
Mme Lagarde a noté que l’économie mondiale sera confrontée en 2015 à trois grands enjeux qui exigeront des décisions reposant sur le courage politique, une action résolue et une réflexion multilatérale : dynamiser la croissance et l’emploi ; mieux partager les bienfaits de la croissance, et réaliser une croissance plus durable et mieux équilibrée. Mme Lagarde a noté que ces enjeux sont étroitement liés les uns aux autres et dépendants les uns des autres. Ils sont tous importants, exigent tous une impulsion vigoureuse de la part des dirigeants et nécessitent tous de la coopération.
Mme Lagarde a noté que la baisse des prix du pétrole est un ballon d’oxygène qui vient à point nommé car elle accroît le pouvoir d’achat des consommateurs dans les pays importateurs de pétrole, et que l’économie américaine devrait encore s’affermir cette année, principalement grâce à l’augmentation des dépenses des ménages.
Néanmoins, la baisse des prix du pétrole et la croissance américaine ne sont pas un remède pour des faiblesses profondément ancrées ailleurs, a averti Mme Lagarde. «Trop de pays souffrent encore des séquelles de la crise financière, notamment un endettement et un chômage élevés. Trop d’entreprises et de ménages continuent de réduire leur investissement et leur consommation aujourd’hui parce qu’ils craignent que, demain, la croissance soit faible. »
Risques considérables
Mme Lagarde a indiqué que la croissance reste trop faible, trop fragile et trop déséquilibrée, et a souligné que des risques considérables pèsent sur la reprise de l’économie mondiale.
• Les pays émergents et les pays en développement pourraient faire face en même temps à un affermissement du dollar américain, à une hausse des taux d’intérêt mondiaux et à une augmentation de la volatilité des flux de capitaux;
• La zone euro et le Japon pourraient rester englués dans un environnement de croissance faible et d’inflation faible pendant une période prolongée ;
• Les risques géopolitiques augmentent.
Face à ces risques, il faut donc un solide dosage macroéconomique qui peut renforcer la reprise et offrir de meilleures perspectives d’emploi aux citoyens du monde entier, a déclaré Mme Lagarde. « Il reste essentiel de mener une politique monétaire accommodante. L’ajustement des finances publiques doit être aussi favorable que possible à la croissance et à l’emploi. Et surtout, les dirigeants doivent enfin accélérer les réformes structurelles. »
«Ces maîtres mots économiques — promouvoir la demande, la croissance et les réformes structurelles — ne sont pas nouveaux, mais le temps presse davantage. Et la volonté politique prend plus d’importance. »
Test de la baisse des prix du pétrole
« L’impact de la baisse des prix du pétrole sera un test immédiat pour de nombreux dirigeants, a noté Mme Lagarde. Pas tellement pour les pays importateurs de pétrole, pour lesquels cette baisse offre une occasion de renforcer le cadre macroéconomique et pourrait affaiblir les tensions inflationnistes. Mais les pays exportateurs de pétrole doivent atténuer le choc sur leur économie. »
« Dans la zone euro, la diminution des prix du pétrole contribue à une nouvelle baisse des anticipations inflationnistes, ce qui accroît le risque de déflation. Cela plaide en faveur d’une impulsion monétaire supplémentaire ». « Surtout, a ajouté Mme Lagarde, la baisse des prix du pétrole offre une magnifique occasion de réduire les subventions énergétiques et d’utiliser les ressources ainsi dégagées pour protéger les populations pauvres à l’aide de transferts mieux ciblés ».
« Éliminer, réformer, débloquer »
« 2015 doit être l’année de l’action, a affirmé Mme Lagarde. Il s’agit d’éliminer les distorsions qui existent de longue date sur les marchés du travail et de produits, de réformer les infrastructures déliquescentes et d’en construire de nouvelles, de libéraliser le commerce et d’opérer des réformes dans l’éducation, la santé et les dispositifs de protection sociale. Il s’agit aussi de débloquer le pouvoir économique des femmes. » L’investissement dans les infrastructures, choisi avec soin et efficient, peut changer la donne, a noté Mme Lagarde . «Il ressort d’études du FMI qu’une augmentation de l’investissement dans les infrastructures accroît la production à court terme en stimulant la demande et à long terme en rehaussant les capacités de production de l’économie. »
« Débloquer le pouvoir économique des millions de femmes qui sont aujourd’hui écartées du marché du travail pourrait aussi changer la donne. L’exclusion de ces femmes est une erreur non seulement sur le plan moral, mais aussi sur le plan économique », selon Mme Lagarde.
La libéralisation du commerce pourrait contribuer à exploiter les gains des réformes structurelles, a noté Mme Lagarde. Après des années de ralentissement de la croissance du commerce mondial, 2015 pourrait être une année décisive pour les négociations sur un accord commercial ambitieux
La Grande Récession a montré qu’une croissance économique ne peut être durable sans un secteur financier durable, a observé Mme Lagarde, en ajoutant qu’il est donc essentiel d’achever les réformes du secteur financier.
Objectifs de développement durable
« Des progrès ont été accomplis, en particulier pour ce qui est de la réglementation bancaire et, dans une moindre mesure, des établissements financiers « trop importants pour faire faillite » », a affirmé Mme Lagarde. «Aujourd’hui, il s’agit principalement d’exécuter des réformes et d’améliorer la qualité du contrôle. »
Mme Lagarde a noté qu’en 2015, une grande conférence des Nations Unies visera à adopter un nouvel ensemble d’objectifs de développement durable, et que les dirigeants mondiaux chercheront aussi à conclure un accord global sur le changement climatique qui conduira à une réduction des émissions de carbone.