Après deux décennies de stagnation économique et de
progrès médiocres dans l'amélioration du sort des plus démunis,
les conditions d'une renaissance économique de l'Afrique subsaharienne alliant
l'accélération de la croissance au recul de la pauvreté se mettent en place
depuis quelques années. Cette note de synthèse dresse un bilan de
l'évolution économique récente avant de rappeler les principales questions
auxquelles les pays de la région devront répondre et la contribution que la
communauté internationale, en particulier le FMI, devra leur apporter afin qu'ils puissent
faire fond sur l'acquis des dernières années pour entrer dans un cercle vertueux de
croissance non seulement durable, mais de qualité. Lancée par le FMI en avril
dernier, la série des notes de synthèse propose des analyses succinctes de
questions d'actualité à l'intention d'un public de non-spécialistes. Elle vise
avant tout à offrir des éléments de réflexion susceptibles de
faciliter le débat sur des sujets spécifiques.
I. Introduction
Les pays d'Afrique subsaharienne ont affiché des résultats
économiques décevants dans les années 80 et au début des
années 90, la plus grande partie de la région se montrant incapable de rompre avec
un scénario de croissance faible (voire de recul) du revenu par habitant, de forte inflation
et de difficultés de balance des paiements. Entre 1995 et 1997, toutefois, les performances
se sont améliorées et le revenu réel par habitant a commencé
à progresser. Si le redressement des termes de l'échange y a aussi
contribué, cette embellie a été possible avant tout parce que de nombreux
pays se sont engagés à mener une politique macroéconomique saine,
à s'ouvrir davantage sur l'extérieur, à mieux gérer leur
économie et à relever le formidable défi économique et social
lancé à l'ensemble de la région. Là où les autorités
ont tenu ce cap, la croissance s'est accélérée et la pauvreté a
reculé. Souvent, cette nouvelle politique a été adoptée dans le
cadre de programmes à moyen terme appuyés par le FMI et la Banque
mondiale.
En dépit des progrès récents, la croissance reste fragile, les niveaux
de vie sont toujours très bas et la pauvreté est endémique. Les indicateurs
d'éducation et de santé demeurent médiocres et, dans certains pays, le
rythme des créations d'emplois ne parvient pas à suivre celui de la population
active. Les économies restent à la merci des aléas climatiques
(sécheresse, inondations) et sont toujours fortement tributaires des aides
extérieures concessionnelles. La région n'a pas été capable de tirer
pleinement profit du processus de mondialisation. L'idée d'un engagement plus actif de la
communauté internationale se heurte, dans la plupart de ces pays, à une
série d'obstacles : l'insuffisance des infrastructures et les carences de l'administration
fiscale et du recouvrement de l'impôt; des politiques fiscales et d'investissement soumises
davantage au bon vouloir de quelques fonctionnaires qu'à des règles
transparentes; l'accès limité aux technologies de l'information; le manque
d'équipements de communication; l'état encore embryonnaire des services
financiers et la faiblesse de l'appareil judiciaire. Enfin, plusieurs conflits armés
assombrissent les perspectives économiques de la région et, dans de nombreux
pays, la propagation du SIDA/VIH abaisse la productivité de la main-d'œuvre et les
conditions de façon alarmante.
Ce survol de la situation régionale trace les grande lignes des politiques susceptibles
d'améliorer les chances d'accélération durable de la croissance et de recul
de la pauvreté en Afrique subsaharienne. Il est essentiel, en effet, que la croissance
s'accélère durablement si l'on veut relever les niveaux de vie et réduire la
pauvreté, car la faiblesse du revenu par habitant est telle dans la région que la
redistribution ne modifiera guère, à elle seule, la situation de pauvreté
actuelle. Outre la stabilité macroéconomique, sur laquelle il leur faut continuer
à mettre l'accent—en menant des politiques budgétaire, monétaire et
de change appropriées—et les réformes structurelles destinées
à améliorer l'efficience des marchés, les pays de la région ont trois
défis majeurs à relever. Ils doivent :
- Concevoir et mettre en oeuvre des stratégie globales de nature à
accélérer la croissance et à réduire la pauvreté, tout en
s'assurant qu'elles bénéficient, dans le public, du large soutien sans lequel elles ne
pourront être appliquées durablement. Cela passe par une plus grande participation
de la société civile, qui doit être consultée sur la teneur des
programmes, et par une utilisation plus efficace des ressources du secteur public pour
réduire la pauvreté.
- Améliorer la gouvernance, assurer la primauté du droit, encourager
l'ouverture et la transparence de l'État, réduire les possibilités de
corruption et instaurer un climat plus propice à l'investissement et à la production
dans le secteur privé. Cela permettra à ces pays d'améliorer leur
productivité et leur compétitivité et de mieux tirer parti de la
mondialisation de l'économie.
- Consolider la situation des paiements extérieurs. L'allégement de la
dette à l'appui de programmes de lutte contre la pauvreté a un rôle
important à jouer à cet égard, en particulier dans les pays pauvres
très endettés (PPTE).
Le FMI offre aux pays africains, comme aux autres États membres, des
conseils de politique économique accompagnés au besoin d'une assistance
financière (à l'appui de leur programme économique) et d'une assistance
technique. Depuis la fin des années 80, l'aide financière qu'il apporte aux pays
à faible revenu, y compris en Afrique, est assortie de conditions concessionnelles, et en
particulier d'un taux d'intérêt de 0,5 % par an. Entre 1987 et 1999, cette assistance
était acheminée par le canal de la facilité d'ajustement structurel
renforcée (FASR). Fin 1999, la FASR a été transformée en
facilité pour la réduction de la pauvreté et pour la croissance (FRPC), qui
s'inscrit dans le cadre de la nouvelle approche des programmes économiques et de la lutte
contre la pauvreté adoptée en collaboration avec la Banque mondiale et d'autres
créanciers ou bailleurs de fonds internationaux (encadré 1)1.
Tout en continuant à insister sur le fait que la croissance est une condition sine
qua non du recul de la pauvreté, le FMI met davantage l'accent désormais sur
la réduction de la pauvreté en tant qu'objectif central, en soi, de la politique
économique des pays les plus démunis. Cette nouvelle approche prône aussi
l' «appropriation», par les bénéficiaires eux-mêmes, des
programmes qu'appuie la FRPC. Elle est énoncée dans un document de
stratégie de réduction de la pauvreté (DSRP) préparé par
le pays emprunteur avec la participation de la société civile, et notamment des
pauvres. Le DSRP ne se borne pas à promouvoir cette prise en main du programme par
les intéressés, mais contribue aussi, par son caractère global, à la
cohérence d'ensemble des politiques conduites. D'autre part, étant donné
que c'est dans ce cadre que s'inscriront les relations du pays concerné avec l'ensemble de
ses créanciers et bailleurs de fonds, le DSRP assurera également la
cohérence des politiques de prêts du FMI, de la Banque mondiale et des autres
créanciers ou bailleurs de fonds. L'importance donnée désormais à
la lutte contre la pauvreté a pour conséquence, entres autres, que l'on insiste
davantage sur les mesures susceptibles de bénéficier directement aux plus
démunis, et notamment sur les dépenses consacrées à
l'éducation de base, aux soins de santé ou aux infrastructures rurales.
Parallèlement à cette nouvelle approche, le FMI, la Banque mondiale et
d'autres créanciers ou bailleurs de fonds ont décidé d'intensifier les efforts
déployés dans le cadre de l'initiative en faveur des PPTE lancée en 1996
pour alléger le fardeau de la dette des pays pauvres. Fin 1999, cette initiative a
été renforcée afin d'assurer plus vite un allégement plus sensible de
la dette à un plus grand nombre de pays, tout en instituant un lien plus étroit entre
la réduction de la pauvreté et l'allégement de la dette. L'allégement
ayant pour finalité d'aider les pays qui en profitent à connaître la croissance
et à faire reculer la pauvreté, ceux qui demandent à
bénéficier de l'initiative en faveur des PPTE doivent définir une
stratégie anti-pauvreté à laquelle le FMI apporte son appui par
l'intermédiaire de la FRPC. Cette approche de la réduction la dette repose sur la
participation simultanée de tous les créanciers officiels, bilatéraux et
multilatéraux. La Banque mondiale et le FMI ont redoublé d'efforts, en l'an 2000,
pour accélérer l'octroi de ces allégements de dettes afin de parvenir
à un accord dans ce sens avec 20 pays (principalement africains) d'ici la fin de
l'année.
II. Évolution économique récente et
perspectives à court terme
Les réformes structurelles se sont accélérées dans un certain
nombre de pays d'Afrique subsaharienne au cours de la seconde moitié des années
90. Pour s'intégrer à l'économie mondiale, les pays de la région
ont décidé notamment de laisser le marché déterminer la
parité de leur monnaie en libéralisant les restrictions de change. Les obstacles
tarifaires et non tarifaires aux échanges internationaux ont aussi été
abaissés, même si ces barrières restent en général
élevées par rapport à celles érigées ailleurs dans le monde.
La plupart des pays de la région ont entrepris, avec des fortunes diverses, de restructurer
et de privatiser les entreprises publiques inefficaces. Certains ont commencé à
déréglementer le marché du travail, la réforme fiscale gagne du
terrain et, dans plusieurs pays, des mesures ont été prises pour mettre fin au
contrôle sélectif de crédit et favoriser le recours aux instruments indirects
de contrôle monétaires, et notamment les politiques de taux d'intérêt
reposant sur le marché.
La croissance du PIB réel de la région a avoisiné 4 % par an sur la
période de 1995– 97, et celle du PIB réel par habitant est redevenue
positive (tableau 1). Cette amélioration des résultats économiques,
évidente dans la plus grande partie la région, tient pour une bonne part à
l'adoption de meilleures politiques macroéconomiques et structurelles par ces pays. Dans
la zone franc, les gains dégagés par la dévaluation de 1994 ont aussi
joué un rôle important à cet égard. Cela dit, la croissance a ralenti
dans la région en 1998– 99 et la production par habitant a baissé en raison,
pour partie, des troubles civils qui persistent dans de nombreux pays. Dans leurs grandes lignes,
cependant, les politiques suivies sont restées bien orientées. Enfin, si les
problèmes de gouvernance ont empiré dans un certain nombre de cas, ils ont
connu au contraire une évolution favorable dans deux des principaux pays de la
région, puisque le processus démocratique a été consolidé
en Afrique du Sud et qu'un gouvernement issu d'élections libres est entré en
fonction au Nigeria.
L'Afrique subsaharienne devrait connaître une croissance de l'ordre de 4 % par an, en
moyenne, en 2000– 01, ce qui permettra au revenu par tête réel d'augmenter
à nouveau, même si ce n'est que dans des proportions modestes. Certaines des
évolutions observées sont favorables dans une perspectives à court terme
:
- En Afrique du Sud, le redressement des finances publiques a été
spectaculaire, le système financier est solide, la compétitivité
extérieure s'est améliorée et la croissance s'accélère
(encadré 2).
- Au Nigeria, qui bénéficie de la hausse des prix pétroliers, on
commence à s'attaquer aux problèmes de gouvernance, même s'il reste
beaucoup à faire pour corriger les dégâts causés par des
décennies de mauvaise gestion (encadré 3).
- L'accélération de la croissance en Afrique du Sud et au Nigeria devrait
avoir des répercussions très sensibles à travers la région, comte
tenu de la taille des deux économies.
- L'adoption de politiques macroéconomiques avisées contribue au
ralentissement de l'inflation, qui était en moyenne de 55 % par an dans la région
en1991– 94 et devrait, selon les projections, retrouver en 2001 un rythme proche de 10 %,
voire inférieur dans de nombreux pays, dont le Cameroun, la Côte d'Ivoire et le
Sénégal.
- Des pays comme le Cameroun, le Mali, le Mozambique, l'Ouganda, le Rwanda et la
Tanzanie poursuivent avec détermination les réformes structurelles
(encadré 4).
- Enfin, la démocratie continue à gagner du terrain sur le continent, ce
qui profite à la gouvernance. Les résultats économiques des
démocraties bien établies (Botswana, Maurice) sont nettement supérieurs
à la moyenne, et ceux du Bénin, du Mali ou du Mozambique sont meilleures
depuis l'avènement de la démocratie.
La faiblesse persistante des cours mondiaux des produits de base—et en
particulier du coton, du cacao, du café, du thé et des métaux—reste
cependant un frein à la croissance. La hausse des prix mondiaux du pétrole, qui
profite à certains pays, a aussi un impact défavorable sur les perspectives
à court terme de beaucoup d'autres économies.
Parallèlement, toutefois, on note aussi un certain nombre d'évolutions
défavorables qui tendent à maintenir la croissance en dessous de son potentiel
:
- L'épidémie de SIDA/VIH—qui, selon les Nations Unies,
toucherait 24,5 millions de personnes ou 8,6 % de la population adulte d'Afrique subsaharienne fin
1999—diminue la main-d'œuvre, y compris pour les emplois qualifiés ou les
secteurs
clés du service public (éducation, santé), et le coût des traitements
qu'elle implique s'ajoute aux pressions budgétaires. L'espérance de vie est
fortement réduite, ce qui décourage l'épargne, mine la croissance et
fragilise le tissu social de nombreux pays.
- Les conflits armés ont porté un coup sévère à
l'activité économique de nombreux pays de la région.
- L'expérience récente du Zimbabwe a montré à quel
point le dérapage des politiques monétaire et budgétaire peut être
soudain, et rappelé qu'il peut être fatal à la stabilité
macroéconomique et faire perdre au pays la confiance des investisseurs. La
«réforme foncière» a un effet de contagion sur la confiance des
investisseurs d'autres pays d'Afrique australe.
Quoi qu'il en soit, l'expérience récente montre clairement que les pays
d'Afrique subsaharienne qui ont mené une politique économique saine et
bénéficié d'une stabilité politique ont amélioré
leurs performances. Il n'en ont pas moins, bien sûr, de formidables défis à
relever pour concrétiser leur potentiel de croissance.
III. Accélérer l'investissement et la
croissance2
Il ne peut y avoir d'accélération de la croissance en Afrique subsaharienne si
l'investissement privé reste, comme aujourd'hui, bien inférieur à ce qu'il est
ailleurs dans le monde. La pénurie d'investissement privé est imputable
principalement aux anticipations de risque élevé et de faible rendement du capital
que partagent les investisseurs de la région et leurs homologues étrangers.
Réduire ce risque rendrait la détention d'actifs plus attrayante et aiderait à
relever les taux d'investissement et d'épargne intérieurs, donc à stopper
l'exode des capitaux. Pour ce faire, l'action des pouvoirs publics doit viser avant tout à
:
- Maintenir la stabilité macroéconomique. Les
gouvernement doivent faire fond sur l'acquis des dernières années pour
réduire encore les déficits budgétaires et, par conséquent, le risque
qu'un déséquilibre insupportable des finances publiques n'entraîne une
accumulation d'arriérés, un défaut de paiement ou un alourdissement de la
pression fiscale.
- Accroître l'efficience des systèmes fiscaux. Il faut
améliorer l'administration et le recouvrement de l'impôt, supprimer les
exonérations fiscales, résister aux groupes de pression et éradiquer la
corruption. En élargissant l'assiette de l'impôt, ces mesures permettront de mobiliser
des recettes suffisantes pour financer des dépenses importantes tout en abaissant les taux
d'imposition marginaux.
- Améliorer les infrastructures. La plupart des pays de la région
souffrent encore de graves carences dans les infrastructures de transport (ports, réseaux
routier et ferroviaire), de communications et de production d'énergie. Une meilleure
allocation des crédits budgétaires, conjuguée à l'ouverture de ces
secteurs à l'investissement privé et accompagnée de mesures favorisant la
concurrence, améliorerait cette situation et allégerait les charges
budgétaires liées à ces infrastructures.
- Privatiser les entreprises d'État. Les gouvernements des pays de la
région doivent mettre en œuvre une stratégie de désengagement de
l'État bien conçue et réglementée pour améliorer
l'efficience de l'économie, alléger le fardeau qui pèse sur le budget, mettre
fin aux ingérences politiques dans les décisions économiques et
encourager davantage l'innovation et le dynamisme.
- Investir dans le capital humain. Il est essentiel de mettre davantage
l'accent sur la formation de capital humain, en s'attachant en particulier à
redéployer les dépenses publiques vers le secteur éducatif, les soins de
santé primaires et les autres services sociaux.
- Consolider les systèmes financiers. Pour mieux mobiliser
l'épargne et développer l'intermédiation financière, il importe
d'assurer l'indépendance de la banque centrale vis-à-vis de l'État, de
mettre en place une réglementation et un contrôle plus efficaces du système
bancaire, de recapitaliser ou de liquider les établissements en difficulté et de
favoriser l'émergence d'un secteur bancaire privé concurrentiel ouvert aux
établissements étrangers.
- Adopter des taux de change réalistes. La production et les
exportations souffrent de la surévaluation de la monnaie nationale, qui fait obstacle
à la diversification économique et mine la résistance du pays à
d'éventuels chocs extérieurs.
- S'ouvrir aux échanges internationaux. Plusieurs études
montrent que la libéralisation des régimes de change et de commerce a permis
d'améliorer les performances économiques des pays de la région3. Diverses organisations régionales mettent en œuvre
des
accords qui visent à promouvoir la libéralisation du commerce
intrarégional et prévoient, entre autres, un abaissement des droits d'entrée
et une simplification du tarif douanier.
- Favoriser l'intégration régionale. L'intégration aidera
les pays de la région à surmonter le handicap que constitue la taille relativement
modeste de leur économie et à prendre une part plus active au commerce
mondial.
IV. Gouvernance et questions connexes
Les gouvernements des pays d'Afrique subsaharienne reconnaissent de plus en plus que
l'amélioration de la gouvernance s'impose pour accélérer la croissance et
assurer une plus grande équité; le FMI appuie résolument cette
évolution. En prenant des initiatives pour améliorer la gouvernance, ces pays
pourraient bien encourager aussi l'investissement privé, car ils atténueront, ce
faisant, les anticipations de risque élevé et de faible rendement du capital
déjà mentionnées, et aideront aussi à surmonter les
problèmes recensés à la section précédente. De nombreux
pays ont pris des mesures dans ce sens, qui contribuent d'ores et déjà à
l'amélioration de résultats économiques et au recul de la pauvreté.
Mais ces initiatives doivent à l'évidence être étendues et
approfondies dans des plusieurs domaines :
- Promouvoir la transparence et la responsabilité dans la gestion
deniers publics. Le Kenya s'est doté d'un code de conduite qui s'impose aux
principaux décideurs de l'administration publique et a renforcé les fonctions des
organismes chargés du contrôle des comptes publics (Office of the Controller et
Auditor-General). Le Mozambique a commencé à publier un rapport trimestriel
sur l'exécution du budget.
- Rationaliser la fonction publique et le cadre législatif. La Zambie a
engagé une compression des effectifs du secteur public et s'efforce de contenir la masse
salariale de la fonction publique afin d'accroître l'investissement public et de
développer les programmes sociaux. Le Cameroun a entrepris d'améliorer son
système judiciaire en renforçant les moyens humains et financiers affectés
à cette fonction et en publiant les décisions de justice.
- Éradiquer la corruption. L'Ouganda a engagé un plan de lutte
contre la corruption et s'est doté pour cela d'un ministère de l'éthique et de
l'intégrité. La Tanzanie a adopté une stratégie nationale
anticorruption. Au Nigeria, une législation réprimant la corruption a aussi
été votée et une commission indépendante vient d'être
créée pour en assurer la mise en œuvre; des mesures été
prises pour recouvrer les biens publics détournés à l'étranger et
poursuivre les responsables; enfin, on réexamine la loi contre le blanchiment d'argent pour
s'assurer qu'elle est conforme à la convention de l'OCDE contre la corruption des agents
publics.
V. Rôle du FMI
Le FMI insiste depuis des années sur l'importance de la stabilité
macroéconomique en tant que condition préalable à la croissance et au
recul de la pauvreté, et cette question restera au cœur de ses conseils de politique
économique. Parallèlement, toutefois, il a redoublé d'efforts pour s'assurer
que la politique sociale figure elle aussi dans les programmes qu'il appuie et dans les conseils qu'il
donne, étant entendu que c'est à la Banque mondiale qu'il appartient, au premier
chef, de préciser le détail des mesures à prendre pour lutter contre la
pauvreté et des autres initiatives d'ordre social.
Il reste certes beaucoup à faire pour renforcer les initiatives anti-pauvreté,
mais de nombreux pays ont engagés des efforts dans ce sens, qui privilégient les
dispositifs de protection sociale et le ciblage des dépenses publiques sur
l'éducation et la santé. Au Malawi, par exemple, les semences et engrais remis aux
plus démunis s'inscrivent dans le cadre d'un effort de protection sociale accrue mais
ciblée. De même, le Mozambique a réussi à cibler efficacement les
groupes vulnérables qui ont besoin d'être protégés. Au Ghana, les
efforts de déployés dans ce sens mettent l'accent sur les initiatives
communautaires, les programmes d'échange de nourriture contre du travail, la formation
et le réinsertion des fonctionnaires victimes des compressions d'effectifs et la prestation de
services de base (creusement de puits, dispositifs d'assainissement bon marché,
médicaments génériques, compléments d'alimentation, etc.). Une
étude récente sur les dépenses publiques d'éducation et de
santé montre que celles-ci ont continué d'augmenter, en termes réels
comme en pourcentage du PIB, dans les pays qui appliquent des programmes appuyés par
la FMI. Il apparaît aussi que les indicateurs sociaux se sont
améliorés : on enregistre un recul de l'illettrisme, une hausse des taux de
scolarisation dans le primaire et le secondaire (en particulier pour les filles), une diminution de la
mortalité infantile, une amélioration de l'accès aux soins de santé
et une progression généralisée de l'immunisation4.
La politique sociale constitue, avec les politiques structurelle et macroéconomique, un
volet des stratégies économiques indispensables pour accélérer le
recul de pauvreté. Ces différents volets sont inclus dans les programmes
appuyés financièrement par le FMI via la FRPC dans plus d'une vingtaine de pays
d'Afrique subsaharienne (sur les 41 pays qui peuvent bénéficier d'une aide
à ce titre). On s'attend à ce qu'un grand nombre de programmes appuyés
par la FRPC soient lancés d'ici la fin de l'année et en 2001, lorsque d'autres pays
auront élaboré leur DSRP. Il ressort des programmes déjà en
vigueur que :
- La qualité des données communiquées pour
établir les diagnostics sur la pauvreté est inégale, mais les estimations
fournies par les pays concernés ont permis néanmoins de se faire une idée
concrète de l'ampleur du problème; ces pays ont aussi mis au point des indicateurs
pour suivre les progrès de la lutte contre la pauvreté.
- Les pays concernés s'appliquent à recenser les réformes
structurelles pouvant avoir un impact direct sur la pauvreté. En règle
générale, celles-ci ont trait au secteur social et, sur le plan institutionnel, aux
réformes du secteur public, des infrastructures et de l'agriculture.
- Le processus en cours permet aussi de mieux comprendre comment renforcer le
processus de participation et impliquer un plus large éventail d'intéressés
dans la formulation des programmes.
Parallèlement à l'appui qu'il fournit par l'intermédiaire de la
FRPC, et en réponse au souhait émis par la communauté internationale en
septembre 1999, le FMI participe aux efforts déployés pour alléger
davantage la dette des pays qui adoptent une stratégie de lutte contre
pauvreté. L'initiative renforcée en faveur des PPTE, dont plus d'une
trentaine de pays d'Afrique subsaharienne pourraient bénéficier, vise à
apporter plus vite un allégement de la dette plus important à un plus grand
nombre de pays, et à renforcer le lien entre l'allégement de la dette et la
réduction de la pauvreté. Elle est appuyée par d'autres créanciers
officiels et privés, et en particulier par la Banque mondiale, qui coopère
étroitement avec le FMI dans le cadre de cette initiative.
Au cours de sa première année d'existence, l'initiative renforcée a
été plus lente à se concrétiser qu'on ne l'espérait au
départ, car des retards ont été pris dans l'adoption des stratégies
de lutte contre la pauvreté. Ceux-ci sont imputables en partie aux conflits armés,
aux troubles politiques et aux problèmes de gouvernance. Mais ils s'expliquent aussi par le
fait que la nouvelle formulation des stratégies anti-pauvreté repose sur la
participation, et qu'il faut du temps pour mettre sur pied un tel processus. La création d'un
comité conjoint Banque mondiale-FMI devrait permettre de progresser dans ce sens. Au
30 novembre 2000, 12 pays—dont 9 appartiennent à l'Afrique
subsaharienne—avaient reçu de la communauté internationale un engagement
à alléger leur dette dans le cadre de cette initiative, engagement qui se
concrétisera lorsqu'ils auront mené à bien leur programme appuyé
par la FRPC. Dix autres pays Afrique subsaharienne devraient pouvoir leur emboîter le pas
d'ici la fin de l'an 2000, et la plupart des autres pays de la région pourraient suivre d'ici la
fin de 2001.
Le FMI intensifie ses programmes d'assistance technique et de formation afin d'aider ces pays
à se doter de capacités suffisantes et à mener à bien les
réformes institutionnelles nécessaires, qu'il s'agisse de l'établissement de
statistiques conformes aux normes internationales de diffusion des données ou de
l'observation des meilleures pratiques de transparence budgétaire et de contrôle
bancaire. Des programmes d'assistance technique pluriannuels intégrés,
co-financés par d'autres donneurs d'aide, ont été conclus avec le Malawi,
le Nigeria et le Rwanda. Le FMI renforce par ailleurs son effort de formation des cadres africains
en privilégiant, dans ce domaine, les cours de l'Institut multilatéral d'Afrique qu'il a
ouvert en Côte d'Ivoire fin 1999. L'Institut du FMI s'est engagé lui aussi à
poursuivre ses activités de formation dans le cadre régional.
Outre la FRPC, qui reste le principal vecteur de l'aide concessionnelle apportée
à l'Afrique subsaharienne, le FMI est prêt à conclure de nouveaux accords
de confirmation ou accords élargis avec les pays qui peuvent bénéficier
d'une aide concessionnelle. Il a approuvé ainsi, à titre de précaution, un
accord de confirmation avec le Nigeria en août 2000, et a apporté une aide
d'urgence à des pays sortant d'un conflit—la République du Congo en
novembre 2000 et la Guinée-Bissau en janvier 2000—pour les aider à
rebâtir leurs infrastructures et reconstituer leurs capacités institutionnelles. Il
prévoit de conclure des accords de ce type avec le Burundi et
l'Érythrée.
Mais l'Afrique subsaharienne doit aussi bénéficier d'un meilleur accès
aux marchés des économies avancées, où elle rencontre toujours
un certain nombre d'obstacles sous forme de droits d'importation élevés, de
restrictions quantitatives aux échanges ou de subventions aux producteurs locaux. Les
pays africains peuvent sans doute profiter d'un avantage concurrentiel dans des domaines tels que
les échanges de produits agricoles (bruts ou transformées) et les textiles et
vêtements. L'amélioration de leur accès à d'autres secteurs des
marchés des pays développés permettrait aussi de diversifier les
exportations de la région.
Encadré 1. Réduction de la pauvreté et
allégement de la dette
dans les programmes appuyés par le FMI
Nouveau mécanisme de prêts concessionnels du FMI, la facilité
pour la réduction de la pauvreté et pour la croissance (FRPC) fait
expressément de la lutte contre la pauvreté l'objectif central de la politique
économique. Les pays qui font appel à ce mécanisme
élaborent un cadre de politique à moyen terme dans lequel s'inscrit leur
stratégie de lutte contre la pauvreté. Le FMI s'en remet à la Banque
mondiale et aux autres banques de développement multilatérales ou
régionales pour arrêter les priorités des dépenses publiques et en
évaluer le coût, puis les aide à faire cadrer ces dépenses avec les
financements disponibles.
La société civile doit participer à l'élaboration et au suivi
des stratégies de lutte contre la pauvreté. C'est cette participation qui doit
permettre de mobiliser, à travers le pays, un large consensus sur les objectifs prioritaires
et de faciliter l'adaptation des services publics aux besoins des plus démunis et la
responsabilisation accrue des pouvoirs publics. En améliorant leur appareil statistique, les
pays bénéficiaires devraient également pouvoir se doter de meilleures
indicateurs quantitatifs et qualitatifs de la pauvreté.
Il importe de réorienter davantage les ressources de l'État vers les
dépenses et les services publics ciblés sur les pauvres. Cela doit se traduire
par une augmentation des dépenses d'éducation, de santé et
d'infrastructure rurale. L'analyse de l'impact social et redistributif des politiques
macroéconomiques et structurelles doit se faire de façon plus systématique
avant la mise en œuvre de ces mesures, afin que les autorités puissent
prévoir des dispositifs de protection sociale efficaces.
Les progrès de la lutte contre la pauvreté doivent être suivi de plus
près. Cela suppose que l'on sélectionne et que l'on suive des indicateurs
mesurables, et que l'on dispose pour ce faire de capacités institutionnelles
adaptées. Il importe également de prévoir davantage d'évaluations
ex post de l'impact des réformes sur la pauvreté, et de tenir compte de
leurs résultats dans l'élaboration des nouvelles mesures. Enfin, la transparence et
la gouvernance doivent prendre une importance accrue.
Les relations entre les pays concernés et leurs partenaires extérieurs vont
se modifier de diverses manières. Il s'agit de respecter l'«appropriation»
du programme par le pays bénéficiaire en fondant l'appui financier du
FMI sur la stratégie formulée par les intéressés
eux-mêmes, et de reconnaître les bénéfices de cette prise en main du
programme par les bénéficiaires en faisant preuve de plus de souplesse quant
à la teneur des programmes.
La nouvelle approche prévoit l'octroi plus rapide d'un allégement plus
important de la dette à un plus grand nombre de PPTE. Dans le cadre de l'initiative
renforcée, la formulation du DSRP par le pays bénéficiaire fait partie
intégrante du processus, de manière à lier étroitement la
réduction de la pauvreté et l'allégement de la dette. Toutefois, cet
allègement ne peut aider efficacement un pays à combattre la pauvreté
qu'à condition d'étayer un programme énergique de lutte contre celle-ci.
Des flux d'aide plus importants et mieux ciblés, conjugués à un
accès élargi aux marchés des pays industriels, amélioreraient aussi
grandement les perspectives des pays pauvres. |
Encadré 2. Afrique du Sud
L'Afrique du Sud a fait, depuis quelques années, le choix d'un développement
axé sur le marché. Sa démarche se caractérise par la poursuite de
politiques monétaire et budgétaire saines, une libéralisation
poussée du commerce extérieur et le maintien d'un système financier sain
et robuste. Cela a permis à l'économie de résister à la contagion
des crises qui ont secoué les marchés émergents en 1997– 98 en ne
subissant que des perturbations mineures. Depuis, le pays a connu une reprise modeste
tirée par les exportations et facilitée par l'expansion de la production mondiale et
l'amélioration de sa compétitivité externe. La crise économique et
politique que traverse le Zimbabwe semble avoir eu une influence néfaste sur le climat
économique et sur la croissance réelle en l'an 2000, mais on s'attend une reprise de
l'activité en 2001.
Le redressement des finances publiques en l'espace de quelques années a
été spectaculaire; le déficit de l'État a été
considérablement réduit, en pourcentage du PIB, depuis 1992/93.
Parallèlement, les priorités budgétaires ont été
redéfinies en faveur des dépenses sociales (éducation, santé,
protection sociale) et l'administration de l'impôt a beaucoup gagné en
efficacité.
La politique monétaire ferme conduite par la banque centrale a entraîné
une forte baisse de l'inflation de base, qui est tombée de 18 % en 1991 à 8 % en
1999. Les autorités ont opté pour un ciblage formel de l'inflation, et leur objectif
est de ramener celle-ci dans une fourchette 3 à 6 % d'ici 2002.
À moyen terme, l'Afrique du Sud doit relever son taux de croissance potentielle de la
moyenne actuelle—3 à 4 % par an—à plus de 6 % afin de faciliter la
résolution de ses graves problèmes de chômage, de pauvreté et
d'extrême inégalité dans la distribution des revenus. Pour cela, elle doit
consolider les acquis de la stabilisation macroéconomique en accélérant les
réformes structurelles, notamment sur le marché du travail et dans le domaine des
privatisations. Elle encouragera ainsi les investissements extérieurs et intérieurs
qui sont indispensables pour placer le pays sur une trajectoire d'expansion plus rapide.
L'accélération de la croissance en Afrique du Sud exercera, au demeurant, un
puissant effet de catalyse sur le reste de la région.
La libéralisation du commerce international a joué un rôle important
dans l'amélioration des résultats économiques de l'Afrique du Sud au
cours de la période récente. L'entrée en vigueur, en septembre dernier, de
l'accord commercial passé entre les 14 membres de la Communauté du
développement de l'Afrique australe (SADC) est la mesure la plus récente prise
dans ce sens, même si cet accord ne crée pas une véritable zone de
libre-échange régionale. L'Afrique du Sud a offert d'abaisser ses droits de douane
à un rythme plus rapide que ses partenaires. |
Encadré 3. Nigeria
Le FMI a approuvé, en août 2000, un accord de confirmation d'un montant de
789 millions de DTS (soit environ 1,0 milliard de dollars) en faveur du Nigeria, à l'appui
du programme économique du gouvernement pour 2000– 01. Les autorités
nigérianes considèrent qu'il s'agit d'un accord de précaution, et n'ont donc
pas l'intention de procéder à des tirages à ce titre actuellement.
Un gouvernement issu d'élections libres est entré en fonction au mois de mai
1999. Il a pris une série d'initiatives pour rétablir la stabilité
macroéconomique, libéraliser le régime de change et combattre la
corruption. Soucieux de restaurer la discipline budgétaire, il a gelé le paiement des
engagements extrabudgétaires, suspendu les dépenses d'équipement et
annulé certains avantages dont bénéficiait le secteur pétrolier. Les
pressions se sont apaisées sur le marché des changes, l'inflation a brutalement
ralenti après le resserrement de la politique monétaire, et l'essor des recettes
pétrolières a permis de mettre un terme à l'amenuisement rapide des
réserves internationales brutes. Cependant, les signes d'une reprise soutenue et d'un
redémarrage de l'investissement privé tardent à se manifester.
La balance des paiements du Nigeria restera probablement fragile à moyen terme. Les
exportations de pétrole et de gaz ne suffisent pas à financer le déficit du
compte courant hors secteur pétrolier dans la mesure, surtout, où le pays ne
récupère que la moitié des recettes pétrolières brutes et
une faible part seulement du produit des exportations de gaz naturel en raison des
allégements fiscaux très généreux qui s'y attachent. De plus, si la
dette du Nigeria envers le Club de Paris ne devait être rééchelonnée
qu'à des conditions non concessionnelles, son service dépassera 30 % des
exportations de biens et services à moyen terme.
Pour que la situation s'améliore rapidement, il faudra maintenir une discipline
financière stricte étayée par des réformes favorables à
l'économie de marché et par un allégement de la dette. Sur le plan
structurel, priorité doit être donnée aux privatisations, à
l'abaissement et à la simplification du tarif douanier et au renforcement des infrastructures
essentielles. Sans cela, le rendement du capital restera insuffisant pour financer l'accroissement
nécessaire de l'investissement, et le déficit extérieur courant demeurera
élevé. Il pourrait même s'avérer insoutenable si l'allégement
de la dette ne peut être obtenu à des conditions plus
généreuses.
Afin de relever durablement le revenu par habitant et de faire reculer de façon
significative la pauvreté, les autorités devront améliorer très
sensiblement la gouvernance, renforcer leurs capacités institutionnelles et consolider les
programmes sociaux. Elles se sont attaquées résolument à la
corruption : les contrats passés par le précédent gouvernement ont
été revus (et parfois résiliés), des efforts
déterminés sont déployés pour recouvrer les sommes
détournées sur des comptes bancaires étrangers et une législation
anticorruption vient d'être votée. Les subventions aux produits pétroliers
ont été réduites, ce qui a permis de libérer des ressources pour la
lutte contre la pauvreté. |
Encadré 4. Exemples d'ajustement durable en
Afrique
Le Botswana est l'une des économies en développement les
plus performantes du monde. La croissance de la production par habitant, supérieure
à 7 % par an, a permis à ce pays - qui comptait parmi les plus pauvres de la
planète lors de son accession à l'indépendance en 1966—de figurer
aujourd'hui au nombre des économies à revenu intermédiaire et d'afficher
un revenu par habitant bien supérieur à la moyenne de l'Afrique subsaharienne.
Ces succès durables ont été facilités par une politique
monétaire et budgétaire prudente et par l'exploitation efficiente des ressources
minérales et leur utilisation pour stimuler l'investissement dans les infrastructures et les
services sociaux (éducation et santé), mais tiennent aussi à l'existence
d'autorités démocratiquement élues.
Le Cameroun a lancé un ambitieux programme d'ajustement structurel au
milieu de 1997, après une décennie de récession
caractérisée par l'extension et l'aggravation de la pauvreté, la
dégradation des infrastructures, l'accumulation d'arriérés internes et
externes considérables et une corruption endémique. Priorité a
été donnée à la stabilisation macroéconomique, à
la normalisation des relations avec les créanciers et au renforcement des capacités.
La réforme des finances publiques s'est concentrée sur la refonte du
système fiscal (avec notamment l'adoption de la TVA), la régularisation du
transfert de la totalité des recettes pétrolières au budget et
l'amélioration de la gestion des deniers publics, y compris via un redéploiement
des dépenses vers le secteur social. Sur le plan structurel, les autorités ont
réorganisé le système bancaire, privatisé diverses entreprises (dont
les chemins de fer nationaux), réglementé le secteur des
télécommunications, restructuré le secteur portuaire et
libéralisé le marché du pétrole. Elles ont placé la
gouvernance au cœur du programme de réformes, en insistant sur la passation des
marchés, les secteurs pétrolier et forestier et les travaux publics.
Le Mali a fait fond sur les gains de compétitivité
dégagés par la dévaluation du franc CFA en 1994 pour réduire
ses déséquilibres macroéconomiques et retrouver une croissance plus
robuste grâce à une politique de stabilisation énergique
accompagnée de vastes réformes structurelles. Le climat économique a
bénéficié de la simplification du cadre juridique et judiciaire ainsi que des
réformes engagées dans les secteurs financier et agricole (dans la filière
coton, en particulier) et des privatisations. La consolidation de la situation financière de
gouvernement, qui se poursuit, a été rendue possible par une politique de
dépenses judicieuse. Parallèlement, l'accès aux soins de santé de
primaires a été élargi et le taux de scolarisation relevé, pendant
que des mesures étaient prises pour élargir l'assiette de l'impôt, combattre la
fraude fiscale et renforcer les services fiscaux et douaniers.
Le Mozambique a accomplis des progrès considérables, depuis
1995 au moins, dans le démantèlement de l'économie d'État et
l'ouverture sur le monde extérieur et le marché. Les réformes structurelles
se sont concentrées sur l'adoption progressive de prix déterminés par le
marché : les taux de change et d'intérêt ont été
déréglementés et le contrôle des prix a quasiment disparu. Les
régimes de change et de commerce ont été libéralisés : les
obstacles non tarifaires et le contrôle des changes ont été levés, les
tarifs d'importation moyens abaissés et les taxes la plupart des taxes à
l'exportation supprimées. La réforme des finances publiques a porté sur
l'administration, la simplification et la restructuration du système fiscal et
l'amélioration de la gestion des deniers publics, tandis que les crédits
consacrés aux soins de santé primaires et au système éducatif ont
augmenté en termes réels. Le développement de secteur privé a
été facilité par l'abaissement des barrières administratives au
commerce et à l'investissement, la réforme juridique et judiciaire destinée
à renforcer la sécurité économique et la réforme
financière engagée pour développer le marché monétaire
et les instruments indirects de la politique monétaire.
L'Ouganda a enregistré des succès notables au cours de la
décennie écoulée, durant laquelle il a connu une croissance rapide
accompagnée d'une faible inflation et réussi à faire reculer sensiblement la
pauvreté en menant une politique budgétaire et monétaire prudente et en
procédant à diverses réformes structurelles. L'économie s'est
ouverte sur l'extérieur, toutes les interdictions d'importation ont été
levées, les tarifs applicables ont été abaissés et leur dispersion a
été réduite. La libéralisation des échanges a
été encouragée par la restructuration de l'assiette de l'impôt (la part
des taxes sur le commerce extérieur diminuant au profit de celles de la TVA et de
l'impôt sur le revenu). Le démantèlement du monopole d'État sur la
commercialisation du café a joué un rôle déterminant dans le recul
de la pauvreté. Les dépenses budgétaires consacrées à la
santé, à l'agriculture, au réseau routier, à l'alimentation en eau et
à l'assainissement ont augmenté ces dernières années en
proportion du PIB et par rapport aux dépenses de l'État. Les efforts consentis
pour réduire l'impact du SIDA/VIH ont été très efficaces.
Le Rwanda a enregistré de solides performances économiques
après la guerre et le génocide de 1994. La reprise été
facilitée par une politique budgétaire avisée, qui a jeté les bases
d'une reprise rapide des efforts de reconstruction destinés à permettre la
réinstallation des réfugiés et des personnes déplacées
revenues dans le pays, l'aide aux victimes du génocide, la démobilisation des
forces armées, le rétablissement de la sécurité et le renforcement
du système judiciaire. L'économie s'est ouverte, les tarifs extérieurs ont
été progressivement abaissés et une nouvelle structure tarifaire, plus
simple, est entrée en vigueur. La taxe sur les exportations de café
été supprimée et les prix aux producteurs de thé ont
été relevés. Une réforme de la fonction publique a
été engagée, qui a commencé par l'adoption d'une nouvelle grille
de salaires et un relèvement de ces derniers. Un programme de privatisation ambitieux a
été lancé et un guichet unique vient d'être ouvert pour faciliter
l'investissement privé. Enfin, le Rwanda a adopté un nouvelle législation
des banques commerciales.
La Tanzanie a rompu résolument, à partir du milieu des
années 80, avec le système antérieur d'économie étatique.
En 1995, les régimes de change et de commerce ont été
libéralisés, de même que le système financier; le contrôle des
prix a été supprimé et un grand programme de privatisations a
été lancé. Étayés par une politique budgétaire
rigoureuse, les résultats macroéconomiques enregistrés sur la
période 1996– 99 ont été généralement bons. Le
système de gestion de trésorerie adopté a favorisé la
maîtrise des dépenses publiques, et des progrès considérables ont
été accomplis sur le plan structurel : des réformes fiscales importantes ont
été lancées et un cadre de gestion monétaire et de
développement du secteur financier a été mis sur pied. La réforme
de la fonction publique a permis de rationaliser l'administration, de réduire ses effectifs et
d'engager une réforme des traitements. Le secteur pétrolier a été
totalement déréglementé et les subventions ont disparu. Enfin, le
gouvernement a concentré ses efforts sur l'amélioration de la gouvernance et
engagé des plans anticorruption sectoriels. |
Tableau 1. Afrique subsaharienne :
évolution et projections
macroéconomiques, 1982– 2001
|
|
1982– 91 Moyenne |
1991– 94 Moyenne |
1995– 98 Moyenne |
1999
|
2000 proj. |
2001 proj. |
|
Croissance du PIB réel
(en pourcentage) |
2,0 |
0,5 |
3,7 |
2,1 |
3,3 |
4,3 |
|
Croissance du PIB réel par habitant
(en pourcentage) |
– 1,0 |
– 2,0 |
1,2 |
– 0,4 |
0,7 |
1,5 |
Inflation (en pourcentage) |
22,9 |
54,8 |
26,2 |
14,9 |
16,1 |
10,6 |
|
Formation de capital fixe
du secteur privé
(en pourcentage du PIB) |
— |
11,8 |
11,8 |
11,4 |
11,0 |
11,9 |
Solde financier du secteur public,
dons non compris
(en pourcentage du PIB) |
– 6,8 |
– 8,1 |
– 4,8 |
– 4,8 |
– 2,4 |
– 3,0 |
Dette extérieure publique
(en pourcentage du PIB) |
— |
50,9 |
51,2 |
53,9 |
51,0 |
49,8 |
|
Dette extérieure publique
(en milliards de dollars) |
— |
151,1 |
169,0 |
174,7 |
168,4 |
169,9 |
|
Termes de l'échange (1990 = 100) |
— |
96,6 |
99,4 |
104,2 |
104,2 |
100,3 |
Source : Perspectives de l'économie
mondiale, octobre 2000 |
Tableau 2. Afrique subsaharienne :
croissance du PIB réel
dans les pays avancés dans les réformes,
1982– 2001
|
|
1982– 91 Moyenne |
1991– 94 Moyenne |
1995– 98 Moyenne |
1999
|
2000 proj. |
2001 proj. |
|
Botswana |
10,8 |
4,0 |
6,3 |
7,3 |
8,5 |
7,1
|
Cameroun |
1,3 |
– 3,1 |
4,6 |
4,4 |
4,2 |
5,3
|
Mali |
2,1 |
1,8 |
4,7 |
1,1 |
3,8 |
5,6
|
Mozambique |
0,1 |
3,2 |
8,6 |
8,8 |
6,1 |
10,4
|
Rwanda |
1,5 |
– 13,9 |
17,7 |
5,9 |
5,0 |
6,0
|
Tanzanie |
3,4 |
1,4 |
3,7 |
4,6 |
5,2 |
5,6
|
Ouganda |
3,4 |
4,8 |
7,2 |
7,8 |
5,0 |
6,1
|
Moyenne |
2,4 |
0,0 |
6,4 |
5,9 |
5,3 |
6,4
|
Afrique subsaharienne |
2,0 |
0,5 |
3,7 |
2,1 |
3,3 |
4,3 |
Source : Perspectives de l'économie
mondiale, octobre 2000 |
1Voir «La
Facilité pour la réduction de la pauvreté et pour la croissance
(FRPC)», Fiche technique du FMI, septembre 2000, http://www.imf.org/external/np/exr/facts/prgf.htm,
«Initiative d'allègement de la dette des pays pauvres très endettés
(PPTE)», septembre 2000, http://www.imf.org/external/np/hipc/hipc
.htmet «La logique de l'allègement de la dette des pays les plus
pauvres», Note de synthèse du FMI, septembre 2000, http://www.imf.org/external/n
p/exr/ib/2000/092300.htm.
2Voir Anupam Basu, Evangelos A. Calamitsis et
Dhaneshwar Ghura, «Promoting Growth in Sub-Saharan Africa: Learning What
Works,» août 2000, Note de synthèse numéro 23; Ernesto
Hernández-Catá, «Raising Growth and Investment in sub-Saharan Africa;
What Can Be Done?,» 2000, Document de synthèse du FMI, PDP/00/4; et
FMI, «Perspectives de l'économie mondiale» , octobre 1999,
Chapitre VI «Croissance de l'Afrique subsaharienne : résultats, obstacles et
conditions d'une amélioration.»
3Voir Arvind Subramaniam et al, "Trade and
Trade Policies in Eastern and Southern Africa," 2000, Etudes spéciales du FMI
no 196, ainsi que Jeffrey Sachs et Andrew Warner "Economic Reform and The Process of
Global Integration", Brookings Papers on Economic Activity, numéro 1, 1995.
4Voir Sanjeev Gupta et al, «Social Issues
in IMF-Supported Programs,» 2000, Etude spéciale du FMI n°
191.
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