France : Consultations de 2007 au titre de l'article IV, Conclusions de la mission du FMI

le 19 novembre 2007

La déclaration de fin de mission résume les constats préliminaires effectués par les représentants du FMI à l'issue de certaines missions (visites officielles, dans la plupart des cas dans les pays membres). Ces missions s'inscrivent dans le cadre des consultations périodiques (en général annuelles)au titre de l'Article IV des Statuts du FMI, ou sont organisées lorsqu'un pays demande à utiliser les ressources du FMI (à lui emprunter des fonds), ou encore dans le contexte des discussions sur les programmes suivis par le services du FMI, ou d'autres exercices de suivi de la situation économique.

Paris, le 19 novembre 2007

1. La France est en mouvement. L'élection d'un nouveau président et la nomination d'un gouvernement ouvertement réformateur offrent à la France l'occasion historique de renouer avec une croissance soutenue où chacun verrait ses opportunités accrues. Une ferme volonté réformiste, en véritable rupture avec le passé, associée à un rééquilibrage budgétaire plus marqué qu'il n'est envisagé actuellement, créerait un cycle vertueux combinant hausse de la croissance, assainissement des finances publiques et diminution du chômage.

2. Les priorités et la méthode du gouvernement en matière de réformes sont appropriées. Concernant l'enchaînement optimal des réformes, nous considérons qu'il faut chercher à engager, de manière concomitante, une « masse critique » de réformes dans un grand nombre de domaines, de manière à tirer profit des synergies ainsi créées et, en s'attelant au problème des rentes de situation existant sur plusieurs marchés, à répartir plus équitablement les coûts et les bénéfices. Les simulations réalisées par les services du FMI montrent qu'une telle stratégie, par opposition à une méthode graduelle et parcellaire, permettrait d'obtenir des gains de croissance nettement plus substantiels et plus rapides. Il est aussi essentiel d'agir vite. « Tout réformer en même temps,» cependant, n'est pas un viatique pratique : dans la mesure où des choix doivent être faits, il s'agit, comme cela est d'ailleurs prévu, de faire porter les initiatives en priorité dans les domaines dans lesquels les distorsions de marché sont actuellement les plus importantes, à savoir sur les désincitations à l'emploi et à la mobilité sur le marché du travail et sur les nombreuses entraves à la concurrence sur les marchés des services. Compte tenu de l'ampleur de la tâche, il pourrait être utile de créer un mécanisme de coordination interministériel en vue d'établir les priorités de réformes et de suivre les progrès réalisés.

3. La politique économique doit s'attaquer à la cause première du déficit de croissance dont souffre la France : la faiblesse du potentiel d'offre. Une majorité de Français estime que c'est la faiblesse du pouvoir d'achat qui freine la croissance. S'il existe effectivement des problèmes non négligeables de répartition des revenus, les causes profondes des difficultés que rencontre la France en matière de croissance ne proviennent pas d'une insuffisance de la demande en matière de consommation. En termes réels, le revenu disponible des ménages a en effet enregistré une progression substantiellement plus élevée en France que chez ses partenaires de la zone euro depuis 2000. Mais cette augmentation de pouvoir d'achat a contribué à aggraver le déficit de croissance : l'offre n'a pu satisfaire la demande intérieure, rendant nécessaire le recours aux importations, au détriment de la croissance. De fait, les performances macroéconomiques récentes de la France ont été particulièrement médiocres dans le domaine du commerce extérieur, dont les résultats, comparés à la fois au passé et aux partenaires de la zone euro, se sont dégradés, signe d'une baisse de la compétitivité et des rigidités de l'offre. Le programme du gouvernement ambitionne à juste titre de s'attaquer à ces dernières. Mais mettre dans le même temps l'accent sur la hausse du pouvoir d'achat, bien que compréhensible en termes d'économie politique, détourne l'attention du véritable problème et suscite des attentes irréalistes. Gagner le point de croissance qui fait défaut à la France suppose de se concentrer sans équivoque sur les insuffisances du pays en matière d'offre. Ce choix servirait davantage les efforts de pédagogie économique par ailleurs engagés par les autorités en conférant une cohérence d'ensemble à sa stratégie économique.

4. Les perspectives économiques laissent présager une poursuite de la croissance au rythme récemment enregistré, mais la situation mondiale fait peser certains risques sur l'économie française. La croissance du PIB, soutenue par une forte demande intérieure, devrait demeurer légèrement inférieure à 2 % en 2007, tandis que le solde extérieur resterait décevant. En 2008, la croissance française devrait, contrairement au reste de l'Europe, accélérer légèrement, grâce à l'effet incitatif sur la demande des mesures fiscales prévues dans la loi en faveur du travail, de l'emploi et du pouvoir d'achat (loi TEPA) votée l'été dernier. En revanche, le déséquilibre existant entre les secteurs intérieur et extérieur devrait perdurer. L'économie a bien résisté aux turbulences récentes sur les marchés financiers mondiaux, même si ces turbulences globales continuent à se manifester. L'environnement extérieur comporte d'autres risques significatifs de dégradation de la situation économique: un ralentissement plus marqué que prévu aux États-Unis et en Europe, une hausse supplémentaire du cours des matières premières et du prix de l'énergie et une poursuite de l'appréciation de l'euro. L'indice des prix à la consommation a augmenté sous la poussée de la forte hausse des cours du pétrole et des matières premières mais les tensions inflationnistes sous-jacentes semblent maîtrisées.

Programme de réformes — Libérer le marché du travail de ses entraves

5. L'utilisation du facteur travail en France étant parmi les plus faibles des pays de l'OCDE, "gagner plus" suppose incontestablement de "travailler plus". En France, le taux d'activité, le taux d'emploi et le nombre annuel d'heures travaillées sont largement inférieurs à la moyenne. La priorité accordée à la valeur travail par le gouvernement est donc tout à fait justifiée. Les maux dont souffre le marché du travail français, peut-être le principal obstacle à une croissance plus forte, sont bien connus. Le Président a bien résumé ces maux lors de son discours devant l'Association des journalistes de l'information sociale en septembre dernier. Nous en soulignons trois principaux.

6. L'amélioration du fonctionnement du marché du travail nécessite un changement radical de l'évolution du salaire minimum. La hausse tendancielle du SMIC, en renchérissant le coût du travail, a évincé les jeunes et les non-qualifiés du marché du travail. Elle a par ailleurs comprimé l'échelle des bas salaires et découragé le travail. Enfin, la politique des baisses de charges sociales, accordées pour tenter de compenser ces effets négatifs, a pesé lourdement sur les finances publiques. Par conséquent, nous saluons la décision de ne pas accorder de coup de pouce au SMIC en 2007 et suggérons qu'elle soit pérennisée. Il serait souhaitable que la réflexion menée actuellement sur les modalités de revalorisation du SMIC aboutisse à un système creusant l'écart entre, d'une part, le SMIC et le salaire médian, afin de récompenser la progression dans la carrière et entre, d'autre part, les revenus d'assistance et le SMIC, afin d'encourager le retour à l'emploi. Il serait utile d'envisager la création d'une « Commission des bas salaires », composée d'experts indépendants, chargée d'émettre une recommandation en matière de fixation annuelle du SMIC et de sensibiliser à l'impact d'un salaire minimum élevé sur le chômage et les finances publiques. À cet égard, la remise à plat prévue des minima sociaux et l'expérimentation du revenu de solidarité active devraient aboutir à une rationalisation du système et inciter davantage à la participation au marché du travail.

7. Les négociations en cours sur la modernisation du marché du travail devraient également rechercher un accord sur la réforme du cadre juridique actuel, très contraignant. Or nous constatons avec préoccupation que les négociations semblent plutôt partir du principe que le cadre juridique actuel est largement immuable, freinant ainsi de possibles réformes du contrat de travail. Une véritable rupture avec le passé et une amélioration réelle du fonctionnement du marché du travail nécessitent d'amender les dispositions juridiques régissant actuellement le licenciement économique, de manière à faciliter les ajustements de main-d'œuvre sans passer par la solution, coûteuse, du licenciement individuel. Le système judiciaire devrait moins intervenir dans les relations entre employeurs et salariés : l'issue des conflits en serait accélérée et moins aléatoire. Il serait par ailleurs important de dissocier cause de licenciement et versement d'indemnités de chômage.

8. L'existence de services de l'emploi efficaces est un facteur essentiel d'amélioration du fonctionnement du marché du travail et la fusion prévue entre l'ANPE et l'UNEDIC devra, pour réussir, être gérée avec soin. Nous nous félicitons que les autorités aient à nouveau placé le retour à l'emploi des chômeurs au cœur de leurs priorités, en proposant aux demandeurs d'emploi un accompagnement plus personnalisé assuré par une structure unique. L'expérience, en France (avec le PARE) et dans d'autres pays, prouve cependant que ces stratégies ne réussissent que si elles combinent de réelles incitations financières à la recherche d'un emploi (dégressivité des indemnités de chômage, par exemple), à une application stricte du principe de conditionnalité des prestations, dans le cadre d'un système explicite de droits et d'obligations du demandeur d'emploi.

Programme de réformes — Accroître la concurrence et le bien-être des consommateurs

9. La poursuite des réformes des marchés des produits et des services serait de nature à stimuler sensiblement la production potentielle et la compétitivité et améliorerait grandement le bien-être des consommateurs. L'action doit être guidée par le souci de renforcer la concurrence dans tous les secteurs de l'économie et doit s'appuyer sur deux grands axes.

10. La promotion de la politique de la concurrence en tête de liste des priorités de réformes pourrait être facilitée par la création d'une autorité de la concurrence unique, indépendante et dotée de pouvoirs renforcés. Nous saluons la priorité accordée à la concurrence, dont témoigne le chapitre spécial qui y est consacré dans le Rapport Economique, Social et Financier. Pour rendre cette préoccupation opérationnelle, il convient selon nous de modifier le cadre institutionnel, en mettant fin à la coexistence de deux entités (le Conseil de la Concurrence et la DGCCRF, rattachée au Ministère de l'économie, des finances et de l'emploi), et en particulier en retirant au ministère la responsabilité du contrôle des fusions-un partage des taches en décalage par rapport aux meilleures pratiques internationales. Nous nous associons pleinement à la proposition de la Commission Attali de fusionner ces entités au sein d'une autorité de la concurrence indépendante et dotée de pouvoirs renforcés, que nous investirions également du rôle de la promotion de la concurrence et de la surveillance des comportements de rente. S'agissant du contrôle des fusions, si les décisions finales tendent à relever, dans de nombreux pays, de la sphère gouvernementale, le processus se doit d'être transparent, de se fonder sur l'avis de l'autorité de la concurrence et de prévoir, en cas de décision ministérielle divergente, une obligation de motivation. En ce qui concerne les questions de concurrence transfrontalières, il convient de préserver en l'état les dispositifs actuels de l'UE, essentiels au bon fonctionnement du marché intérieur.

11. Des mesures visant à réformer certains marchés de services essentiels (notamment la distribution) pourraient anticiper et faciliter la mise en œuvre de la Directive Services de l'UE, qui offre une occasion de libéralisation à saisir pleinement. Nous nous félicitons des travaux préparatoires entrepris pour mettre en œuvre la Directive Services, examinant de manière approfondie toutes les réglementations. Lors de ce processus, il convient d'user avec la plus grande parcimonie des marges de manœuvre laissées par la directive et de supprimer totalement les barrières à l'entrée et les réglementations anticoncurrentielles dans l'ensemble des services. Il est également possible d'anticiper sur le calendrier prévu par la directive et de prendre des mesures immédiates dans plusieurs domaines — ainsi que l'entend le Gouvernement, notamment en matière de réglementations pléthoriques régissant le secteur du commerce de détail. Les mesures adoptées précédemment en ce domaine ont déjà permis de parvenir à des résultats en matière de formation des prix, au bénéfice manifeste du consommateur, et d'autres mesures sont prévues. Sur ce point également, nous approuvons la recommandation de la Commission Attali visant à lever l'interdiction de revente à perte et à instaurer la liberté des négociations commerciales entre distributeurs et fabricants. La sanction des abus de position dominante et de la fixation de prix prédateurs doit relever du droit commun de la concurrence appliqué par une autorité de concurrence aux pouvoirs renforcés, et non de dispositions complexes visant à intervenir au quotidien dans les relations entre fabricants et distributeurs. L'assouplissement des réglementations relatives au zonage, aux heures d'ouverture des commerces de détail et aux périodes de soldes constituent toutes de bonnes mesures, qu'il conviendrait d'adopter rapidement.

Programme de réformes — Améliorer les politiques fiscale et de dépense publique

12. Un élément essentiel des réformes menées en France doit être de rompre avec la tendance consistant à résoudre les difficultés économiques à l'aide des deniers publics. Cette tendance déjà ancienne a abouti à un système dans lequel, pour faire face à une distorsion économique, on recourt à la dépense et aux allègements fiscaux, ce qui crée souvent de nouvelles distorsions et, en tout état de cause, pèse sur les finances publiques. Ainsi, aujourd'hui, aussi bien les dépenses publiques que les prélèvements obligatoires demeurent, en pourcentage du PIB, à des niveaux obstinément élevés. Dans ce contexte, la révision générale des politiques publiques (RGPP) et la révision générale des prélèvements obligatoires (RGPO) sont particulièrement bienvenues dans la mesure où elles sont susceptibles de produire, à terme, des résultats tout à fait appréciables. Dans l'intervalle, il serait utile que le gouvernement déclare un moratoire sur toute nouvelle dépense fiscale et s'abstienne de répondre aux difficultés actuelles (comme le niveau élevé des prix du pétrole) par des allègements fiscaux.

13. La révision générale des politiques publiques peut grandement contribuer à garantir une réduction durable des dépenses publiques. Des efforts louables ont été déployés ces dernières années en vue d'améliorer la gouvernance des finances publiques et de maîtriser les dépenses, notamment via la Loi organique relative aux lois de finances (LOLF) et les audits de performance qui y ont été associés. La révision plus large qui est prévue permettra d'aller au-delà d'une rationalisation des coûts et d'un accroissement de l'efficacité à la marge, ceci de manière à parvenir à une amélioration plus fondamentale et durable au travers de la réduction des dépenses publiques en pourcentage du PIB et donc, à terme, du niveau des prélèvements obligatoires. Parmi les éléments-clés de la révision devraient figurer une réduction importante des dépenses fiscales et l'inscription dans les textes du principe selon lequel toute décision relative à la fiscalité ne peut être prise que dans le cadre de la Loi de finances. Une révision du rôle étendu de l'État dans l'économie est également essentielle et devrait, comme cela est prévu, inclure une suppression des fonctions redondantes aux multiples échelons des collectivités locales, qui aurait dû aller de pair avec la décentralisation. La fusion programmée des directions générales des impôts et de la comptabilité publique (DGI et DGCP), qui représente une modernisation bienvenue de la structure de l'administration fiscale, est également un bon exemple de rationalisation des services déconcentrés de l'administration. Enfin, la mise en œuvre de la RGPP permettra d'établir un cadre stratégique pour les dépenses publiques, étape essentielle vers une budgétisation pluriannuelle.

14. La révision générale des prélèvements obligatoires (RGPO) vient elle aussi à point nommé. Si des améliorations importantes ont été apportées ces dernières années au système de prélèvements et de transferts publics, les réformes successives qui ont été entreprises ont, de par leur caractère parcellaire, créé un système complexe et emprunt de fortes distorsions. La RGPO devrait permettre aux autorités de réévaluer, à la lumière des réformes adoptées dans d'autres pays en Europe, le type de système fiscal adapté aux défis de l'économie mondialisée du XXIe siècle. La réforme de la fiscalité doit être conçue dans un souci de simplification du système et de réduction des distorsions. Il s'agit de réformer les principaux impôts et taxes selon les axes suivants :

• Le taux de l'impôt sur les sociétés sera bientôt le plus élevé d'Europe. Un taux réduit, combiné à un élargissement de l'assiette, pourrait simplifier le système et le rendre plus équitable, et dissuader les transferts de bénéfices et la délocalisation des investissements dans des pays à fiscalité plus favorable.

• Nous recommandons une nouvelle simplification de l'impôt sur le revenu. La réorganisation des minima sociaux avec l'instauration du RSA pourrait contribuer à éliminer les distorsions nées de la complexité du système actuel. Il convient également de s'engager vers le prélèvement à la source de l'impôt sur le revenu. D'autres pays ont surmonté avec succès les difficultés liées à la période de transition.

• En matière de TVA, la France est en décalage de plus en plus prononcé avec les meilleures pratiques au niveau mondial. L'adoption d'un taux unifié et l'élargissement de l'assiette seraient susceptibles de générer des recettes au moins aussi élevées avec un taux global bien en deçà du taux actuel de 19,6 %, en réduisant les incitations à la fraude et en utilisant d'autres outils mieux adaptés à la poursuite des objectifs de redistribution.

• Nous nous félicitons de l'accent qu'il est prévu de mettre sur les questions environnementales dans le cadre de la réforme du système fiscal et de la volonté de la France de jouer un rôle de premier plan dans la lutte contre le changement climatique.

15. La révision des politiques publiques et celle des prélèvements obligatoires devraient améliorer durablement la situation des finances publiques, même si les effets ne se feront pleinement sentir qu'à moyen terme. Il ne faut pas compter sur des résultats à court terme. En 2008 et 2009, la consolidation des finances publiques devra être fondée sur des programmes de dépenses très restrictifs et la reconnaissance du fait que l'état actuel de ces finances ne permet pas d'envisager de nouvelles réductions d'impôts, un principe de base d'ailleurs énoncé dans le Rapport Pébereau sur la dette publique de la France.

Politique budgétaire — Renforcer les efforts d'assainissement des finances publiques

16. Le budget 2008 inclut certes plusieurs initiatives louables, mais il implique également une pause inopportune dans l'effort d'assainissement des finances publiques, conséquence des dispositions de la loi TEPA. Le budget 2008 prévoit une réduction sans précédent des effectifs de la fonction publique, élargit le périmètre de la norme d'évolution des dépenses de l'Etat, accroît le montant de la réserve de précaution, limite la croissance des transferts de l'Etat vers les collectivités locales et contient d'autres mesures visant à responsabiliser davantage les assurés sociaux et à décourager les départs anticipés à la retraite. Toutes ces mesures sont positives, mais les restrictions de dépenses associées sont largement neutralisées par les dispositions de la loi TEPA. Nous apprécions à sa juste valeur le message que le paquet fiscal entend transmettre : valorisation du travail, amélioration de la confiance et respect des promesses électorales-ingrédient essentiel du succès du programme de réformes. D'un point de vue économique et technique, néanmoins, la loi TEPA n'apporte à nos yeux qu'une réponse sous-optimale aux difficultés économiques structurelles du pays. Malgré quelques éléments positifs, comme la réforme du crédit d'impôt recherche, les effets les plus importants des dispositions de la loi s'exercent sur la demande. L'expérience internationale montre que les crédits d'impôt partiels sur les intérêts d'emprunts immobiliers se révèlent problématiques et ont un impact limité sur l'accession à la propriété et la croissance économique. La France avait d'ailleurs supprimé cette mesure il y a une dizaine d'années. Même si l'objectif d'assouplissement des 35 heures est louable, car il permet aux entreprises de bénéficier d'une plus grande souplesse et de réduire leurs coûts salariaux indirects, l'exonération fiscale des heures supplémentaires crée des effets d'aubaine considérables, est complexe à mettre en œuvre si l'on veut contrer les risques probables de fraude et ne profite qu'à ceux qui ont déjà un emploi. Au regard de ses coûts en termes de perte de recettes fiscales, ses effets sur l'accroissement du nombre d'heures de travail demeurent sujets à l'incertitude, et devront être suivis avec attention. Cette mesure ne représente qu'une solution de second ordre à une distorsion initiale créée par la réduction de la durée hebdomadaire du travail. Cette situation est emblématique du lien pernicieux entre, d'un part, des institutions du marché du travail rigides et, d'autre part, le budget : après avoir dépensé des sommes considérables pour la mise en œuvre des 35 heures, on mobilise à présent des fonds publics supplémentaires pour contourner cette mesure.

17. L'exécution du budget 2008 devra être attentive aux risques de dérapage. Ces risques proviennent avant tout de perspectives de croissance inférieures à celles sur la base desquelles le budget a été élaboré et des pressions continues à la hausse des dépenses, notamment de sécurité sociale (branches santé et assurance vieillesse). Si les risques que l'environnement mondial fait peser sur la croissance se concrétisaient, le déficit pourrait frôler dangereusement la limite fixée par le traité de Maastricht. Les autorités doivent demeurer vigilantes face à ces risques et prendre des mesures correctives en cours d'année si nécessaire.

18. L'assainissement des finances publiques et les réformes structurelles doivent être considérés comme des éléments complémentaires ; compte tenu de l'écart actuel avec l'objectif de moyen terme, le deficit public devrait être réduit d'au moins un ½ point de PIB par an. L'assainissement des finances publiques, fondé sur des réductions durables de dépenses, est un élément essentiel de la stratégie visant à stimuler la croissance, augmentant les marges de manœuvre pour l'introduction d'allègements fiscaux soutenables et créant l'espace économique nécessaire à la croissance du secteur privé. La réduction de l'endettement et du déficit doit demeurer une priorité nationale, telle qu'inscrite dans les documents budgétaires de l'an dernier. Le retour à un effort d'assainissement des finances publiques significatif renforcerait la crédibilité de la politique budgétaire, entamée par le report répété de l'objectif de moyen terme, et permettrait de commencer à constituer une « réserve » pour se prémunir contre les chocs futurs et le vieillissement de la population. Cela implique un retour à des objectifs de dépenses plus stricts pour l'Etat, la mise en œuvre d'une nouvelle réforme des retraites en 2008 comprenant notamment un allongement de la durée de cotisation (à cet égard, le degré de fermeté dont fait preuve le gouvernement sur l'allongement similaire de la durée de cotisation des régimes spéciaux s' avérera déterminant), des réformes supplémentaires de l'assurance maladie visant à etendre les franchises et à diminuer les pressions sous-jacentes sur les dépenses, et des engagements renforcés en matière de maîtrise des dépenses des collectivités locales. Le comité d'alerte dans le secteur de la santé a bien fonctionné et ce dispositif pourrait avantageusement être étendu à d'autres secteurs. Enfin, nous souhaitons mettre en garde contre les pressions sur les dépenses susceptibles d'être occasionnées par la création envisagée d'une cinquième branche de protection sociale (dépendance), alors que les mécanismes d'assurance individuelle privée devraient jouer ici le premier rôle.

Secteur financier — Renforcer la contribution du secteur financier à la croissance

19. Le système financier français a bien surmonté les turbulences récentes sur les marchés financiers mondiaux. La forte capitalisation du système, son exposition limitée au marché américain des prêts hypothécaires à haut risque et un dispositif de contrôle couvrant l'ensemble des établissements de crédit sont autant de facteurs qui ont contribué à cette relativement bonne résilience. Néanmoins, l'environnement actuel continue de poser des défis, car les conditions de marché ne sont toujours pas revenues à la normale, ce qui pourrait augmenter encore les coûts de financement des banques, réduire leur rentabilité et entraîner un resserrement du crédit. Des risques de contagion à d'autres marchés, comme ceux du crédit structuré et du financement des acquisitions à effet de levier (LBO) ne sont pas non plus à exclure. Il sera donc essentiel de ne pas relâcher la vigilance. Au niveau national, il conviendrait peut-être de réexaminer les pratiques commerciales des fonds « dynamiques » du marché monétaire. Dans d'autres domaines, nous nous félicitons de voir les autorités disposées à inclure la dimension européenne dans les statuts des autorités de contrôle et de constater qu'elles entendent relancer le processus Lamfalussy en préparation de la Présidence française de l'UE au second semestre 2008.

20. L'initiative « Paris-Place financière » offre une bonne opportunité pour poursuivre la modernisation des marchés financiers français. Le système financier français, en pointe dans certains secteurs (notamment les dérivés sur actions et la gestion d'actifs), continue néanmoins de porter l'héritage d'un système hautement réglementé et administré. Un secteur financier modernisé peut jouer un rôle moteur dans la croissance économique et il mérite à ce titre qu'on lui accorde une importance plus grande. Afin d'améliorer l'efficacité du secteur bancaire, les prêts et les plans d'épargne réglementés devraient être progressivement abandonnés et le rôle de l'Etat dans le secteur financier, réduit. La fin du monopole de la distribution du Livret A ouvrirait des opportunités en ce sens, notamment dans un environement où possibilité serait donnée à la Banque Postale de devenir une banque à part entière, et à terme privatisée. La révision programmée de la gouvernance de la Caisse des Dépôts constitue également une avancée positive.

DÉPARTEMENT DE LA COMMUNICATION DU FMI

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