L’impression d’énergie et de dynamisme de l’Afrique que je décrivais pendant mon séjour Kenya se confirme avec force ici en Afrique du Sud. Et ce n’est pas simplement la fièvre de la Coupe du Monde — même si elle est aussi bien en évidence.
D’après certaines estimations, on attend près de 10 millions de personnes en Afrique du Sud cet été, pour la grande fête du football — ce qui va encore doper l’économie et rehausser son image dans le monde. L’Afrique du Sud est un acteur qui compte sur la scène internationale.
Ce pays est depuis longtemps considéré comme le foyer de croissance de la partie sud-est du continent. Mais l’an passé, en tant que membre du G-20, l’Afrique du Sud a acquis une stature autrement imposante — celle d’un pays émergent. Et elle a aussi gagné de l’influence dans les prises de décisions au niveau mondial. C’est un rôle nouveau pour l’Afrique dans le monde, et le monde découvre l’Afrique sous un jour nouveau.
Je rencontre régulièrement le Président Zuma à ces réunions du G-20. Mais J’ai eu un plaisir tout particulier à le rencontrer à nouveau chez lui, et à le voir travailler à la tête des vives économiques et politiques qui sont à l’œuvre dans un pays jeune qui projette sa propre vision de son avenir au XXIème siècle.
De l’avis du FMI, l’Afrique du Sud a bien survécu à la crise financière, grâce à un ensemble de mesures pragmatiques de stabilisation conjoncturelle qui ont permis au pays de résister à sa première récession en 20 ans. Certes — ce n’est guère surprenant —, le taux de croissance est tombé en 2009 en-dessous du taux moyen de 4,2 % enregistré sur la période 2000-2008. Mais le pire semble être passé et nous prévoyons une croissance relativement robuste de 2,5 % en 2010.
Pour autant, les enjeux pour l’avenir ne manquent pas. Bien au contraire, certains sont énormes. Et les Sud-Africains avec lesquels je me suis entretenu — le Ministre des finances et quelques-uns de ses collègues au dîner, les capitaines d’industrie au petit-déjeuner, et aussi un formidable groupe de jeunes étudiants à l’Université de Witwatersrand — ne m’ont pas caché ce qu’ils considèrent comme les impératifs prioritaires :
• Lutter contre le chômage. L’Afrique du Sud a perdu près d’un million d’emplois l’an dernier. Et, dans un pays d’environ 50 millions d’habitants, on s’attend à ce que le taux de chômage culmine à quelque 25 %. Cela fait beaucoup de chômeurs. Beaucoup trop. La croissance est repartie, mais la création d’emplois est encore anémique — problème que l’Afrique du Sud partage avec beaucoup des pays avancés qui s’efforcent aussi de se remettre de la crise financière. D’où vont venir ces emplois? C’est un enjeu crucial pour l’Afrique du Sud, l’Europe et les États-Unis dans le monde de l’après-crise.
• Réduire les inégalités. Cela se sait peu : l’Afrique du Sud a dépassé le Brésil et est maintenant le pays du monde où les inégalités sont les plus marquées. L’Afrique du Sud a pris des mesures remarquables pour corriger les injustices liées à l’apartheid dans les domaines du logement, de l’éducation et de la santé publique. Mais il reste beaucoup à faire. Un tiers de la population a moins de 14 ans, et les tensions sociales ne peuvent que s’envenimer si ces jeunes ne peuvent pas grandir avec l’espoir d’une amélioration de la qualité de leur vie et de celle de leurs familles.
• Construire une économie adaptable et concurrentielle. La croissance économique n’est pas la seule réponse face à ces enjeux, mais elle doit faire partie de la solution. Au cours de ma visite, j’ai fait observer qu’il faut aplanir les obstacles à la concurrence dans un certain nombre de secteurs clés — pour renforcer la position de l’Afrique du Sud sur le marché mondial. D’autres réformes visant à assouplir les marchés du travail et des produits pourraient aussi être indiquées. Pour réussir sur la scène internationale, il faut acquérir l’endurance requise pour résister aux chocs économiques mondiaux.
Une société ouverte sur l’avenir
Ce sont là de formidables enjeux. L’Afrique du Sud est-elle capable d’y faire face? J’en ai l’intime conviction.
Nous avons affaire à une société ouverte sur l’avenir, pleine de vitalité. J’ai pu le constater en bien des occasions. Mais je l’ai vu par-dessus tout à Soweto, où Anne et moi-même avons découvert une association exemplaire qui s’appelle Grassroots Soccer.
Grassroots Soccer prodigue aux jeunes des conseils pour la prévention du VIH/Sida, et pour progresser dans la vie en général. Elle part du constat des ravages causés par le Sida — et de la popularité du football. Plus de 300.000 enfants et adolescents ont bénéficié de l’action de cette association. En regardant ces enfants jouer, j’ai été conquis par l’émotion — et aussi inspiré par ce travail exemplaire.
Oui, décidément, l’Afrique du Sud saura être à la hauteur des enjeux de l’avenir.
Vous pouvez aussi vous reporter aux précédents billets de mon blog de voyage : Retour en force de l’Afrique et FMI — L’accomplissement des promesses faites à l’Afrique