Bulletin du FMI : Moyen-Orient : des mesures audacieuses sont nécessaires pour parer au fléchissement de la croissance
le 12 novembre 2013
- La plupart des pays exportateurs de pétrole affichent encore une forte croissance hors pétrole, mais doivent assainir leurs budgets
- L’incertitude politique, les tensions sociales et le conflit en Syrie assombrissent les perspectives des pays importateurs de pétrole
- Les pays importateurs de pétrole doivent créer des emplois, assainir les finances publiques et lancer rapidement des réformes audacieuses
Les perspectives économiques à court terme pour le Moyen-Orient, l’Afrique du Nord, l’Afghanistan et le Pakistan (MOANAP) se sont assombries, affirme le FMI dans sa dernière évaluation de la région.
Perspectives économiques régionales
Selon les Perspectives économiques régionales, publiées le 12 novembre, la croissance devrait reculer à 2¼ % cette année puis reprendre en 2014 à mesure que les conditions mondiales s’amélioreront et que la production pétrolière reprendra (voir tableau).
Les exportateurs de pétrole de la région — Algérie, Arabie saoudite, Bahreïn, Émirats arabes unis, Iran, Irak, Koweït, Libye, Oman, Qatar et Yémen — connaissent un revers temporaire de la croissance globale face aux perturbations de la production intérieure de pétrole et à la baisse de la demande mondiale, mais la plupart continuent d’afficher une forte croissance hors pétrole, indique le rapport.
En même temps, les difficiles transitions politiques et les incertitudes régionales croissantes attribuables à la guerre civile complexe en Syrie minent la confiance des pays importateurs de pétrole — Égypte, Jordanie, Liban, Maroc, Pakistan, Soudan et Tunisie en particulier.
«Pour les pays importateurs de pétrole, les actions prioritaires consistent notamment à créer des emplois, assainir les finances publiques et lancer sans délai un ambitieux programme de réformes structurelles», a déclaré M. Masood Ahmed, Directeur du Département du Moyen-Orient du FMI lors d’une conférence de presse à Dubaï. «À brève échéance, l’intensification des investissements publics financés par la réaffectation des dépenses publiques et par l’augmentation des concours financiers extérieurs permettrait de créer des emplois et de poursuivre la transition sociopolitique», a-t-il ajouté.
Les pays exportateurs de pétrole affichent une activité robuste, mais encourent des risques à moyen terme.
mais encourent des risques à moyen terme.
Malgré une baisse de la croissance globale due à des perturbations de la production pétrolière intérieure et au fléchissement de la demande mondiale, la plupart des pays exportateurs de pétrole de la région continueront d’afficher une forte croissance du secteur non pétrolier, étayée par le niveau élevé des dépenses publiques et par une reprise progressive de la croissance du crédit au secteur privé. Une reprise de la production pétrolière ainsi qu’un nouveau renforcement de l’économie non pétrolière permettront vraisemblablement de rétablir l’année prochaine la croissance aux niveaux observés dans un passé récent.
Mais, prévient le FMI, les positions budgétaires dans ce groupe de pays s’effritent (graphique 1). En outre, la plupart des pays exportateurs de pétrole n’épargnent pas une proportion suffisante de leurs recettes pétrolières exceptionnelles pour les générations futures. Certains ont commencé à mettre fin aux plans de relance budgétaire cette année. Mais, à moins de procéder à d’autres compressions budgétaires, les gouvernements de la région commenceront à puiser dans leur épargne dès 2016.
Une baisse prolongée des cours du pétrole entraînerait des déficits budgétaires dans la plupart des pays exportateurs dès l’année prochaine. Bien que la majorité des pays du CCG soit en mesure de faire face à une baisse brève ou légère des recettes pétrolières, leur marge de manœuvre budgétaire diminue, signale le rapport.
«Dans ce contexte, les pouvoirs publics devront trouver des moyens de maîtriser les dépenses courantes difficiles à éliminer, surtout les salaires et les subventions, en ciblant les programmes sociaux et les investissements en capital de haute qualité. Il convient en outre de privilégier la poursuite des réformes structurelles pour doper la croissance du secteur privé, la diversification des activités économiques et la création d’emplois pour les nationaux et les femmes», a déclaré M. Ahmed à l’intention des journalistes.
Les importateurs de pétrole doivent prendre des mesures énergiques
L’incertitude politique, combinée aux pressions sociales et aux conflits régionaux, a retardé davantage la reprise économique. D’après le rapport du FMI, les pays importateurs de pétrole devraient afficher une croissance moyenne de 3 % seulement en 2013–14, ce qui est nettement inférieur au taux de croissance nécessaire pour réduire le chômage persistant et améliorer les niveaux de vie (graphique 2).
«Au cours des trois dernières années, pour faire face aux pressions sociales croissantes et à la hausse des prix des denrées alimentaires et des carburants, les gouvernements de la plupart des pays importateurs de pétrole ont accru des dépenses au titre des subventions généralisées, des emplois dans le secteur public et des salaires, tandis que les recettes ont baissé en raison du ralentissement de la croissance économique», a déclaré M. Ahmed.
Ainsi, les importateurs de pétrole ont vu leurs déficits budgétaires grimper à près de 10 % du PIB en moyenne, et leur dette publique à 80 % du PIB environ. Par ailleurs, les réserves internationales restent faibles, signale le rapport.
«Les pays arabes en transition font face à un dilemme. L’incertitude politique complique la mise en œuvre de réformes profondes et globales. En même temps, l’absence d’amélioration de la situation économique risque d’aggraver les tensions sociopolitiques et de compromettre davantage la transition dans de nombreux pays, retardant davantage le retour de la confiance et de l’investissement privé», a déclaré M. Ahmed.
Dans cet environnement difficile, le FMI recommande aux autorités de la région de :
• Créer des emplois pour aider à soutenir les transitions sociopolitiques. L’investissement privé ayant tari, les autorités doivent jouer un rôle clé pour doper l’activité économique à court terme, d’où la nécessité de réorienter les dépenses relatives aux subventions généralisées vers l’investissement public qui permettrait de doper la croissance. En même temps, il est nécessaire d’établir des dispositifs de protection sociale mieux ciblés afin de protéger les pauvres.
• Assainir les finances publiques pour rétablir la viabilité de la dette. Dans certains cas, il y a sans doute lieu de procéder à un ajustement budgétaire graduel (baisse des dépenses et/ou hausse des recettes) afin d’en limiter l’impact sur l’activité économique à court terme. Les pays auront besoin d’une assistance accrue de la communauté internationale pour concilier ces impératifs.
• Lancer un ambitieux programme de réformes structurelles. Il s’agit notamment d’améliorer le climat des affaires et l’accès aux financements afin de stimuler la croissance durable et la création d’emplois à moyen terme.
«Des progrès rapides dans chacun de ces domaines prioritaires peuvent contribuer à signaler la détermination des autorités à mener des réformes, à rehausser la confiance et à promouvoir l’activité du secteur privé dont les pays ont tant besoin», a poursuivi M. Ahmed. «Dans cette optique, l’assistance accrue de la communauté internationale est nécessaire, non seulement par la hausse des financements, mais aussi par l’intensification des échanges et de l’assistance technique», a-t-il ajouté.