Typical street scene in Santa Ana, El Salvador. (Photo: iStock)

(photo : Sultan Mahmud Mukut/SOPA Image/Newscom)

Bulletin du FMI : La baisse des prix du pétrole met à mal les pays du Moyen-Orient et d’Asie centrale

le 21 janvier 2015

  • La baisse des prix du pétrole présente des problèmes pour les pays exportateurs et des avantages limités pour les pays importateurs
  • Les pays exportateurs de pétrole doivent ajuster progressivement leurs dépenses, réformer leurs subventions énergétiques et diversifier leur économie en dehors du pétrole
  • Les pays importateurs doivent éviter de dépenser leurs gains exceptionnels, continuer de réformer leurs subventions et accélérer la création d’emplois et la croissance

La forte baisse des prix du pétrole présente de nouvelles réalités économiques pour les pays exportateurs des régions du Moyen-Orient, de l’Afrique du Nord, de l’Afghanistan et du Pakistan (MOANAP) et du Caucase et de l’Asie centrale (CAC), note le FMI dans sa mise à jour des Perspectives économiques régionales, publiée le 21 janvier.

Raffinerie de pétrole à  Zawya, en Libye. La baisse des prix du pétrole devrait entraîner des pertes budgétaires considérables pour les pays exportateurs de pétrole du Moyen-Orient et d’Asie centrale (photo : Ismail Zitouny/Reuters/Newscom)

Raffinerie de pétrole à Zawya, en Libye. La baisse des prix du pétrole devrait entraîner des pertes budgétaires considérables pour les pays exportateurs de pétrole du Moyen-Orient et d’Asie centrale (photo : Ismail Zitouny/Reuters/Newscom)

PERSPECTIVES ÉCONOMIQUES RÉGIONALES

Le FMI prévoit que les pays exportateurs des régions MOANAP et CAC enregistreront des pertes considérables sur le plan de leurs exportations et de leurs recettes. Dans les pays du Conseil de coopération du Golfe (CCG), qui sont les plus touchés, les recettes tirées des exportations de pétrole et de gaz devraient diminuer d’environ 300 milliards de dollars. Pour les pays importateurs, la baisse des prix est bénéfique puisqu’elle réduit la facture des importations énergétiques, ce qui pourrait aider les pouvoirs publics, les entreprises et les consommateurs.

Le FMI conseille aux pays exportateurs de pétrole d’éviter de réduire brutalement leurs dépenses en dépit de l’évolution défavorable du marché pétrolier, et engage vivement les pays importateurs de pétrole à juger comme temporaires les économies attribuables à la baisse des prix.

«Heureusement, la plupart des pays exportateurs de pétrole disposent de ressources financières qui leur permettent d’éviter de réduire fortement leurs plans de dépenses cette année. Cependant, à moyen terme, ils devront ajuster leur position budgétaire de manière progressive mais résolue afin d’assurer la viabilité de leurs finances publiques et l’équité entre générations», a déclaré Masood Ahmed, Directeur du Département Moyen-Orient du FMI lors d’une conférence de presse à Washington. «Il est dans l’intérêt des pays importateurs de pétrole de ne pas prendre d’engagements de dépenses qu’il serait difficile d’inverser si les prix du pétrole remontaient », a-t-il ajouté.

Nouvelles réalités

Les prix du pétrole ont reculé de plus de 55 % depuis septembre 2014 pour s’établir à un niveau qui n’avait plus été atteint depuis une brève période en 2009. Cette baisse semble s’expliquer par des facteurs liés à l’offre et la demande : l’offre supérieure aux prévisions, en particulier des États-Unis, n’a pas été compensée par des baisses de production de la part des pays membres de l’Organisation des pays exportateurs de pétrole (OPEP), tandis que la demande mondiale (en particulier de la Chine, du Japon et de la zone euro) s’affaiblissait.

À moyen terme, il est probable que les perspectives des prix du pétrole dépendent de la réaction de l’investissement et de la production du secteur pétrolier à la baisse des prix. Il s’agira aussi de savoir si l’OPEP reprend son rôle de producteur d’appoint ou si les prix du pétrole seront davantage influencés par le coût marginal de la production de pétrole de schiste, a noté le FMI.

Le rapport a révisé les projections de croissance pour les régions MOANAP et CAC en 2015 en tenant compte de l’évolution du marché pétrolier et de l’économie mondiale (voir tableau).

Pertes sensibles pour les pays exportateurs de pétrole

L’effondrement des prix du pétrole devrait entraîner une détérioration sensible du solde budgétaire des pays exportateurs des régions MOANAP et CAC (graphique 1). À l’exception du Koweït, du Qatar et du Turkménistan, tous les pays de la région devraient afficher un déficit budgétaire en 2015. Pour les pays de la région CAC, l’impact de la baisse des prix du pétrole est aggravé par la récession grandissante en Russie, à laquelle ces pays sont étroitement liés par la voie du commerce, des envois de fonds et de l’investissement direct étranger, note le rapport.

Dans les deux régions, étant donné que les marges de manœuvre diminuent à des rythmes différents, la plupart des pays devront réévaluer leurs plans de dépenses à moyen terme et, si les prix se maintiennent longtemps à un faible niveau, ils devront s’adapter progressivement aux nouvelles réalités du marché pétrolier. Les pays qui ne disposent pas de réserves ou de capacités d’emprunt considérables devront s’adapter plus rapidement, avec des conséquences négatives pour la croissance économique, selon le FMI.

Le FMI souligne que la baisse des prix du pétrole rend d’autant plus urgents la réforme des subventions énergétiques et le changement de modèle de croissance économique dans les pays exportateurs de pétrole dans les deux régions.

«Des contraintes vont vraisemblablement peser sur les dépenses publiques pendant plusieurs années. Cela signifie que l’actuel modèle de croissance fondé sur le gonflement des cours du pétrole et des dépenses publiques ne fonctionnera plus. Les pays devront plutôt diversifier davantage leur économie et permettre au secteur privé de se transformer en moteur durable de croissance et de création d’emplois», a ajouté M. Ahmed.

Des gains modestes pour les importateurs de pétrole

Pour les importateurs de pétrole, le tassement des cours apporte un répit salutaire. L’allégement des factures pétrolières se traduit par un relâchement des tensions sur les budgets, du fait de la diminution des coûts du subventionnement des prix énergétiques (graphique 2). En outre, selon le rapport, la baisse des coûts de l’énergie peut se traduire par une diminution des coûts de production et un relèvement du revenu disponible, à supposer que cette baisse soit répercutée sur les entreprises et les consommateurs.

Cependant, dans la plupart des pays importateurs de pétrole, les gains attribuables au repli des cours sont compensés par d’autres facteurs. Une détérioration des perspectives de la demande de la zone euro et du CCG, et la chute des cours des matières premières autres que le pétrole, que certains de ces pays exportent, ont pour effet d’éroder les gains exceptionnels liés à l’allégement de la facture pétrolière.

Le FMI a souligné que l’évolution future des cours du pétrole reste très incertaine, aussi les importateurs de pétrole devraient-ils s’abstenir de prendre des engagements de dépenses qu’il serait difficile d’inverser si les cours du pétrole se redressaient ou que la conjoncture devenait autrement défavorable.

Le rapport souligne qu’il est nécessaire de poursuivre la réforme des subventions énergétiques. Il rappelle en outre combien il est important d’assurer une croissance forte et soutenue pour s’attaquer au problème chronique du chômage, notamment dans la région MOANAP.

«Une croissance soutenue de plus de 8 % serait nécessaire pour réduire sensiblement le chômage et relever les revenus» a déclaré M. Ahmed à la presse, ajoutant qu’il est essentiel de profiter de cette période de pétrole moins cher pour accélérer les réformes économiques, notamment dans les domaines du climat des affaires, de la gouvernance, de l’éducation et de l’intégration commerciale.