Bulletin du FMI : Le FMI appuie le plan d’émergence du Sénégal
le 25 juin 2015
- Un plan national vise à faire du Sénégal un pays émergent et une plaque tournante régionale
- Le nouveau programme économique triennal a le soutien du FMI
- La réussite du plan est subordonnée à des efforts vigoureux pour mettre en œuvre les réformes envisagées
Le Conseil d’administration du FMI renouvelle son soutien aux politiques économiques et financières du Sénégal en approuvant pour la troisième fois consécutive son programme d’action. Le programme du Sénégal sous-tend l’objectif qui vise l’émergence à l’horizon 2035.
AFRIQUE DE L’OUEST
Le nouveau programme triennal des autorités sous-tend l’objectif à plus long terme de transformer le Sénégal en un pays émergent à l’horizon 2035.
Le Conseil d’administration a approuvé le 24 juin 2014 un nouvel accord triennal au titre de l’instrument de soutien à la politique économique (ISPE) en faveur du Sénégal. L’ISPE offre aux pays à faible revenu ne souhaitant pas bénéficier d’un concours financier du FMI, ou n’en ayant pas besoin, un outil leur permettant de faire appel aux conseils et au suivi du FMI pour consolider leurs résultats économiques.
L’ISPE aide ces pays à élaborer des programmes économiques efficaces qui, une fois approuvés par le Conseil d’administration, adressent un message clair aux bailleurs de fonds, aux banques multilatérales de développement et aux marchés, leur montrant que le FMI donne son aval à la solidité des politiques mises en œuvre.
Le nouveau programme économique du Sénégal vise à contribuer aux objectifs de la feuille de route dont le pays s’est doté pour l’avenir. Le Plan Sénégal émergent (PSE) a été conçu par les autorités pour aider le pays à sortir de la trappe de croissance faible et de pauvreté élevée de ces dernières années. Il compte faire du Sénégal une plaque tournante pour l’Afrique de l’Ouest en assurant une croissance économique forte et équitablement partagée.
Un programme ambitieux, mais réaliste
L’objectif consistant à assurer des taux de croissance soutenue supérieurs à 7 % (graphique 1) et à faire du Sénégal une plaque tournante régionale est réalisable, pourvu que les réformes prévues par le plan soient menées à bonne fin.
La réalisation des objectifs de croissance définis par le plan permettrait d’améliorer sensiblement les niveaux de vie et de réduire la pauvreté. Les premiers indices révèlent une dynamique positive, grâce aux progrès dans la mise en œuvre des réformes et à des facteurs externes favorables. Il faut cependant faire davantage pour conforter cette dynamique, d’après un récent rapport des services du FMI sur l’économie sénégalaise.
L’ISPE approuvé par le FMI vise essentiellement à assurer la stabilité macroéconomique grâce à une croissance accélérée et soutenue qui a pour objet de relever les niveaux de vie et de réduire ainsi la pauvreté. Il intègre aussi d’objectifs des autorités :
• Promouvoir une croissance élevée, durable et inclusive;
• Préserver la stabilité macroéconomique grâce à une politique budgétaire prudente;
• Renforcer les institutions et réformer l’État;
• Améliorer le climat des affaires et la gouvernance; et
• Étoffer le capital humain et la protection sociale.
En 2015, le déficit budgétaire du Sénégal sera contenu à 4,7 % du PIB. Des efforts soutenus pour réduire les dépenses courantes et améliorer la mobilisation des recettes fiscales permettraient de le ramener à 3,6 % du PIB en 2017 (graphique 2).
Objectif de déficit budgétaire
Les autorités entendent se conformer au critère de convergence de l’Union économique et monétaire ouest-africaine (UEMOA), à savoir un déficit budgétaire de 3 % du PIB à l’horizon 2018. La dette publique ne dépasserait pas 56 % du PIB au cours de la période du programme sur le long terme, ce qui signifie un faible risque de surendettement.
Les réformes structurelles majeures visent à dégager la marge budgétaire requise pour les investissements liés au plan national, améliorer l’efficacité des services publics, accroître l’impact des dépenses publiques grâce à des réformes de la gestion des finances publiques, contenir la consommation publique afin de dégager une marge pour les investissements dans le capital humain et les infrastructures publiques et renforcer les systèmes de protection sociale.
Le programme triennal vise aussi à améliorer le climat des affaires et prévoit des réformes structurelles en vue d’attirer les investisseurs étrangers et de promouvoir l’investissement privé. Il a aussi pour but de restreindre la consommation publique et d’accroître l’épargne publique afin de dégager une marge budgétaire pour les investissements dans le capital humain et les infrastructures publiques.
Nouveaux éléments
Le nouveau programme soutenu par l’ISPE est le troisième du genre. Les deux précédents programmes (2010-14 et 2008-10) ont pour l’essentiel atteint leurs objectifs macroéconomiques et contribué à préserver la stabilité macroéconomique, mais les réformes structurelles sont restées à la traîne et ont lourdement grevé la croissance.
Le nouveau programme se distingue des précédents par quatre éléments nouveaux.
• Degré élevé d’internalisation et d’effet d’entraînement national. Le PSE est solidement piloté par le gouvernement — le Président et le Ministre des Finances se sont personnellement impliqués dans son élaboration — et bénéficie d’un vaste soutien populaire dans le pays. L’internalisation et la responsabilisation renforcées devraient contribuer à en améliorer les résultats. L’ISPE contribuera à la réalisation des objectifs de la stratégie de développement des autorités.
• Instruments innovants. Le programme exige de bonnes études de faisabilité avant le déblocage de crédits pour de nouveaux investissements, ce qui devrait accroître l’efficience des investissements, atout crucial pour la croissance. Le profil de dette constitue un point d’ancrage en vertu duquel la courbe d’accumulation de la dette publique est définie pour cinq ans et tout écart par rapport à la trajectoire fixée doit être corrigé dans un délai de quatre ans. Cela devrait préserver la viabilité de la dette.
• Conception moderne du programme. Le cadre macroéconomique du programme sera défini d’après les normes les plus avancées de présentation des comptes budgétaires. Les critères d’évaluation clés seront calculés et suivis sur la base de ces nouvelles normes internationalement reconnues, pour la première fois dans un pays d’Afrique de l’Ouest. C’est une étape importante vers une plus grande transparence et responsabilisation et cela confortera la confiance des investisseurs.
• Soutien du programme par l’apprentissage entre pairs. Ayant clairement identifié ce qu’il faut faire, les autorités ont choisi une démarche originale pour apprendre comment mener à bien les réformes nécessaires. Avec l’aide du FMI, elles ont organisé une série de séminaires d’apprentissage entre pairs avec de hauts responsables du Cap-Vert, de Maurice et des Seychelles, pays qui ont mis en œuvre les réformes sont le Sénégal a besoin. Cet apprentissage constitue une nouvelle modalité d’assistance pratique sur les grandes réformes. Le prochain atelier aura pour thème les partenariats public-privé, avec la participation, entre autres, de l’Afrique du Sud et de Maurice. Il sera suivi d’un autre atelier sur les unités de prestation de services, avec la Banque mondiale et, éventuellement, le Royaume-Uni, la Malaisie, Maurice et l’Afrique du Sud.
Maîtriser les risques
Les objectifs ambitieux du PSE sont réalisables pourvu que les réformes soient menées à bonne fin. Les risques que comporte le nouveau programme soutenu par l’ISPE sont importants, mais gérables.
La mise en œuvre plus lente que prévu des réformes visant à restreindre la consommation publique improductive et des retards dans l’amélioration de l’efficacité des dépenses pourraient mettre en péril le rééquilibrage budgétaire prévu. Si la réforme fiscale visant à améliorer les incitations n’aboutissait pas, cela pourrait causer un manque à percevoir et des emprunts excessifs et, partant, compromettre la viabilité de la dette. Des retards dans l’exécution des réformes structurelles, en particulier celles qui ont trait à la gestion des finances publiques et aux secteurs énergétique et bancaire, pourraient ralentir la croissance.
Les risques qui pèsent sur le programme ne sont pas seulement internes. Une volatilité persistante des cours du pétrole pourrait nuire aux objectifs de recettes et aux subventions. Les retombées des crises régionales, y compris l’épidémie d’Ébola et l’extrémisme, pourraient s’accentuer. Les conditions climatiques peuvent affecter l’agriculture, et le ralentissement de la croissance des partenaires commerciaux du Sénégal risque de réduire la demande d’exportations.
Les autorités entendent maîtriser ces risques et faire face aux vents contraires en menant des politiques macroéconomiques saines, qui s’appuieront notamment sur un ancrage de la dette et un élargissement de la réserve de précaution, sur l’apprentissage entre pairs et sur les conseils qu’elles continueront à recevoir du FMI.