Tunisie : Conclusions préliminaires de la mission de consultation au titre de l'article IV
le 16 juillet 2010
La déclaration de fin de mission résume les constats préliminaires effectués par les représentants du FMI à l'issue de certaines missions (visites officielles, dans la plupart des cas dans les pays membres). Ces missions s'inscrivent dans le cadre des consultations périodiques (en général annuelles) au titre de l'Article IV des Statuts du FMI, ou sont organisées lorsqu'un pays demande à utiliser les ressources du FMI (à lui emprunter des fonds), ou encore dans le contexte des discussions sur les programmes suivis par le services du FMI, ou d'autres exercices de suivi de la situation économique.
I. Introduction
1. La mission qui a visité Tunis du 2 au 15 juin 2010 tient à remercier vivement les autorités pour leur excellente collaboration et la grande qualité des discussions, leur accueil chaleureux habituel et leur disponibilité entière.
2. Malgré un contexte international difficile, la Tunisie a enregistré une bonne performance économique en 2009. Bien que la crise internationale ait affecté négativement les exportations, le taux de croissance du PIB réel a dépassé 3 pourcent en 2009 et il a été accompagné par une nouvelle amélioration des indicateurs de solidité financière. Grâce au programme de reformes entreprises au cours des dernières années ainsi qu’à l’adoption de politiques macroéconomiques prudentes, les autorités ont été en mesure d’atténuer l’impact de la crise avec des politiques d’appui judicieuses.
3. Les politiques macroéconomiques continuent d’être adaptées. La bonne performance économique a également été rendue possible grâce à la conduite de politiques monétaire et budgétaire appropriées, ainsi qu’à la poursuite d’une politique de taux de change flexible permettant au taux de change réel de rester en ligne avec ses fondamentaux. De plus, le secteur financier n’a pas ressenti les effets de la crise financière mondiale ce qui lui a permis de continuer à assurer le financement normal de l’économie.
4. L’orientation majeure à court terme de l’économie tunisienne est de continuer à poursuivre les politiques budgétaires et monétaires flexibles visant à soutenir la relance économique naissante dans un environnement international incertain et volatile. Malgré la reprise économique globale, d’importants risques à la baisse persistent, notamment chez les principaux partenaires commerciaux de la Tunisie. Dans ce contexte, l’évolution de l’environnement international devra être suivie de près afin de pouvoir répondre rapidement si les risques potentiels se matérialisent.
5. L’objectif principal de la Tunisie dans le moyen terme est la réduction du chômage et le renforcement de la résilience de l’économie tunisienne pour faire face aux chocs externes, notamment à travers la diversification des marchés des exportations. Le taux de chômage, déjà relativement élevé, a augmenté légèrement en 2009 en raison du ralentissement économique. Le chômage est particulièrement élevé chez les jeunes diplômés et représente le défi le plus pressant pour les autorités. Une augmentation du potentiel de croissance de l’économie à travers la diversification des marchés des exportations sera nécessaire afin de réduire le chômage à moyen terme.
6. La stratégie de la Tunisie pour atteindre ces objectifs se centre sur une amélioration de la compétitivité, en appuyant l’émergence de nouvelles sources de croissance et le maintien de politiques macroéconomiques saines. Face aux perspectives de faible croissance sur les marchés traditionnels des exportations de la Tunisie, notamment l’Union Européenne, les autorités envisagent de renforcer l’accès à de nouveaux marchés par une diversification géographique et de produits. Dans ce contexte, le programme présidentiel pour 2010-14 vise à mettre en place d’importantes reformes structurelles dans les domaines économiques et financiers, y compris la reforme de la sécurité sociale, du marché du travail, le renforcement et développement du secteur financier et la libéralisation du secteur des services.
II. Évolution de la situation économique et financière récente
7. La Tunisie surmonte l’impact de la détérioration de l’environnement économique international qui a été particulièrement aigüe chez ses principaux partenaires commerciaux.
• La croissance du PIB réel s’est sensiblement accélérée depuis la mi-2009. Après avoir chuté à 1,8 % (en glissement annuel) au premier trimestre de 2009, la croissance en termes réels s’est progressivement accélérée pour atteindre 4,5 % (en glissement annuel) au premier trimestre de 2010, suite à une reprise de la demande pour les exportations des secteurs manufacturiers (industries mécanique et électrique, et textile). Cette augmentation a été partiellement compensée par une décélération des secteurs énergétique et agricole. La demande intérieure a été soutenue par une consommation encore dynamique, soutenue par une augmentation continue du revenu par tête.
• L’inflation a augmenté d’une moyenne de 3,7 % en 2009 à 5,0 % en mai 2010 (glissement annuel) en raison d’une hausse des prix alimentaires. Cette hausse a été contenue par une politique monétaire appropriée et une modération de l’augmentation des prix dans les autres secteurs comme l’habitat, les transports et les services.
• Le déficit du compte courant, qui avait diminué en 2009, s’est sensiblement creusé au début de 2010 en raison d’une détérioration du solde commercial. L’amélioration du compte courant en 2009 a été principalement due à la chute des prix des matières premières et des importations de biens d’équipement, ainsi que le bon comportement des transferts et des services. Au premier trimestre 2010, le déficit courant s’est accru suite à une détérioration du solde commercial et une stagnation des recettes touristiques et des transferts des travailleurs tunisiens à l’étranger. Malgré une amélioration sensible des exportations, due à la reprise de la demande extérieure, les importations ont augmenté dans des proportions largement supérieures, reflétant la relance du secteur des réexportations et des importations élevées de biens d’équipements sans doute liées à un nouveau dynamisme de l’investissement. Malgré une augmentation de 5 % des IDE au cours des quatre premiers mois par rapport à la même période en 2009, les réserves extérieures ont baissé depuis fin 2009 mais demeurent à un niveau solide avoisinant les 9 milliards de dollars EU à fin mai 2010.
Projections | |||||||||
2008 | 2009 | 2010 | 2011 | 2012 | 2013 | 2014 | 2015 | ||
Production et revenus (variation en pourcentage) |
|||||||||
PIB nominal |
10.9 | 6.3 | 9.9 | 8.0 | 8.4 | 8.6 | 8.6 | 8.5 | |
PIB réel |
4.5 | 3.1 | 3.8 | 4.8 | 5.0 | 5.6 | 5.7 | 5.8 | |
Déflateur du PIB |
6.1 | 3.1 | 5.9 | 3.0 | 3.2 | 2.8 | 2.7 | 2.5 | |
Indice des prix à la consommation (IPC), moyenne |
5.0 | 3.7 | 4.8 | 3.5 | 3.3 | 3.1 | 3.0 | 3.0 | |
Épargne nationale brute (en pourcentage du PIB) |
22.1 | 21.8 | 22.9 | 23.0 | 23.7 | 24.1 | 24.3 | 24.2 | |
Investissement brut (en pourcentage du PIB) |
25.9 | 24.8 | 27.4 | 27.1 | 27.4 | 27.4 | 27.3 | 27.0 | |
Secteur extérieur (variation en pourcentage) |
|||||||||
Exportations de biens, f.à.b. (en $) |
26.6 | -24.8 | 1.7 | 4.6 | 6.2 | 5.7 | 5.4 | 6.1 | |
Importations de biens, f.à.b. (en $) |
28.7 | -21.9 | 7.1 | 3.0 | 5.1 | 5.0 | 4.8 | 5.2 | |
Exportations de biens, f.à.b. (volume) |
4.3 | -9.1 | 2.6 | 3.3 | 3.4 | 3.4 | 3.2 | 4.9 | |
Import de biens, f.à.b. (volume) |
6.9 | 1.2 | 3.6 | 3.0 | 2.6 | 3.1 | 3.1 | 3.9 | |
Balance commerciale (en pourcentage du PIB) |
-8.9 | -8.5 | -10.9 | -10.4 | -10.0 | -9.7 | -9.4 | -9.0 | |
Solde courant, dons non compris (en pourcentage du PIB) |
-3.8 | -2.9 | -4.5 | -4.1 | -3.7 | -3.3 | -3.0 | -2.7 | |
Investissement direct étranger (en pourcentage du PIB) |
4.8 | 3.5 | 3.4 | 3.9 | 4.1 | 4.1 | 4.1 | 4.1 | |
Termes de l'échange (détérioration -) |
0.8 | 8.0 | … | … | … | … | … | … | |
Taux de change effectif réel (dépréciation -) 1/ |
-0.6 | 0.0 | … | … | … | … | … | … | |
Administration centrale (pourcentage du PIB, sauf |
|||||||||
indications contraires) 2/ |
|||||||||
Recettes totales, hors dons et recettes des privatisations |
23.8 | 22.8 | 21.8 | 21.7 | 21.5 | 21.3 | 20.9 | 20.9 | |
Dépenses totales et prêts nets |
24.8 | 25.8 | 24.8 | 24.5 | 24.1 | 23.8 | 23.4 | 23.4 | |
Solde de l'administration centrale, hors dons et |
|||||||||
recettes des privatisations |
-1.0 | -3.0 | -3.0 | -2.8 | -2.6 | -2.5 | -2.5 | -2.5 | |
Solde de l'administration centrale, dons compris, |
|||||||||
hors recettes des privatisations |
-0.7 | -2.7 | -2.9 | -2.6 | -2.4 | -2.4 | -2.4 | -2.3 | |
Dette publique totale (extérieure et intérieure) |
43.3 | 42.8 | 43.3 | 43.1 | 42.6 | 41.9 | 41.1 | 40.4 | |
Dette publique en devises (pourcentage de la dette totale) |
60.8 | 58.5 | 56.0 | 52.9 | 49.9 | 47.3 | 44.4 | 41.7 | |
Monnaie et crédit (variation en pourcentage) |
|||||||||
Crédit à l'économie |
14.0 | 10.3 | 11.2 | … | … | … | … | … | |
Monnaie au sens large (M3) 3/ |
14.4 | 13.0 | 11.7 | … | … | … | … | … | |
Vitesse de circulation (PIB/M3) |
1.6 | 1.5 | 1.5 | … | … | … | … | … | |
Taux d'intérêt (taux du marché monétaire, en pourcentage, f.d.p.) 4/ |
5.2 | 4.3 | … | … | … | … | … | … | |
Réserves officielles |
|||||||||
Réserves officielles brutes (milliards de $ EU, f.d.p.) |
9.0 | 10.6 | 10.1 | 10.6 | 11.1 | 11.9 | 12.7 | 13.6 | |
En mois d'importations de biens et Services, c.a.f. |
4.4 | 6.7 | 6.0 | 6.1 | 6.1 | 6.2 | 6.3 | 6.4 | |
Dette extérieure totale |
|||||||||
Dette extérieure (milliards de $ EU) |
20.6 | 21.4 | 19.9 | 20.2 | 20.3 | 20.4 | 20.4 | 20.4 | |
Dette extérieure (en pourcentage du PIB) |
48.8 | 48.1 | 48.1 | 46.5 | 44.4 | 42.3 | 39.7 | 37.3 | |
Ratio du service de la dette (pourcentage des exportations de biens |
|||||||||
et service, non compris les revenus des facteurs) |
8.6 | 11.9 | 10.7 | 11.6 | 10.5 | 9.6 | 9.0 | 8.7 | |
Indicateurs du marché financier |
|||||||||
Indice boursier 5/ |
2,892 | 4,292 | … | … | … | … | … | … | |
Pour mémoire : |
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PIB aux prix courants (millions DT) |
55,297 | 58,768 | 64,591 | 69,781 | 75,668 | 82,171 | 89,227 | 96,779 | |
PIB aux prix courants (milliards de $ EU) |
44.9 | 43.5 | 43.5 | 44.7 | 47.0 | 49.7 | 52.7 | 56.1 | |
PIB par habitant ($ EU) |
4,346 | 4,171 | 4,122 | 4,194 | 4,362 | 4,565 | 4,793 | 5,055 | |
Taux de chômage (pourcentage) |
14.2 | 14.7 | … | … | … | … | … | … | |
Population (millions) |
10.3 | 10.4 | ... | ... | ... | ... | ... | ... | |
Taux de change : dinar/$ EU (moyenne) |
1.23 | 1.35 | … | … | … | … | … | … | |
Sources : autorités tunisiennes; estimations et projections des services du FMI. |
• Le secteur financier tunisien n’a pas ressenti les effets de la crise financière mondiale. Les banques ne dépendent pas de financements extérieurs et ont continué à bénéficier d’une dynamique soutenue des dépôts. Du côté du crédit à l’économie, après un léger ralentissement à la fin de 2009, celui-ci a repris en 2010, soutenu notamment par les prêts au secteur des services et les prêts immobiliers. La bourse de Tunis poursuit une croissance exceptionnelle, qui reflète de bons résultats financiers des sociétés cotées, notamment les banques, une liquidité abondante dans l’économie, et des alternatives de placements financiers encore relativement limitées en Tunisie. La capitalisation boursière demeure relativement faible par rapport à d’autres places de la région et a une marge de progression importante. Celle-ci sera favorisée par l’adoption d’incitations fiscales visant à encourager l’inscription en bourse des sociétés.1 • La BCT a poursuivi ses actions visant à éponger la liquidité abondante, en intensifiant ses opérations qui se sont traduites en 2009 par une ponction mensuelle moyenne de 844 MDT (contre 418 MTD en 2008). L’accentuation de la surliquidité dans les premiers mois de 2010 a amené la BCT à relever à deux reprises le taux de la réserve obligatoire, de 7,5% à 10% le 1er mars 2010, puis à 12,5 % le 1er mai. Ces actions, conjuguées à des entrées moins importantes de devises depuis le début de l’année, ont entrainé une résorption de la surliquidité. En ligne avec ces évolutions, le taux moyen du marché monétaire (TMM), après être descendu à 4,07 % en janvier, est remonté à 4,36 % en mai 2010. • Malgré une politique budgétaire plus expansionniste en 2009 dans le contexte de crise, qui a entrainé une augmentation du déficit budgétaire à 3 % du PIB, le taux d’endettement public a continué de diminuer. Les recettes (hors dons et recettes de privatisation) ont diminué de 1 point de pourcentage de PIB en 2009, en raison de la diminution des impôts directs et des recettes douanières, ainsi que des recettes non-fiscales. La baisse des cours mondiaux des matières premières et la mise en place d’un mécanisme d’ajustement des prix des produits pétroliers ont permis une baisse des subventions aux produits pétroliers et alimentaires de base. Dans le même temps, les dépenses en capital et prêts nets ont augmenté, reflétant les actions du gouvernement visant à atténuer l’impact de la crise mondiale, en accélérant des projets d’investissement public et en fournissant un appui direct aux entreprises exportatrices affectées par la crise. Le déficit budgétaire a été entièrement financé sur le marché intérieur. Malgré le creusement de ce déficit, le taux d’endettement public a continué de baisser pour s’établir à 42,8 % en 2009. Au cours des quatre premiers mois de 2010, une bonne performance des recettes budgétaires, conjuguée à une maîtrise des dépenses (en particulier des dépenses en capital), ont conduit à un excédent budgétaire important. Dans ce contexte, les amortissements des bons du Trésor ont été supérieurs aux nouvelles souscriptions. III. Situation mondiale, perspectives et politiques économiques A. Situation mondiale et perspectives 8. Après la récession enregistrée en 2009, la reprise de la croissance économique mondiale s’est dessinée plus rapidement que prévu. En 2010 et 2011, sur la base des projections WEO d’avril 2010, l’activité globale augmenterait de 4 ¼ pourcent par an, après une contraction de ½ pourcent l’année dernière. Cette reprise est cependant très différenciée suivant les pays, avec des économies émergentes en Asie très dynamiques, et une croissance plus soutenue aux Etats-Unis qu’en Europe ou au Japon. L’accès au crédit et les conditions financières restent plus difficiles qu’avant la crise, mais les flux de capitaux des économies avancées vers beaucoup de pays émergents ont fortement repris. 9. Compte tenu de l’orientation géographique des transactions courantes de la Tunisie, la croissance chez les pays partenaires de la Tunisie reprendrait de manière plus graduelle, pour atteindre 1,2 % en 2010 et 1,5 % en 2011, et est sujette à des risques baissiers. L’Union européenne joue un rôle prééminent pour la Tunisie, représentant 76 % des recettes d’exportations de biens, 84 % des recettes de tourisme, 88 % des transferts des tunisiens à l’étranger et 73 % des entrées d’investissements directs étrangers au cours de la période 2007-08. Les perspectives de reprise plus graduelle en Europe restent soumises à des risques baissiers importants, notamment si la crise de la dette souveraine dans certains pays se détériore et si les plans d’ajustement budgétaires mis en place dans plusieurs pays européens pèsent plus que prévu sur la demande intérieure. D’un autre coté, la dépréciation récente de l’euro pourrait dynamiser les exportations de la zone euro, y compris dans des secteurs importants pour les exportations tunisiennes. 10. Dans ce contexte de reprise graduelle et incertaine, les politiques macroéconomiques de la Tunisie devront pouvoir s’adapter aux évolutions de l’environnement international pour accompagner au mieux une amélioration de la croissance tunisienne. Le Comité de suivi de la conjoncture internationale récemment créé par les autorités jouera un rôle important pour maintenir une vigilance accrue et alerter les autorités compétentes sur les besoins d’adaptation des politiques macroéconomiques et financières. Il est rassurant de constater que les autorités disposent encore de certaines marges de manœuvre, aussi bien en matière de politique budgétaire que monétaire, pour faire face aux risques extérieurs éventuels. 11. L’objectif d’une croissance de 3,8% en 2010 pourrait être réalisé, à condition qu’il n’y ait pas d’autres effets retardés de la crise mondiale. La croissance devrait être soutenue par une reprise de l’activité industrielle et des investissements. Après une forte croissance des importations de biens d’équipement au cours des premier mois de 2010, la reprise des exportations et investissements directs de l’étranger devrait se poursuivre également. De plus, contrairement à des destinations touristiques concurrentes et à certains pays de la région, la Tunisie a connu une stabilité de ses recettes touristiques et des transferts des tunisiens à l’étranger. Néanmoins, le déficit du compte courant devrait se creuser en 2010, alors que de nombreuses économies émergentes devraient connaître une réduction des déficits du compte courant en 2010 et 2011. 12. La croissance à moyen terme chez les partenaires traditionnels de la Tunisie serait modérée (1 ½ à 2 %) et ne constituerait pas une source de demande extérieure pour la Tunisie aussi dynamique qu’avant la crise. Dans ce contexte, la croissance tunisienne pourrait atteindre une moyenne d’environ 5 % sur 2010-14, à condition que les politiques et réformes programmées par les autorités visant au développement de nouveaux marchés et à l’émergence de nouvelles sources de croissance dans des secteurs à haute valeur ajoutée puissent porter leurs fruits rapidement. 13. L’environnement international très incertain fait peser des risques sur ces projections. D’une part, il ne peut être exclu que la récession mondiale et la dégradation du chômage chez les partenaires européens pourraient entraîner une baisse des recettes touristiques au cours des mois de haute et arrière saison et des transferts des tunisiens à l’étranger. D’autre part, une chute de la demande intérieure au sein des partenaires européens pourrait réduire la demande d’exportations tunisiennes. B. Politiques macroéconomiques 14. La mission appuie les orientations des politiques macroéconomiques de la Tunisie, qui ont réussi à minimiser à court terme l’impact de la crise sur la croissance et le chômage. Ceci a été possible grâce à la prudence dans la gestion macroéconomique passée qui a permis de dégager des marges de manœuvre suffisantes pour faire face à la détérioration de l’environnement international. Néanmoins, le fléchissement des perspectives de croissance chez les principaux partenaires commerciaux notamment au sein de l’Union Européenne représente un défi majeur à moyen terme pour le maintien des taux de croissance élevés et la réduction du chômage en Tunisie. Dans ce contexte, la mission se félicite des efforts des autorités pour poursuivre les politiques de réformes visant à la diversification de l’économie et l’accès à de nouveaux marchés pour les produits et services tunisiens. Politique budgétaire 15. La mission appuie l’orientation budgétaire des autorités en 2010, qui vise à maitriser l’évolution du déficit tout en poursuivant le soutien à l’activité économique et en maintenant des marges de manœuvre pour pouvoir faire face aux risques de l’environnement international. La loi de finances 2010 maintient une politique budgétaire relativement expansionniste, afin d’éviter qu’un retrait du stimulus budgétaire engagé en 2009 n’affaiblisse la reprise de l’activité économique. Le déficit budgétaire devrait se maintenir à environ 3 pourcent du PIB en 2010. Une baisse relative des recettes budgétaires sera compensée par une baisse des prêts nets. La mission encourage les autorités à rester vigilantes et prêtes à réajuster la politique budgétaire si la situation des partenaires européens se détériore. A cette fin, le budget 2010 s’est doté d’une flexibilité accrue avec un volant de dépenses non-allouées d’environ 1 ½ pourcent du PIB qui pourrait être utilisé en cas de besoin pendant le deuxième semestre de 2010. Les besoins de financement du déficit pourront être encore couverts par le marché intérieur. Malgré la maitrise du déficit budgétaire prévue en 2010, le taux d’endettement public pourrait augmenter légèrement à 43 ½ pourcent du PIB en raison de l’effet d’une éventuelle appréciation du dollar EU et du yen par rapport à l’euro et au dinar. 16. Avec la reprise économique, la nécessité de maintenir le stimulus budgétaire disparaîtra et permettra de réengager la consolidation budgétaire à partir de 2011 afin de consolider la tendance décroissante du taux d’endettement public. Ayant fortement baissé au cours de la dernière décennie, le taux d’endettement public se situe légèrement sous la moyenne pour les marchés émergents, et a convergé vers la moyenne pour les économies émergentes hors de la région MENA avec des notations souveraines similaires, tout en restant supérieure à la moyenne pour ce groupe de pays. L’objectif des autorités de réduire la dette publique à 40 pourcent du PIB en 2014 permettra de maintenir des marges de manœuvre budgétaires en cas de besoin. Pour l’atteindre, une réduction progressive du déficit du déficit budgétaire à environ 2 ½ pourcent du PIB d’ici 2014 devrait être accompagnée d’opérations de repaiement anticipé de dette. Si la conjoncture internationale s’avère meilleure qu’attendu, les autorités pourraient envisager un objectif un peu plus ambitieux de réduction du déficit budgétaire à moyen terme, tout en assurant un volume suffisant de dépenses d’investissement public pour soutenir les réformes visant à augmenter le potentiel de croissance de l’économie tunisienne. 1/ MENA-EM: Egypte, Jordanie, Liban, Maroc, Syrie, Tunisie, Turquie.2/ Non-MENA EM: Botswana, Brésil, Bulgarie, Croatie, Estonie, Hongrie, Inde, Kazakhstan, Lituanie, Malaisie, Mexique, Pérou, Pologne, Russie, Afrique du Sud, et Thaïlande. Source: WEO Database. 17. La mission appuie le projet des autorités de mettre en place des changements dans la structure de l’imposition à moyen-terme afin de créer un régime d’impôts plus favorable aux entreprises et à la production. La réforme fiscale pourrait s’attacher à réduire la pression fiscale sur les entreprises, y compris la taxe pour la formation professionnelle, tout en compensant l’impact de baisse des recettes par une augmentation des taxes sur la consommation et un élargissement de leur assiette par l’élimination d’exonérations. Les autorités entendent également poursuivre la réforme des droits de douane engagée depuis plusieurs années, en réduisant le nombre de taux de cinq à quatre d’ici 2014 et en ramenant à 15 pourcent le taux maximal.2 18. Une autre composante essentielle de la consolidation budgétaire à moyen terme devrait être une baisse relative des subventions aux produits de base et carburants. Les autorités ont l’intention de limiter l’enveloppe totale annuelle des subventions à 1 500 millions de dinars par année (caisse de compensation, carburants et transports), afin que sa part dans le PIB décroisse progressivement. La mission appuie cette initiative et encourage les autorités à poursuivre leurs efforts visant à mieux cibler les transferts et subventions vers les couches les plus vulnérables de la population. 19. Un élément-clé de la stratégie visant à contenir la pression sur les dépenses publiques à moyen terme demeure la reforme du système de sécurité sociale. Les autorités sont pleinement conscientes de ce fait et des discussions avec les partenaires sociaux sont engagées sur les moyens de réformer les régimes de retraite en ajustant les principaux paramètres. Elles ont l’intention de présenter au Parlement, si possible au cours de l’année 2010, un projet de loi conçu pour garantir la viabilité financière des régimes des retraite lors des 20 prochaines années, ainsi que pour s’assurer que ces régimes soient capables d’honorer leurs obligations financières sans faire appel à des augmentations de taxes ou à un financement budgétaire. 20. La mission appuie également les différentes réformes structurelles envisagées par le ministère des finances afin de renforcer la gestion des finances publiques. Ces réformes incluent l’adoption des normes comptables internationales en matière de présentation du budget et comptes budgétaires et d’un cadre des dépenses à moyen terme. Les autorités ont également l’intention de créer une Caisse de Dépôts afin de renforcer l’efficacité de l’utilisation des liquidités actuellement logées auprès du Trésor pour soutenir les efforts d’investissement. Enfin, elles envisagent de mettre en place l’Agence du Trésor – une structure indépendante ayant comme mission la gestion opérationnelle de la dette publique et la réduction des coûts d’emprunt. Les services du FMI se tiennent prêts à examiner toute demande d’assistance technique pour appuyer ces réformes. Politique monétaire et du taux de change 21. Le succès de la BCT dans ses actions visant à stériliser la liquidité abondante doit être consolidé en 2010 par un suivi de près de la situation, afin de parer à une remontée éventuelle des pressions inflationnistes ou une croissance exagérée du crédit. L’augmentation des rentrées en devises, liée à une reprise des exportations de marchandises et de services, ainsi qu’une plus grande présence sur le marché des émetteurs de titres obligataires, en premier lieu le Trésor, sont des facteurs qui vont influencer la balance de la liquidité bancaire pendant la deuxième partie de 2010. 22. La mission note par ailleurs que la performance de la BCT en matière d’opérations de politique monétaire continue de s’améliorer. Dans le cadre de la modernisation des instruments du marché monétaire et afin de diversifier ses outils de gestion de la liquidité, la BCT a introduit au début de 2009 des facilités permanentes de prêt et de dépôt à 24 heures à l’initiative des banques, qui permettent à ces dernières de couvrir leurs besoins ou de placer leurs excédents temporaires de liquidité. Les taux de ces facilités fixés à 50 points de base de part et d’autre du taux directeur ont permis une plus grande flexibilité du taux du marché monétaire. Avec la réduction récente de la surliquidité, le marché monétaire pourrait devenir encore plus actif et renforcer le rôle du taux directeur comme instrument central de la conduite de la politique monétaire. 23. La modernisation du cadre de conduite de la politique monétaire doit se poursuivre afin d’assurer les conditions nécessaires au ciblage explicite de l’inflation. Par rapport à cet objectif, les efforts de la BCT sont concentrés sur la mise en place des capacités nécessaires, ainsi que sur la compréhension des mécanismes de transmission. La BCT a démarré un projet de jumelage avec des banques centrales européennes financé par la Commission Européenne, afin de bénéficier de l’expertise de ces banques centrales des pays européens en matière d’outils analytiques et de systèmes d’information liés au processus opérationnel de ciblage de l’inflation. 24. Dans ce contexte, des actions visant à flexibiliser davantage les mécanismes de transmission de la politique monétaire par les taux d’intérêt, ainsi qu’à identifier une cible d’inflation adaptée, pourraient être engagées. La mission considère également que l’amélioration des outils de communication de la Banque Centrale représente un moyen efficace d’influencer les anticipations des marchés. Dans ce sens, la BCT devrait envisager la publication périodique d’un rapport sur la politique monétaire, ainsi que d’un rapport sur la stabilité du système financier. 25. Les autorités sont engagées à mettre en œuvre les objectifs du programme présidentiel, qui prévoit, entres autres, la convertibilité du dinar et l’ouverture du compte de capital à l’horizon de l’année 2014. Elles s’attacheront dans un premier temps à mettre en place les principaux préalables, y compris la plus grande solidité financière du système bancaire et l’approfondissement du marché des changes. Dans un deuxième temps, la libéralisation des transactions en capital pourrait être graduellement achevée, tout en gardant certains garde-fous afin d’éviter des mouvements de capitaux déstabilisants. 26. La mission considère que le ciblage de l’inflation, la convertibilité du dinar et l’ouverture du compte de capital sont des évolutions nécessaires et opportunes, qui permettront à l’économie tunisienne d’accroitre son potentiel de croissance. Elle appuie l’approche graduelle envisagée par les autorités tout en soulignant qu’il serait nécessaire d’avancer sur plusieurs fronts afin de favoriser l’émergence des outils de marché nécessaires pour permettre aux régulateurs et aux agents économiques de s’adapter. Les services du FMI se tiennent prêts à examiner toute demande d’assistance technique dans ces domaines. 27. La politique du taux de change demeure guidée par l’objectif de moyen terme d’un taux de change flottant et de diminuer les interventions de la BCT sur le marché des changes. Celles-ci sont demeurées relativement stables en 2009 et 2010 et ont été opérées dans les deux sens. Dans un contexte de fortes variations entre les principales devises, la politique de taux de change suivie a conduit à une stabilisation du taux de change réel du dinar, qui reste en ligne avec ses fondamentaux. Stabilité du système financier 28. Les indicateurs de rentabilité et de solvabilité du système bancaire ont continué de s’améliorer en 2009, poursuivant ainsi une tendance amorcée depuis plusieurs années. En particulier, le taux de créances classées s’est abaissé à 13,2 % à fin 2009 et leur provisionnement a été amené à plus de 58 % en moyenne. Cette situation globale continue de recouvrir des situations individuelles différenciées. La Direction générale de la Supervision bancaire adopte une approche individualisée afin d’amener les banques à produire des plans concrets visant à réduire leur taux de créances douteuses et à augmenter les provisions. Pour sa part, la Direction générale de la Stabilité financière et de la Prévention des risques assure un suivi rapproché des crédits accordés au niveau de chaque secteur. Ces efforts visant à assurer un encadrement efficace des établissements de crédit contribueront à poursuivre la tendance de diminution des créances douteuses dont le niveau, malgré les progrès substantiels réalisés, demeure encore relativement élevé.
29. Le programme présidentiel prévoit le renforcement du système financier. Ce programme s’articulera autour de quatre axes (consolidation des fondamentaux, bancarisation et services bancaires, restructuration du système bancaire, et présence bancaire à l’étranger – voir encadré). Les objectifs prévoient en particulier d’augmenter le capital minimum des banques à 100 millions de dinars et abaisser le taux des créances classées à moins de 7 % en 2014, en conférant davantage d'efficience à la fonction de recouvrement et en procédant au traitement dynamique du portefeuille des créances classées. D’autre part, le provisionnement devrait être facilité par la mesure d’exonération fiscale totale et définitive des provisions, introduite en 2010. Les autorités ont également décidé de mettre en œuvre le dispositif de Bâle II, en commençant par l’approche standard, ainsi que de mettre en place un fonds de garantie des dépôts, financé par les banques.
30. La mission note les progrès substantiels enregistrés dans le domaine de la supervision bancaire et de l’assainissement du système financier et encourage les autorités à poursuivre dans cette voie. Une évaluation plus prospective du risque, notamment dans le contexte de l’adoption des normes de Bâle II, sera bénéfique. La mission encourage les autorités responsables de la supervision bancaire à formaliser et systématiser davantage les évaluations de robustesse du système bancaire à des scénarios adverses (stress-tests). L’enrichissement de la base d’informations, en développant entres autres des indices des prix pour différentes catégories d’actifs, aidera également les autorités à mieux identifier les risques potentiels. C. Politiques Structurelles et Autres Questions 31. Malgré la crise économique internationale, la Tunisie continue de considérer la politique d’ouverture de son économie comme un axe fondamental pour atteindre des taux de croissance élevés. Le but des autorités est d’accroître les échanges commerciaux au-delà des ses marchés traditionnels afin de réduire la dépendance de la Tunisie vis-à-vis de l’Union Européenne, qui représente 80 pourcent des exportations et qui risque d’être moins porteuse au cours des toutes prochaines années. A cet effet, la Tunisie a conclu un accord commercial préférentiel avec l’Union économique et monétaire ouest africaine (UEMOA), et poursuit des négociations avec la Communauté économique et monétaire de l’Afrique centrale (CEMAC), et plusieurs pays de l’Afrique subsaharienne et du Proche et Moyen Orient. Les négociations bilatérales de la Tunisie avec l’Union européenne se poursuivent pour élargir l’Accord d’Association aux services et aux produits agricoles et agroalimentaires. A cet effet, le gouvernement a commencé à mettre sur pied un programme de mise à niveau des services aux entreprises, de santé, de transport, et des secteurs des technologies de l’information et des télécommunications pour accroître leur productivité avant leur ouverture à la concurrence internationale. La Tunisie est également activement engagée dans le processus d’intégration du Maghreb. La mission encourage le gouvernement à poursuivre toutes ces initiatives qui permettront de diversifier les échanges commerciaux de la Tunisie et saisir de nouveaux créneaux générateurs de croissance. 32. Dans le cadre des programmes de réforme à moyen terme la Tunisie continue à parier sur la mise en œuvre de politiques visant à améliorer le climat des affaires. La modernisation de l’administration douanière se poursuit avec un nouveau système d’information et la simplification du tarif douanier. Les améliorations des procédures douanières, qui se sont déjà traduites par une réduction des délais de dédouanement, se poursuivent avec le nouveau Code des Douanes, entré en vigueur en 2009. Toutes ces réformes ont permis de placer la Tunisie à la 41ème place dans la classification de facilitation du commerce extérieur du Forum économique mondial de Davos. Ces avancées, qui se poursuivent dans le cadre des deux nouveaux programmes d’appui à l’amélioration du climat des affaires et de la compétitivité, financés par la Banque mondiale, la Banque africaine de développement et la Commission européenne, contribueront à maintenir et améliorer l’attrait de la Tunisie pour l’investissement. 33. La Tunisie considère qu’une nouvelle phase de diversification de son économie doit se baser sur le développement des secteurs de services à haute valeur ajoutée, en utilisant mieux la main d’œuvre qualifiée disponible. Pour développer ces secteurs, les autorités ont initié des réformes dans le système universitaire visant à former davantage de spécialistes en sciences et technologies. En effet, la réforme du système éducatif fait partie d’un programme ambitieux pour développer le secteur de services à plus haute valeur ajoutée (technologies de l’information, services de santé, logistique et services aux entreprises). Cet effort sera appuyé par un programme avec la Banque Mondiale pour mettre à niveau des entreprises du secteur. Les autorités vont également accompagner la modernisation du secteur des services par un programme de développent des infrastructures qui facilitera l’installation de nouveaux investisseurs. 34. La mission se félicite de la décision des autorités de publier, comme à l’accoutumée, cet aide-mémoire et de la participation de la Banque centrale dans l’Exercice de Compilation Coordonné pour les Indicateurs de Stabilité Financière (“Coordinated Compilation Exercise for FSIs”). 35. Il a été convenu que la prochaine mission au titre de l’article IV aura lieu en mai-juin 2011. |
Tableau 1. Principaux indicateurs économiques et financiers, 2008–15
1 Celles-ci incluent la réduction de l’impôt sur les bénéfices de 35 à 20% pour les sociétés faisant une première émission d’actions (IPO) d’ici 2014. 2 Le taux de 7 pourcent a été éliminé en 2010. |
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